Les minutes défilent et nous sommes toujours au même point. Toujours pas de café à l'horizon, seulement un tas de gens qui s'impatiente. Abel, quant à lui, occupe bien son temps. Il fait ouvertement du gringue à une jeune fille qui se trouve trois mètres devant nous. C'est vraiment un crétin, un salopard même ! Ce n'est pas comme si, je n'étais pas là ! Il n'a aucune considération envers les autres, c'est affligeant !

Le comportement déplacé de celui qui m'accompagne et la file qui ne désemplie pas, me donnent envie de partir en courant. C'est ce que je m'apprête à faire lorsque mon imbécile de voisin m'attrape par le bras et m'ordonne :


— Attendez-moi là ! Je reviens !


Il plaisante ? Je ne vais tout de même pas patienter ici comme une cruche, que monsieur daigne bien revenir... qu'il boive tranquillement ce café extraordinaire sans moi et qu'il drague cette fille en public, mais je ne vais pas rester ici en train de le regarder faire. Il en est hors de question ! J'ai encore un peu de dignité !

Je me dirige à grandes enjambées vers ma coccinelle de collection, quand je suis rattrapée par celui qui a dû recevoir un vent de la fille qu'il convoitait.


— Pourquoi ne m'avez-vous pas attendu ?

— Je sais voir quand je suis de trop ! Je n'ai aucune envie de tenir la chandelle.


Il rigole comme un fou, comme si, ce que je venais de dire était complètement hilarant. Il est cinglé !

Je continue mon chemin sans prêter attention à l'abruti qui se trouve derrière moi. C'est bon, j'ai compris ! J'ai mis du temps, mais j'y suis arrivée. Cet homme est fou à lier, il n'y a plus aucun doute !


— Attendez ! Ce n'est pas ce que vous croyez !


Il me suit de près et quand il arrive à ma hauteur, il me tend un petit gobelet.


— Tenez ! Et dites moi, si cela ne vaut pas l'attente ?


Comment a-t-il fait pour être servi aussi rapidement ? Il y avait encore un amas de monde !


— Inès, je suis désolé ! Encore un fois, je sais ! Mais j'ai aperçu cette fille puis...

— Elle vous a plu...

— Mais non ! J'ai remarqué qu'elle faisait entrer à l'intérieur du bar, en priorité, les personnes qui l'intéressaient ou bien des fidèles de l'établissement, donc j'en ai profité, mais ce n'est pas du tout le genre de fille que je fréquente.


Non ! Lui, c'est plutôt les femmes qui se déshabillent facilement, auxquelles il adhère !


— Buvez, avant que cela refroidisse !

— Vous êtes...

— Incroyable ! Je sais ! finit-il ma phrase.


Il l'est ! Mais malheureusement pour moi, pas que dans le bon terme !


— Et très sûr de vous ! je rajoute, histoire qu'il n'est pas le dernier mot.


Mais ce mec est surprenant, il ne se démonte pas, au contraire, il enfonce encore un peu plus le clou :


— Toujours ! Alors ce café !


Je lève mon verre jusqu'à mes lèvres et en bois une petite gorgée, le mot approprié est que je déguste avec délectation ce nectar. L'arôme qui monte à mon nez est tout simplement divin. Cette boisson est spectaculaire ! Il avait raison, je n'ai jamais bu aussi bon café de toute ma vie. Je savoure chaque gorgée.


— Vous m'avez menti !

— Non ! Pas possible, vous n'aimez pas ?


Reste t-il choqué par ce que je viens dire. Il prend un certain temps à s'en remettre et j'en remets une couche. J'adore le voir ainsi, désemparé, complètement abasourdi !


— Vous m'avez dit que c'était le meilleur café du pays...

— Oui, en ce qui me concerne ! Mais apparemment pas pour...

— Non ! je le coupe. C'est le meilleur du monde !


Il sourit enfin à mon annonce.


— C'est peut-être vrai ! Mais je n'en ai pas la preuve !

— Moi non plus ! Mais je confirme, ce breuvage est exceptionnel !

— Entièrement d'accord !

— Et si on allait faire un petit tour sur la plage ? me propose t-il. Ça serait bête de ne pas en profiter, alors, qu'on est juste à une dizaine de mètres de l'eau.


Il y a quelques minutes, je me suis promise de ne plus tomber dans mes travers, surtout en ce qui concerne ce Don Juan, mais maintenant, je ne sais plus quoi penser, ni faire...






Publié le vendredi 22 mars 2019



ABEL ET LA BÊTEWhere stories live. Discover now