Partie 2

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Les basses battant dans les oreilles, je me fraies un chemin dans la foule dense qui arpente les rue de la mégapole, fronçant le nez en passant près de gens subissant la chaleur.

Quelques pas plus tard, le lycée central se dresse en beton et en verre, scintillant de bon matin aux lueurs du soleil.

D'un oeil dubitatif, j'observe les structures modernes aux airs suffisants. Mon ancien lycée était terne, banal et vieux, je l'aimais beaucoup. Ca avait un côté rassurant, une sorte d'image nonchalante. Ici, tout est clinquant, aussi propre qu'un sous neuf.

Contournant les grilles, je jauge les passants, m'avançant discrètement. En ce jour de fin Août, leurs corps fin et musclés, galbés, se mouvent avec grâce, parés de bijoux d'or et de montres au cadran énormes. Un coup d'oeil sur l'arbre de vie et la lune pendants au bout de leur cordon à mon cou me rappelle que je suis du quartier nord, que je n'ai rien à faire ici où règnent les marques et créateurs.

Brusquement, je me retourne et m'enfuis loin du Centre.

Ma mère est au boulot alors je prends mes écouteurs, un bouteille d'eau et fourre ça avec mes clefs dans mon vieux sac à dos puis prends la route de la librairie.

Maggy est au comptoir, elle lit du Hermingway et me fait un signe lorsque je pousse la porte de mon cocon. L'odeur du papier, les couleurs chaudes des reliures et la sensation des pages sous mes doigts m'appaisent aussi bien que la chaleur des étreintes de ma mère.

En rangeant les livres que les quelques clients avaient rendus,chantonnant au rythme de Billie Eilish, je bouscule un homme qui tendait le bras pour attraper un ouvrage haut placé. Sa barbe blanche et ses traits marqués me font dire qu'il est âgé et ma culpabilité m'assahit davantage.

-Je suis désolée ! Je ne vous avais pas vu..

Alors que je lui débite mes excuses en enlevant un de mes écouteurs, il sourit,bienveillant, plissant les yeux et creusant deux fosettes.

- Il n'y aucun mal à être bousculé de temps à autres, c'est bien ennuyant de rester dans son confort. Pour vous faire pardonner, vous voulez bien m'attraper le livre ?

Je pose un pied sur l'étagère et me soulève pour attraper le polar de Maxime Chattam qu'il me montrait du doigt. Etrangement, ses paroles me restaient en mémoire et lorsqu'il me glissa un billet dans la main je mis un temps à réagir.

Entendant la porte se fermer je tape le sprint de ma vie et tourne la tête dans tout les sens afin de l'apercevoir dans la rue mais, en dehors d'un groupe d'enfant, la rue était déserte. Il avait comme disparu.

La porte refermée, je regagne mon cadis plein de livre et ouvre la paume de ma main.

Un billet de 10 dollars trônait fièrement dans ma paume, attisant mes troubles. Je lui redonnerai en temps et en heure, hors de question que j'utilise cet argent que j'ai certainement pas mérité.

Le reste de la journée est calme, comateuse, et j'avoue avoir plusieurs fois fais des pauses devant les ventilateurs installés au comptoir de l'entrée.

Le manque de client était palpable, Maggy me laissa donc rentrer plus tôt.

Serrant la lune pendu à mon cou, je levais les yeux vers le ciel rosâtre, le ciel annonçant l'arrivée des étoiles.

Le couché de soleil et le levé du corps céleste blanc m'a toujours fasciné.
C'est comme une sorte de journée inversée, ça a un côté frais et rassurant, personne ne nous vois, camouflés dans l'obscurité bienfaisante.

Je sais, ça sonne psychopathe, mais je peux m'empêcher d'aimer le discret et mystérieux.

Tournant dans ma rue, je remarque la voiture de ma mère et sautille presque de joie à l'idée de passer la soirée en sa compagnie.

Je presse le pas et monte les escaliers trois à trois, autant que mes jambes me le permettent.

Le trois pièce est plongé dans une demi obscurité que le crépuscule peine à percer. La voix de ma mère filtre à travers sa porte et je peux m'empêcher de fermer les yeux quelques secondes pour profiter de sa voix divine.

Ma mère a toujours chanté, aussi loin que je m'en souvienne. Sans genre et sans distinction, du R&B comme du classique. 

Reconnaissant les airs de « Take me to church » je me joins doucement à elle, en fredonnant.

La porte grince un peu lorsque je l'ouvre et ma mère me sourit en levant la tête vers moi.
Entamant le refrain, elle me prends les mains et dodeline de la tête.

Mon sourire est proéminent alors que sa voix cristalline se fond avec ma voix légèrement cassée de nature.

Untitled LifeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant