À cœur perdu

Chapitre 4

— Tu écris toujours dans ton journal ? demande-t-elle distraitement.

— Oui.

— Moi aussi, tous les jours. Je suis sûr qu'il serait honoré de savoir qu'on lui dédie tous les quatre nos secrets et nos vies dans ces carnets. D'ailleurs, Céline et Florian le font toujours ?

— J'en sais rien.

— Après tout, vous êtes tous amis depuis l'enfance.

— Ouais.

Elle se met à sourire en me fixant.

— Quoi ?

— J'espère vraiment que cette fille te redonnera vie.

J'écarquille les yeux.

— Qu'est-ce que tu racontes ?

— Le vrai Joachim nous manque à tous, tu sais.

Je hausse les épaules en me levant.

— Je dois voir Florian, tu peux me ramener, s'il te plaît ?

Elle soupire, mais n'insiste pas.

— OK, je te ramène.

***

Moi : J'arrive Flo, jsuis avec Kelly là.

J'arrive devant le Flamingo lorsque le soleil commence à se coucher. Je sors de la voiture de Kelly, mais avant de refermer la portière, je m'abaisse à sa hauteur et lui demande :

— T'es sûr que tu veux pas venir ?

— Non, ça me rappelle trop de choses cet endroit-là. Mais passe le bonjour à Florian et Céline de ma part.

— OK.

— Au revoir, Joachim.

Je lui fais un signe de tête avant qu'elle ne redémarre et parte. J'entre dans le bar et, comme d'habitude, je salue Xavier, qui me salue en retour. Je m'apprête à aller derrière le comptoir lorsque je reconnais un visage familier. Je reste bloquée sur elle, lorsqu'elle tourne la tête vers moi.

— Tiens, Joachim, ça faisait longtemps ! plaisante-t-elle.

Qu'est-ce qu'elle fout là ? C'est vrai qu'elle descend à l'arrêt Aubépine, je l'ai vu hier soir. Mais j'étais loin de m'imaginer qu'elle vient boire des coups dans mon repère. Elle est avec une brune à lunettes, dans le style intello. Je m'avance nonchalamment vers elle. Elle semble avoir bien bu, vu ses joues rouges et ses yeux vitreux. Par contre, son amie est sobre, et son nez au-dessus d'un verre d'ice-tea éloigne mes doutes.

— Julia, je te présente mon nouveau collègue robot : Joachim.

Le collègue robot, c'est ça que je suis pour toi, Émilie ? Ladite Julia lève son nez vers moi et me toise.

— Celui qui ne répond jamais et qui te laisse tout faire toute seule ?

Bizarrement, lorsque ça sort de la bouche de cette Julia, ça ne me fait rien du tout. Mais quand Émilie acquiesce en soupirant, je sens déjà la colère monter.

— Ouais, c'est bien lui !

— Je ne suis pas enchantée alors, Joachim, me lance Julia.

La question est : est-ce que j'en ai quelque chose à foutre, ma chère Julia ? Je me désintéresse vite d'elle, ce qui semble la toucher, et me tourne vers Émilie.

— Qu'est-ce que tu fais là ?

— Bah je bois, ça se voit pas ?

— T'as un truc à fêter pour boire autant ?