Chapitre 10 - " Je sais que tu es là. "

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Heureusement pour moi, le couloir que j'avais emprunté était relativement libre, et la voie dégagée. Je savais bien que me mettre à courir comme ça était une très mauvaise idée, mais c'était la dernière fois, promis.

 L'allée semblait interminable. Je tournais à droite, à gauche, en essayant de ne pas trop ralentir. Malgré ma respiration qui commençait déjà à devenir sifflante, je semais mes poursuivants : leurs voix devenaient de plus en plus indistinctes. Rien ne m'empêchait de faire une petite pause, si . Alors, je ralentis l'allure, jusqu'à m'arrêter complètement. Le couloir était désert. J'avais de vagues souvenirs qu'un jour, quelqu'un m'ait dit de rester bien droit après un effort, pour reprendre sa respiration. Ce souvenir devait dater du collègue, peut-être... ou du lycée. 

N'empêche, je me demandais bien comment ils avaient fait pour me perdre. Je veux dire, je n'ai pas couru si vite, si .... Un peu confus par le silence de mort de l'hôpital, je marchai doucement, en retournant dans le hall. C'était sûrement une idée stupide, mais bon. Je sentais qu'il y avait quelque chose de pas normal. Soudainement, un cri strident et bref retentit, me figeant sur place. Le son résonna sur les murs blancs de l'hôpital, et se perdit dans le silence. C'était un cri de femme. 

– Qu'est-ce que... chuchotai-je.

Des bruits de pas rapides retentirent à leur tour. M'avait-il retrouvé ? Non, impossible, il était mort... j'ai vu son cadavre dans la neige. N'écoutant que mon instinct de survie, j'entrai dans la première pièce ouverte, et me cherchai frénétiquement une cachette. Des toilettes. L'une des seules pièces ouverte dans un hôpital, évidemment. J'entrai alors dans une des cabines, et grimpai sur la cuvette, en me tenant fermement au bord de l'étroit cabinet. Aucunes voix ne reprenait. Que se passait-il ? Pourquoi il y avait-il eu un cri ? Je me forçai à reprendre mon calme, et tentai de respirer calmement. Mon cœur battait si fort que j'avais l'impression que quiconque passant devant les WC pourrait l'entendre. 

Maintenant j'en étais sûr : il y avait quelque chose de pas normal ici. Quelqu'un venait de passer devant les toilettes. Un peu calmé, et plus curieux qu'effrayé, j'étais silencieusement descendu de la cuvette, et m'étais penché vers l'ouverture sous la porte, histoire de voir un peu ce qui se passait. Ce que je vis me laissa sans voix : un homme, peut-être, vu la pointure des chaussures, marchait très calmement dans le couloir, en traînant quelque chose de visiblement lourd... à y mieux regarder, j'avais compris qu'il traînait le corps sans vie d'une infirmière, par le poignet. Je m'étais brusquement redressé, en étouffant un cri. Ça ne pouvait pas être l'autre dingue, non ! C'était impossible !

– Arrête donc de te cacher, je sais que tu es là.

Je me figeai net. Il continua :

– Tu sais, ça m'a vraiment peiné de devoir le tuer. Il aurait pu m'être utile...

Je serrai les dents. C'était lui qui avait tué l'autre psychopathe. Je l'entendis marcher vers les toilettes, ayant vraisemblablement lâcher le corps. Il s'arrêta pile devant la cabine où j'étais – plus ou moins bien – caché. 

– Allez, sors de là, Camille.


* * *


Il sortit du hangar, haletant. La tempête de neige brouillait complètement la vue. Pourtant, il devait le faire. Il n'y avait pas d'autres options. Alors, il leva le bras, et tira une balle qu'il savait perdue. Le bruit habituellement assourdissant de la détonation était complètement étouffé par le vent qui soufflait dehors. Des nuages de neige étaient soulevés de toutes parts : impossible de le voir à travers ce mistral. Il tenta quelques pas : le froid était mordant. Comment avait-il fait pour courir là-dedans ? Sûrement la peur et l'adrénaline. Il soupira de lassitude. De toute façon, il ne l'aurait jamais eu. Il n'aurait jamais pu le faire, malgré son esprit malade. Il entendit des bruits de pas derrière lui : quelqu'un descendait de l'escalier métallique... et ce « quelqu'un », il le connaissait très bien. Le nouvel arrivant marcha prestement vers lui. Le tueur se retourna, le regard vide. Il savait pertinemment ce qui allait arriver. 

– Je le savais bien, pourtant. commença l'individu. Tu es incapable de réparer tes erreurs.

– J'aurais voulu quand même... m'excuser pour tout ça.

– Tst. Tu es trop sentimentaliste. pesta l'homme en sortant une arme de poing d'un étui, fixé sur sa ceinture. Mais, si ça peut te faire plaisir...

Il appuya le canon de l'arme contre la tempe de l'autre homme, et eut un rictus mauvais.

– ... je m'en chargerais moi-même.

Il pressa la détente. Le sang gicla, et tâcha le blanc immaculé de la neige. Le corps du tueur s'écroula lourdement sur le sol, sans même un bruit. L'homme soupira, déçu.

– Bye, Conrad. 

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