• 16.0 • moins y croire

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Lorsque je sors d'espagnol, Egan m'interpelle. Il crispe sa poigne sur mon bras, je m'en dégage et il s'excuse avant de soupirer, vérifier que personne ne regarde.

—Luz, il faut que vous arrêtiez.

Hein ?

—Quoi, entièrement ?

—Oui. Entièrement.

Le pire c'est qu'il a l'air sérieux. Surtout, que c'est raisonnable, ce qu'il raconte. D'un certain point de vue.

—Pourquoi ?

C'est pas raisonnable, mais ça tient la route. On s'en sort bien. Tout le monde est content. Aaron dit des conneries, mais moi je n'ai rien fait qui mérite qu'on m'empêche ce confort.

—Parce que tu es ridicule, qu'il est ridicule, que vous êtes ridicules, personne n'y croit et je ne supporte plus du tout cette situation.

—Mais tu as dit que c'était une affaire ni d'ego, ni de ressenti, te concernant...

—Et j'ai été stupide. De toute façon, ça te fait quoi ? C'est juste une affaire de popularité, non ?

C'est un peu vite dit. Je mords ma joue.

—Ouais je...Ouais.

—Alors c'est réglé.


Alors, en anglais, c'est Aaron qui m'invite à m'asseoir dans le fond de la classe, et me parle quand le prof fait crisser son abominable craie sur le tableau. Il murmure tout bas, tout sourire : c'est troublant comme il sait avoir l'air amoureux, quand il n'en est rien.

—Luz, on peut pas arrêter.

Je sais bien, je veux pas. Mais je pense à Egan et la détermination dans ses mots. Et puis, je ne puis m'empêcher de me demander : est-ce qu'il jouait pendant qu'on était encore officieusement ensemble ?

—Tu l'as blessé, tu sais.

—Je sais et je m'en suis excusé, mais c'est moi qui ai merdé. On peut pas, parce que je vais être l'horrible connard qui te plaque.

Je garde le silence. Aaron, me fais pas ça s'il te plait. J'ai déjà des idées. J'ai déjà des idées alors que je veux rendre service à Egan. Mais c'est trop tentant. Et plus tu me regardes et moins je peux m'en empêcher. Et il reprend, voix tellement basse que je lis sur ses lèvres plus qu'autre chose.

—Luz, soutiens-moi, s'il te plait, j'ai besoin de...Je peux pas, d'accord ? Je peux pas être out ou...

La détresse dans ses yeux achève de me convaincre. Ceci dit...

—Je comprends Aaron, mais je crois que j'ai une idée de comment faire.

—Pour ne pas blesser Egan ?

Il veut ma mort je crois.

—Pour arrêter sans que tu aies de problèmes.

Ses yeux s'ouvrent en grand.

—Quoi ?

—Tout le monde me voit comme trop têtue pour te plaquer, pas vrai ?

—Pas forcément.

—Objectivement.

Il roule des yeux, cette fois. Visiblement, ce n'est pas une réalité qui lui plaît. Cœur, arrête de battre fort, tu m'énerves. Les papillons c'est pas fait pour les estomacs non plus.

—...Les mauvaises langues, oui.

Je souris alors, et il ne semble pas voir où je veux en venir. Tant mieux, même moi je trouve ça nul.

À nos démesuresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant