Les Hooper

Chapitre 7

- Je ne peux rien te promettre, répond-elle. Rendors-toi.

- Non ! Je veux rester avec toi !

Je me blottis contre elle tout en essayant de rester éveillée. Elle glousse et passe sa main dans mes cheveux.

- Comme tu voudras, dit-elle enjouée.

Une heure s'écoule -dans mon rêve- tandis que je reste éveillée auprès de ma sœur. Je voulais rester avec elle mais je sens un poids mort peser sur le mien m'obligeant à dormir. Mais je dois résister. Si je veux passer le plus de mon temps possible avec ma sœur, je dois rester éveillée... Je le dois... Je le dois... Je le... -je réprime un bâillement- Dois...

Ma phrase se finit en un murmure à peine audible jusqu'à ce que la fatigue m'emporte.

Là, je me réveille. Réellement. Je sors de mon lit bien chaud. J'ai l'impression qu'Ysandre est toujours avec moi. Mais quand je regarde mon lit, j'ai l'impression d'être... Seule. Ressaisit-toi ! Elle reviendra à la maison, ne t'en fait pas, me rassuré-je, même si je n'étais pas totalement convaincue... Je descends les escaliers en bois, grelottante. Quand j'arrive dans la cuisine, je vois que le petit-déjeuner n'est pas fait. Bizarre... Pourtant, papa le fait toujours. J'imagine qu'il a oublié... Ensommeillée, je sors automatiquement le lait, le jus multi-fruits, les tartines et le Nesquik. Je remue ma tasse tout en repensant à mon rêve. Ysandre me prévient que je suis d'ôtée d'une capacité... Mais laquelle ? De plus, je devais trouver celle de mes deux autres sœurs.

En pensant à tout ça, je n'ai même pas remarqué que je continuai de remuer ma tasse. Je finis par boire le tout et me lève. Il est déjà presque neuf heures du matin et personne n'est levé. Je rentre les lèvres. Ce n'est pas dans leurs habitudes. Je tremble. Leurs étaient-ils arrivés quelque chose ? Je décide d'aller voir. Je monte quatre à quatre les escaliers et ouvre la porte de la chambre d'Aloyse.

- A... Aloyse ? bégayé-je en entrant.

Il fait tout noir. Je décide de tirer les rideaux et pousse un gémissement de frustration en voyant son lit... Vide. Je me retiens de hurler et monte voir dans la chambre de Blanche au grenier. Là, il n'y a personne non plus... Et papa ? Mes jambes m'emmène instinctivement dans sa chambre.

- Papa ! formulé-je.

Personne. Où étaient-ils donc ? Je commence à refermer la porte quand les draps du lit se mettent à bouger.

Je recule d'un bond.

- P... Papa ?

Toujours pas de réponse. Mais un petit soupir de soulagement m'indique qu'il y a bel et bien quelqu'un dans cette chambre.

- Cébren ?

C'était une voix de femme ! Je n'ose pas répondre.

- Viens.

Et pourquoi ? Qui était-ce ? Est-ce que j'étais encore dans un rêve ? Non non... Je suis réveillée...

- Maman ?

C'est sortit tout seul. Je voulais en être certaine. J'entends les draps bouger, signe qu'elle se lève. Je suis si choquée et si tremblante que je reste clouée au sol. Je dois bouger ! M'en aller, loin d'ici ! Mais mes pieds ne veulent pas. Une tête brune apparaît découvrant un visage ressemblant au mien avec des yeux marrons pâles et des bouton d'acné un peut partout. Le bout de ses mèches étaient blondes et sa chemise de nuit noire me rappelle de bons souvenirs. Je me mets à pleurer.

- Je suis là maintenant, me rassure-t-elle en me serrant dans ses bras. Tout ira bien. Voilà...

Son parfum m'apaise, pourtant je ne retiens pas mes larmes. Ma mère se tenait debout, devant moi et la voilà à me faire un câlin pour me rassurer de la suite. Je me laisse porter et ferme les yeux.

- Où... Où sont les autres ?

Tout à coup, j'ai l'impression de basculer. La pièce tourne autour de moi et un jappement retentit. J'essaie de hurler, sans succès. Je ferme les yeux un moment avant de me relever lentement. L'aboiement que je venais d'entendre me paraissait anormal. Je me lève lentement et me dirige vers la salle-de-bain. Là je me regarde dans le miroir. J'ai l'air complètement fatiguée et sous le choc. Ça ne m'étonne pas, je viens de voir ma mère, morte il y a cinq ans... me dis-je. Je m'apprête à retourner au lit quand j'entends quelqu'un hurler depuis le bas des escaliers :

- Youhou !

