Epilogue

84 2 4
                                    

Dix ans plus tard

La silhouette se glissait dans les ombres des maisons avec d'autant plus de facilité que le crépuscule s'étendait peu à peu sur la ville. De temps en temps, un dernier rayon de soleil tombait sur lui, dévoilant son visage ou faisant étinceler ses cheveux pourpres. Il suivait son chemin d'un pas décidé, au point de laisser penser qu'il avait une mission à mener.

Il sortit du village et s'enfonça un instant dans la forêt. Il en ressortit tout aussi vite, ayant atteint son but : sans marquer la moindre hésitation, il entra dans le cimetière de Konoha et louvoya entre les tombes jusqu'au fond. Là se tenait un grand autel, dressé pour honorer les plus grands héros du village. Devant lui, un petit nombre de tombes qui appartenaient à ces ninjas qui avaient sacrifié leur vie pour les autres.

Le plus célèbre de ces ninjas étaient sans aucun doute Minato Namikaze. Mais ce n'était pas lui que l'inconnu était venu voir. Il s'arrêta tout au bout de la rangée et déposa quelque chose sur la pierre tombale. Puis il resta là un long moment, les yeux perdus dans le vague, si longtemps que le soleil laissa place à la lune, que le ciel clair s'assombrit pour laisser voir les étoiles.

Au bout d'un moment, le shinobi leva les yeux vers les astres, et un rayon argenté vint alors accrocher l'unique larme qui perlait sur sa joue.

- Tu sais, les étoiles sont magnifiques ce soir, s'étrangla-t-il. Je suis sûr que tu aurais adoré cette vue.

Il resta là encore un instant avant de tourner les talons, les épaules voûtés, légèrement abattu. Derrière lui, les rayons de l'astre d'argent tombèrent sur la pierre, révélant la lettre posée sur la tombe ainsi que le nom qui y était gravé.

Mitsuko Hatake.

Et en dessous, quatre mots, le surnom qui lui avait été donné par ses ennemis.

L'Ombre des Ombres.

***

Chère Uko-ané,

Au final, je ne t'aurai pas côtoyé très longtemps. Pourtant, cela ne t'aura pas empêché de devenir mon modèle, ma lumière au bout du couloir. Au grand dam de mes parents, tu es même mon premier souvenir. Deux améthystes étincelantes, auréolées d'argent. Pas très précis, j'en conviens, mais je n'étais qu'un bébé. Un enfant de quelques heures à peine et pourtant ton souvenir ne m'a jamais quitté.

Je n'avais pas dix ans lorsque tu es morte. Ou plutôt, lorsque tu t'es sacrifiée pour tous nous sauver. Mais même privé de ta présence, je n'ai pas cessé de croire en toi et de suivre cette voie que tu m'avais montrée. Tu étais mon maître, par delà la mort. Comment expliquer cela ? Comment expliquer qu'un lien aussi fort existe entre deux personnes qui se sont si peu connues ? Rationnellement, je n'ai pas d'explication, et je pense que je n'en aurais jamais. Cependant, arrivé à un certain âge, il m'a quand même fallu comprendre, pour continuer à avancer, continuer à vivre et à être moi-même. Alors j'ai fait des recherches, pendant des semaines je suis resté enfermé dans la bibliothèque, à feuilleter des livres poussiéreux. Et j'ai fini par trouver. Il existe des légendes anciennes, très anciennes, de celles qui datent de l'époque de l'Ermite Rikudô. Les mêmes qui évoquent les mythiques âmes-sœurs. Ces légendes parlaient d'un lien qui pouvait parfois exister entre certaines personnes. Entre un maître et son élève, par delà les siècles, par delà l'espace et surtout, par delà la mort. Rien n'aurait mieux pu décrire ce que je ressentais. Pour moi, il ne faisait aucun doute que ces légendes étaient vraies, comme l'était celle des âmes-sœurs, et toutes s'incarnaient en toi. Porteuse du fardeau des Kaguzu, tu as trouvé ton âme-sœur en Shikadaï, alors qu'est-ce qui empêchait que je sois ton « élève » ?

Une fois cela expliqué, j'ai continué à lire. Une phrase, entre toutes, m'a marqué : « Le maître est l'élève et l'élève est le maître ». Tout ce que tu m'avais offert, je pouvais te le rendre. Alors, tout a fait sens dans ma tête. J'ai mis encore plusieurs années avant de parvenir à mes fins. Rien cependant n'aurait pu m'empêcher d'y arriver. La suite, tu la connais aussi bien que moi, après tout, tu l'as vécue aussi.

Je tenais à te raconter tout cela. Je me doute néanmoins que d'autres sujets te préoccupent. Je ne te ferai pas attendre plus longtemps. Shikasû est un garçon adorable, gentil, intelligent, déjà courageux et incroyablement doué. Comme sa mère. Je ne prétend pas que ta disparition ne l'affecte pas, mais il porte sa tristesse avec honneur et dignité en vivant sa vie du mieux qu'il peut. Comme nous tous. Tu ne peux même pas imaginer à quel point je suis fier d'être son parrain.

Ta mère a eu du mal à accepter ta mort, tu la connais, elle se sentait responsable. Heureusement, elle n'était pas seule, nous l'avons tous soutenue et elle a réussi à remonter la pente. La douleur ne disparaîtra jamais, nous avons seulement décidé de vivre avec et de la combattre chaque jour. Ton père, lui, a eu plus de mal à se laisser aider, au point que Sachiko-san a dû un peu forcer les choses. Nous lui en sommes tous reconnaissants, lui le premier. Pour ce qui est d'Asaki... Personne ne peut comprendre ce qu'il a enduré, vous n'étiez pas seulement frère et sœur, vous n'étiez pas seulement des jumeaux, vous étiez les deux faces d'une même personne. Tout ce que je peux te dire, c'est que tu lui as ouvert les yeux, encore une fois, et qu'il s'est finalement décidé à se déclarer à Ôkami. Depuis, ils vivent heureux et se soutiennent l'un l'autre. Il y a encore tant de personnes dont je pourrais te donner des nouvelles. Mes parents, qui t'aimaient comme leur propre fille, Sumire-san et sa famille, Naruto-sama, sans oublier tous les shinobis de ta génération. Ne doute pas qu'ils pensent à toi et que tu occuperas une place dans leur cœur à tout jamais. Ne doute pas qu'ils suivent ton exemple et continuent tous à vivre.

Même Shikadaï. Il est certainement celui qui a le plus souffert. Comment pourrait-il vivre sans toi ? Comment pourrait-il respirer sans ta présence à ses côtés ? Ce sont ses propres mots, il m'a révélé cela il y a peu, alors que je passais quelques jours chez lui. Il ne s'est pas arrêté là, il a ajouté que s'il y parvenait, c'est parce qu'en réalité, tu étais toujours à ses côtés. Que tu l'aidais à affronter la vie et à être un bon père. Plus que tout, tu lui as offert une motivation, une raison de rester en vie. Shikasû est tout pour lui.

C'est un garçon exceptionnel, aucun doute qu'il accomplira de grandes choses.

Merci pour tout ce que tu as fait pour nous, Mitsuko Hatake. Merci pour l'espoir que tu nous as donné, pour la voie que tu nous as montré.

Jamais je ne t'oublierai. Uko-ané, tu seras toujours ma senseï, autant que je suis le tien.

L'Ombre des OmbresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant