❝𝐄𝐗𝐈𝐒𝐓𝐄𝐑 𝐀𝐔𝐓𝐑𝐄𝐌𝐄𝐍𝐓❞ ᵏᵒᵒᵏᵛ

IX

Encore à zigzaguer entre les rues à une heure bien trop tardive. À croire qu'il commençait à vraiment vivre la nuit. Mais qu'est-ce qu'il aimait ça. Le calme, la sérénité, l'air frais et pur que dégageait cette partie de la journée. Là où il pouvait être vraiment lui-même. Soit, aller voir ses amis de drogue, s'amuser et faire les cons dans la ville. Il donna un coup de pied dans une bouteille vide de soju, qui roula sur un bon trois mètre avant de disparaître entre deux poubelles. Puis, il coinça une cigarette entre ses lèvres et l'alluma de brefs flammes, venant de son briquet favoris. L'hiver s'installait peu à peu, quelques flocons tombaient à certains moments, et les arbres étaient à présent nus comme un ver. Les feuilles qui résistaient se faisaient emportées par la légère brise de vent, leurs ôtant le restant de vie qu'elles avaient. Le jour, les habitants sortaient de plus en plus les grosses doudounes, les gants, les chaussures fourrés, les écharpes et les bonnets. Mais quant à Jungkook, lui, il gardait toujours sa petite veste en cuir. Il ne craignait pas vraiment le froid. Ça lui arrivait de temps en temps à mettre un gros manteau. Mais c'était rare.

Il arriva à une intersection et marqua donc une pause dans son élan. Très bien, laquelle choisir ? Il cracha son fantôme en détaillant les deux allées qui s'offraient à lui. Une lui faisant face, mal éclairée par un lampadaire crasseux ou l'autre à sa droite complètement noire. Naturellement, il alla tout droit et jeta son mégot sur le béton. Après une dizaine de pas, il en entendit d'autres à quelques mètres derrière lui. Un fantôme de la nuit sans doute, comme lui. Les deux ombres à traverser les mêmes rues, Jungkook sentait un étrange stresse monter le long de son corps, au fur et à mesure de chaque semelle tapant le sol. Il avait déjà accéléré le pas, et le suiveur l'avait imité. Se mettre à courir, c'était se mettre en danger. D'autant plus qu'il ne connaissait pas les capacités de celui-ci. Il n'y avait âme qui vivait. Même pas un chat, une souris, un papillon de nuit. Aucune musique, aucun moteur, aucun rire gras ou aigu. Rien. Et les rues semblaient infinies et jumelles. Il se croyait être dans un labyrinthe. Son cœur tambourinait dans sa poitrine, si vite que ce son lui remontait à la tête. Il avait peur. Et ce n'est pas tous les jours qu'il a peur. Il y a une seule personne sur Terre qui arrive à lui faire ressentir ce sentiment. Une qu'il connaît plus que trop bien.

Il souffla de courage. Mais alors qu'il s'apprêtait à faire face à l'inconnu, un fil de pêche passa à son cou, venant serrer derrière sa nuque. Ses mains vinrent instinctivement l'agripper tant bien que mal en poussant des cris étouffés. Son corps s'était penché en arrière était maintenant à la hauteur du torse de l'agresseur. Le manque d'air se fit de plus en plus et il mit toutes ses forces dans son bras pour venir prendre son calife de sa poche de veste. Mais l'étreinte à sa gorge se resserra et le fil était maintenant entré dans celle-ci, faisant vomir du sang. Le petit couteau tombé au sol, il se sentit de plus en plus partir. Sa peau avait déjà viré au violet bleuté et sa vision devint floue. Les couleurs du luminaire n'étaient plus que des taches. Alors, c'est comme ça qu'il allait mourir ? Se faire pitoyablement égorger ? Surtout par lui. Car il savait qui se tenait derrière lui, et dans ce genre de situation, il ne pouvait faire quelque chose. Un souffle chaud effleura son oreille alors que le siens suffoquait, essayant de chercher son oxygène.

— Eh Jungkook... chuchota une voix masculine à son ouïe parmi ses gémissements. Ça me fait tellement de bien de te revoir, mon ange. Ça fait quoi de ne pas se sentir aimé ? Ça fait mal, hein ? J'espère que tu souffres comme j'ai souffert.

Son corps fut emporté sur le côté et heurta violemment un mur de pierre, le faisant cracher du sang. Ses mains toujours à sa gorge, les forces commençaient peu à peu à le perdre. Il se fit porter à plusieurs reprises contre la maçonnerie sombre, tel un vulgaire sac à dos. Celui où que tu jettes après ta longue journée de cours. Son visage collé aux pierres du bâtiment, celui de son attaquant se rapprocha à nouveau de son oreille.

— Ta vie m'appartiendra un jour ou l'autre, sois en sûr. J'emploierai tous les moyens.

Avant que son sang ne se glace, le fil se serra tellement fort que les deux bouts opposés se rejoignirent et son cou se trancha.

L'horrible craquement fit écho dans son esprit et l'adulte se réveilla en sursaut, directement assis sur le matelas. Sa respiration accélérée, il se tâta le haut du buste transpirant des litres d'eau. La lueur froide de la Lune transperçait les pauvres volets usés par le temps, venant de poser sur son visage suant. Son corps était trempé. Tellement qu'il dû aller se doucher et changer de vêtement. De nouveau sur le lit, de longues minutes durent s'écouler avant que son souffle se stabilise. Son regard se posa sur Jimin, qui dormait paisiblement sur le flanc, dos à lui. Il se recoucha, son visage dans sa nuque et ses bras autour de sa taille. Celui-ci lâcha un soufflement et bougea un peu, mais n'émergea pas. Essayant de se rendormir contre son homme, le visage cruel de son malfaiteur hanta son esprit.

Malfaiteur du nom de Jung Hoseok.