La voix était aiguë et ne ressemblait à aucune des personnes que je connaissais. Sans savoir pourquoi, je dévale l'escalier, espérant voir quelqu'un que je connais. Je découvre une personne sans jambes que se tenait sur le seuil. On aurait dit que quelqu'un les avaient coupées. Il rampait vers moi et tendait une main dans ma direction. Ses yeux globuleux étaient rouges comme si il avait saigné et ses habits étaient déchirés. Sa tête ressemblait à une cloche et il n'avait pas de lèvres.

- J'ai... Mal ! ricane-t-il en sortant sa langue comme un serpent.

On n'avait pas l'impression qu'il avait mal... Il avait plutôt l'air de s'amuser. J'avance très très lentement, mine que je me dirige vers lui. Puis je pivote sur la droite pour filer dans la cuisine. Au moment où je plonge sous la gazinière, des hurlements de petit garçon retentirent. Puis, le son mourut et des lapement de langue me parviennent. Je ferme les yeux. Je pense avoir deviné ce qu'il vient de faire : il vient de tuer un petit garçon. Mais, où l'avait-il eu ? Je ne l'avais pas vu !

Des craquements d'os me prévinrent qu'il cassait le corps... Je me retiens de pousser un cri de détresse en portant une main à ma bouche. Des larmes coulent de mes yeux.

Des pas retentirent dans la cuisine. Je retiens ma respiration comme si j'étais à la piscine. Je l'entends soulever les meubles pour me retrouver. Il voulait sans doute me tuer aussi. Mais pour quelle raison ? Les pas se rapprochèrent de ma cachette et la gazinière se met à s'envoler dans la pièce. L'espace d'un instant, je ne comprends rien à se qu'il se passe puis me rend compte que je dois sauver ma vie. Au moment même où il voulut m'attraper, je plonge sous ses jambes et m'enfuis en passant par la porte principale. Je cours dans le jardin aussi vite que je le pouvais. Je vais sauter par dessus le grillage, pensé-je. J'aurai assez de temps pour... Un hurlement retentit derrière moi, signe qu'il me suivait. Je jette un regard derrière moi. Il court ! Je viens de comprendre qu'il a prit les jambes du petit garçon... Pour les coller à son corps ! Je pousse un gémissement. Je n'aurai pas le temps... Je vais passer par la forêt.

Je tourne à gauche juste à temps et court le plus vite possible. Au bout d'une dizaine de secondes, je me retrouve face à la marre -et oui, on a une marre dans notre jardin, cool non ? Non, pas cool du tout car je trébuche sur une racine qui dépassait du sol terreux et tombe dans l'eau en un magnifique plat. Je retiens une nouvelle fois ma respiration tout en coulant au fond... J'ignorais que cette marre était profonde ! Je me débats pour remonter à la surface mais mes habits m'entraînent au fond. Je coule... Je vais finir par mourir...

J'ai l'impression que tout tourne autour de moi. Mes poumons me brûlent et sent le contact du fond me toucher mais avant que ma tête ne le touche, quelqu'un agrippe mon pyjamas et me tire à la surface. Toussant et crachant de l'eau, je reprends l'air libre. Tremblante de froid et de peur, je regarde autour de moi pour savoir qui m'avait sauvé la vie. Pas cet homme bizarre, si ? Serait-ce lui qui m'aurait sauvé de la noyade ? Puis, un jappement me fait comprendre que ce n'était pas l'homme sans jambes mais... Hope.

Je me retourne et voit le chien vert sans poils se dresser sur la petite colline. Mais je n'ai pas la force de fuir. Je n'en ai plus. Alors je repose la tête sur la terre...

J'ai l'impression que des heures s'écoulent tandis que le chien me regarde. Pourquoi ne m'attaque-t-il pas ? Il ne veut pas ma mort ?

Je rouvre les yeux et regarde autour de moi. Le chien a disparut. Je me lève et sent des mains agripper ma taille, tout en coinçant mes bras. Je me débats faiblement et sent le souffle chaud de l'homme... De l'homme sans jambes. Je l'entends ricaner dans mon dos et sortir une lame. Non, non ! Ça ne peut pas se terminer comme ça ! Je me débats mais il me tient bien. Puis, je sens une lame transpercer mon dos, puis ma côte... Du sang en faillit et mes yeux sont grands ouverts avant que je m'effondre par terre, inerte...