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  *écoutez ce cover de losing my religion de frank iero, c'est beaucoup trop beau*



   Je me sentais vraiment idiot, je n'avais pas pensé à cela depuis le début. Je tapais « Gerard Way » sur internet et trouvais son adresse. Le numéro de téléphone correspondait bien avec celui que j'avais. Il n'y avait pas de photo, mais il n'habitait pas loin.

J'attendais un dernier patient, un ado un peu perdu envoyé par ses parents qui croyaient qu'il souffrait de dépression. J'éteignis mon ordinateur, notais bien l'adresse sur un post-it et me levais jusqu'à la salle d'attente. Il était seul avec sa mère qui ressemblait à une boule disco avec ses nombreux bijoux, sa chemise de toutes les couleurs, ainsi que ses cheveux bouclés rouges. Le môme avait une grosse tignasse châtain qui lui recouvrait à peine le haut des sourcils. Je les saluais et entraînais le petit dans mon cabinet, une main dans son dos. Il s'installa confortablement sur le canapé vert en velours et je restais derrière mon bureau, préparant de quoi écrire. Je laissais toujours le patient commencer à parler, mais pour une fois il ne dit rien.

« Cette journée, raconte moi, dis-je en souriant faiblement.

- Je suis allé en cours, mon prof de guitare est venu comme tous les mercredis, puis j'ai regardé une série.

- Rien de spécial, à préciser ?

- Non, comme d'habitude Mr. Iero. Ma mère croit que je déprime, mais je pense que c'est elle qui doit aller voir un psy ! Vous avez vu comment elle s'habille ?! Peut-être que c'est pour cacher qui elle est vraiment ou je ne sais quoi !

- Alex, les parents font ce qu'ils pensent être le meilleur pour leurs enfants, mais parfois ils ne voient pas qu'ils se trompent. Si tu penses que tu n'as pas besoin de psy, on peut parler normalement, je parle normalement à tous mes patients, mais on peut parler comme si j'étais un ami de lycée.

- Vous êtes trop vieux pour être un ami de lycée.

- Alors je suis le gentil concierge qui vous vend des cigarettes et là tu me parles.

- Vous avez pas une tête de concierge. »

Je levais les yeux en l'air, exaspéré, mais je souriais. Cet ado en avait beaucoup dans sa tête et il avait juste besoin de faire sortir ses pensées à quelqu'un d'autre que ses parents.

« Qu'est-ce que vous avez fait avec votre prof de guitare ? Lui demandais-je.

- On a fait l'amour dans mon lit. »

Ou alors il était juste amoureux.

֍

Devant la maison de Gerard Way, il y avait une murette, je m'y asseyais et l'observais. C'était une maison mitoyenne complètement banale. Blanche, avec une porte orangée. Sur la fenêtre qui donnait sur la rue, un pot de fleurs avait été posé. Des coquelicots. L'herbe du jardin de devant était sèche et un petit chemin de cailloux blancs menait à l'entrée. Une voiture était garé à côté du trottoir, un vieux modèle des années 50 qui prenait de l'âge. Je me demandais ce qu'il faisait dans la vie. Je n'osais pas aller sonner, préférant scruter sa moindre sortie.

Une ombre passa devant la fenêtre, mes sourcils se levèrent. La poignée de la porte s'abaissa et un jeune homme sortit de la maison. Il semblait grand de taille, les cheveux noirs comme ses habits. Il paraissait à la description que Gerard m'avait faite. Mon cœur battait la chamade. Il descendit le chemin de cailloux, ouvrit la portière de sa voiture et démarra le moteur. Il ne m'avait pas vu, je ne bougeais pas, pris par une force invisible qui me clouait sur place. Il semblait fatigué ou triste, puis il sortit un téléphone de la poche de sa veste et il semblait taper sur le clavier. Mon téléphone vibra dans mon pantalon. Il m'avait envoyé un message, à moi ! Gerard souffla et s'en alla dans la rue, me laissant pantois. Je ne sentais plus mon corps, mais je ne pensais qu'à une chose : que Gerard était très beau, plus beau que dans mon imagination.

Vous méritez de vivre [En énorme pause]Where stories live. Discover now