CHAPITRE QUARANTE .4

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Il regarda Suwane qui regardait en l'air puis le catamaran, s'approchant à son tour.

— Non Suwane, ton cousin n'est pas encore avec nous. Dès ce matin, je l'ai envoyé auprès de son père avec une lettre expliquant le drame vous étant arrivé à toi et ton frère. Glèm a pensé que prévenir d'abord son père pourrait sans doute faciliter les choses avec le tien.

Le visage de Suwane montra qu'elle n'était gère convaincue.

— J'ai suivi son avis et je lui ai demandé d'aller voir son père puis, ensuite, d'aller voir son oncle avec lui. J'ai demandé à mon cousin Awel de m'aider à rédiger une lettre de condoléances pour ton père et une autre d'explication pour ton oncle. Des chefs d'œuvre de diplomatie.

Il nous retrouvera ici en début de soirée et pourra nous raconter ce qui s'est passé. Et si nous allions voir l'oiseau ? Mousse veut le voir. Il s'entend très bien avec Alsalam.

Suwane découvrit le second cavalier qui s'était rapproché doucement d'Erwan.

Adacie lui faisait un petit signe de bienvenue de la main.

— Mousse ! Tu vas nous faire encore grossir avec tes gâteaux !

— Ahahah ! Pas gâteaux aujourd'hui... des sorbets !

L'adolescent tordu s'exprimait avec une certaine difficulté. Son visage reflétait sa différence. Ce genre d'enfant ne survivait jamais longtemps, sa présence ici tenait du miracle ou de l'hérésie pour certains.

Suwane se dit qu'au moins, sa difformité à elle n'était pas visible... tant qu'elle ne parlait pas. Ce pauvre gamin n'avait même pas cette chance. Il tourna un regard d'une douceur étonnante, mais craintif aussi, vers Suwane qui le salua en ralentissant ses gestes.

À son grand étonnement, il répondit avec le même salut bizarre qu'Adacie et Tranit utilisaient avec leurs hommes et il s'approcha d'elle.

— Oiseau à bobo ?

Suwane fit signe que oui et montra son épaule. Le gamin, Mousse, fit signe qu'il comprenait et prit un air peiné. Erwan se rapprocha avec Adacie.

— Allons le voir, il y a encore plein de choses à faire.

Ils remontèrent vers la maison forte. Tous les soldats présents essayaient d'attirer le regard d'Erwan qui ralentit un peu pour répondre à leurs saluts. Le goéland se joignit aux acclamations et se dressa sur ses pattes à la grande joie de l'adolescent qui s'approcha de lui rapidement sous l'œil attentif de Suwane.

Resté en arrière, Erwan les regarda faire, satisfait.

— Si Mousse lui parle aussi facilement, c'est qu'elle est bien. Tant mieux pour nous. A-t-elle donné d'autres informations depuis son récit d'hier ?

— Non, seigneur. Quelques commentaires désobligeants à l'égard de son père, c'est tout.

— Bien, nous allons nous isoler quelque part et parler encore un peu, j'ai des questions à lui poser.

— Oui seigneur. Le chariot est disponible, nous y serons tranquilles.

— Qu'est-ce que tu avais prévu aujourd'hui ?

— Tranit m'a demandé de reconnaître un nouveau terrain d'exercice. J'avais prévu d'y aller cet après-midi.

— Tu pourras, je dois aller la voir.

Erwan se rapprocha de l'oiseau et de Mousse qui avait grimpé dessus et se plongeait dans son plumage avec délectation. L'oiseau semblait apprécier.

— Mousse ? Je dois parler avec Adacie et Suwane. Tu n'oublies pas de préparer à manger.

Il se tourna vers Adacie.

— Nous organisons un banquet ce soir, ici même. Awel, Benwan et d'autres officiers. Mousse s'occupe de tout.

L'adolescent redescendait du goéland, un enseigne escorté de deux hussards lui approchait son dorkis. Il eut un geste d'au revoir absent, le regard fixé sur le catamaran qui accostait et partit au petit galop avec son escorte.

Adacie désigna le chariot de Tranit.

— Par ici mon seigneur. Nous sommes à vous !

Ils entrèrent dans le vestibule bureau de Tranit et s'assirent autour de la table alors que les enseignes d'Erwan et ceux d'Adacie se dépêchaient d'apporter quelques boissons. Le jeune seigneur et maître sortit de son uniforme le long rapport rédigé la veille par Suwane et le posa devant lui.

— Un cavalier me l'a apporté une fois que Tranit en eut pris connaissance et je l'ai lu et relu. Il s'adressa à la jeune écuyère. Encore une fois, je suis désolé pour ton frère. Rien n'est jamais plus terrible que de perdre un parent.

Mais j'ai des précisions à te demander Suwane, des précisions sur ton père directement, mais aussi ta famille au sens large. Avec ce que Glèm m'a appris, cela pourrait m'être très, très bénéfique.

Ça ne t'ennuie pas de répondre encore une fois à des questions sur ce sujet... disons délicat ?

La jeune fille sembla songeuse un instant et ses yeux se fixèrent sur Adacie qui l'encouragea d'un battement de paupières et un petit sourire.

Finalement, elle acquiesça et sortit son cahier et sa mine de plomb à la plus grande satisfaction d'Erwan qui laissa les enseignes les servir avant de se pencher vers elle.

— Je ne promets jamais rien, mais j'espère que ce sera la dernière fois que je t'ennuierai avec ça.

* * *

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Vixii

Les Larmes de Tranit - 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant