Prends-les, l'assiette est personnalisée...

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PDV Océane

TOC, TOC, TOC

Je toquai à la porte, préférant le faire à l'ancienne que d'appuyer sur un petit bouton qui déclenchait la même sonnerie que faisait mon réveil au lycée. Au bout de trois tentatives, une femme blonde aux yeux chocolats vînt m'ouvrir. Elle semblait surprise de me voir ici, puis au bout d'un long moment de silence gênant, des pas se firent entendre et une voix familière résonna :

- Chérie, c'est qui à la porte ? demanda Jules (très fort) quand il débarqua devant le seuil. Il s'arrêta alors de faire son nœud de cravate très mal fait d'ailleurs).

- Océane, dit-il en grinçant des dents.
- Jules, fis-je en souriant tout en me balançant sur mes pieds. 
- Charlotte, mon amour, tu veux bien nous laisser, un instant ? demanda Jules à la blonde qui devait sûrement être sa femme à en juger de la fine bague orné d'une pierre précieuse sur son annulaire gauche. Une fois, la blonde parfaite partie, Jules sortit pour me faire face, et claqua la porte.

- Qu'est-ce que tu fous ici ? dit-il en serrant les poings (signe qu'il n'était pas forcément content de voir sa meilleure amie aka la best aka moi).
- On sent l'entrain dans ta voix !
- Ta gueule et réponds-moi !
- Ce n'est pas une façon de parler devant tes propres enfants, JULES !
- Comment tu sais que j'en ais ?
- Un blond nous regarde bizarrement, fis-je en désignant la fenêtre où on pouvait voir un petit garçon d'environ 2 piges qui nous regardait, les sourcils froncés. Jules se retourna, il sourit au gamin (ce qui me confirma la théorie que JULES n'avait absolument rien retenu de sa dernière année de lycée).
- Il s'appelle Léo, se radoucit-il.
- Oh, maintenant tu me parles !
- Oh, maintenant tu n'as plus d'accent anglais ignoble ! dit-il en haussant les épaules.
- Touché, Jules.
- Coulé, Océane.
- Maintenant que tu as une humeur normale et pas de cochon affamé, peux-tu m'expliquer ce que tu as fait dans ta vie pour finir avec une blonde et un gosse ?
- J'ai réussi, que veux-tu ! ria-t-il en en me fixant. Il me fixa, longtemps. Trop, c'est devenu gênant. En plus, il a l'air de vouloir dire quelque chose mais on dirait que le pauvre petit Jules ne serait pas capable de prononcer son propre nom. Il coupa le silence par un raclement de gorge.

- Bon, plus sérieusement, qu'est-ce que t'es venu faire ici, Océane, ça fait au moins dix ans que je ne t'ai pas vu, fit-il en prenant son air sérieux et en désignant de la tête mon assiette aluminée.
- En fait, ça fait vingt ans que l'on ne s'est pas vu, et si je me trompe pas tu dois avoir 39 ans, comme moi. Mais ou sinon, je suis venu te donner ça, répondis-je en lui tendant mon assiette aluminée. Il ricana, de ce genre de rire sarcastique à vous faire glacer les os (Jules est très fort pour ça).
- Donc, tu es venu, vingt ans après un silence total de ta part, venir chez moi par je-ne-sais quel moyen, pour me donner une assiette ? UNE ASSIETTE, OCÉANE ? UNE ASSIETTE ! cria-t-il tandis que je reculais de l'allée alors qu'il avait posé ladite assiette sur le gazon. Il shoota dans l'assiette qui ne se cassa pas (hè hè, la Grand-Mère est solide). Je ramassai l'assiette pour lui tendre :
- Prends-les, l'assiette est personnalisée...
- Putain Océane ! Tu reviens vingt après et t'arrives et tu me donnes une putain d'assiette ? Et, attends, MADAME n'a pas fini son cirque merdique ! Ton excuse c'est quoi ?C'est que l'assiette est personnalisée ? Tu te fous de ma gueule, c'est ça ? T'as rien trouvé de mieux dans ta vie que de laisser le pauvre Jules qui avait besoin de vivre par lui-même et besoin de toi pendant vingt ans ? cria-t-il. Il reprit, d'un ton plus plaintif. Vingt ans, Océane ? Tu te rends compte ? Pendant vingt ans, je me levais dans l'espoir que tu m'appelles, que tu reviennes ou même que tu m'envoies un message. Océane, tu m'as laissé pendant vingt ans et pourtant, même si tu te ramènes avec ta merde, je n'arrive pas à ne pas te voir en tant que super amie. C'est ça le pire, je pourrais peut-être jamais te pardonner, mais je resterais toujours. Pour toi, au cas où...  

Il tomba, sur le gazon et alors que je venais le réconforter, il me chassa de la main et j'entendis : "Vas-t-en, Océane, vas-t-en, pas trop loin, au cas où...". Et je m'en allais, laissant Jules à sa famille parfaite. Sur la route vers mon petit appartement, je décidai que j'allais rouler toute la journée, pour parfaire mon air de jeune femme libre et revêche. Mauvaise idée.

19h00
Il est 19 heures pile, le soleil est couché et mon envie de liberté avec. Je décidai qu'il était temps de rentrer. Mauvaise idée. Et puis, alors que j'arrivai au carrefour, je ne freinai pas. Mauvaise manœuvre.

BOUM !

Jules, après le départ d'Océane et de sa femme partit déposer Léo à la crèche, toujours accroupi dans le gazon, ramassa l'assiette d'Océane et l'ouvrit : c'était une assiette dont la tête de la reine d'Angleterre était cachée par des serviettes en papier "La Reine des Neiges". Et, sur ce fameux assemblage, trônait des scones, des scones, et encore des scones. A la myrtille. Il rigola intérieurement.

Seulement NousWhere stories live. Discover now