Chapitre 3| Le Solitaire

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Arthur se réveilla en sursaut, le dernier coup de tonnerre n'était pas passé bien loin, et ce dernier avait vite fait de le tirer de l'endormissement. L'orage grondait juste au dessus de sa tête, les arbres étaient très brièvement éclairés par les éclairs toutes les soixante secondes, Arthur n'aurait pu dire s'il faisait jour ou nuit car le cumulonimbus plongeait la forêt dans une obscurité quasi-totale. Seule la pluie manquait à ce sinistre tableau, et néanmoins Arthur trouvait son absence injustifiée, voire bizarre. Mais ce n'était qu'une crainte d'un potentiel retard de celle-ci. Après tout, cela arrivait assez fréquemment en pleine saison d'été que des orages, même les plus violents, soient dénudés de la moindre petite goutte de pluie. Mais Arthur n'avait encore jamais vu d'orage aussi violent, du moins pas à proximité d'Ardengost. D'un autre côté, cet orage avait quelque chose de divin, il bouillonnait de l'intérieur, essayant de se contenir, puis soudain laissait recourt à sa rage et déchaînait toute sa fureur sur un jeune pin tiré au hasard, et qui subissait alors un funeste et injuste sort. Car voyez-vous, l'orage est l'injustice-même. Il détruit où bon lui semble, sans prendre en considération l'âge de la nature qu'il détruit. Il transforme l'arbre en braises et l'oiseau en cendre, laisse le feu se répandre partout et raille une forêt de la carte. Voilà ce qui avait de quoi à terrifier le jeune homme, tout recroquevillé sur son lit de mousse, à attendre la fin. C'est peut-être par ce côté divin et destructeur, dangereusement mauvais, qu'il se souvint de l'histoire du Tueur. La fausse histoire que leur avait raconté Jason dans Ataria, concernant une bête énorme et chaotique qui détruirait tout sur son passage. Heureusement cette abomination n'existait pas, mais Arthur ne pouvait s'empêcher de faire le parallèle avec la tempête juste au dessus de sa tête.

La foudre s'abattit avec force sur un grand hêtre à quelques mètres seulement de sa position, une telle proximité aurait dû le rendre aveugle, sauf qu'il n'avait pas regardé l'éclair quand celui-ci était venu s'abattre. Après réflexion, il décida que l'endroit était devenu beaucoup trop dangereux et quitta donc à regret sa litière de mousse improvisée pour s'aventurer dans les ténèbres de la forêt, guidé par la lumière des feux d'incendies. Pourquoi les pompiers ne venaient-ils pas ? Sans-doute parce qu'ils étaient occupés à autre chose. Quoi qu'il en soit il fallait bouger, avec espérons suffisamment de chance pour ne pas se trouver à proximité des arbres malchanceux que l'éclair foudroie.

Arthur courut donc le plus vite possible à travers bois, mais comme il ne regardait pas devant lui, l'inévitable se produisit et il se prit un arbre de plein fouet. Trébuchant et gémissant tel un chien battu, il porta ses mains à son nez pour empêcher le sang de couler davantage. Sa vue se troubla, il perdit d'abord l'équilibre, puis ensuite perdit connaissance.

Quand il revint à lui, la première chose qu'il sentit, c'est le contact doux et moelleux de la couchette sur laquelle il se tenait allongé. La deuxième chose qu'il perçut, c'est le crépitement d'un feu et la chaleur que celui-ci dégageait sur la peau du garçon. Ses yeux étaient grands ouverts et fixaient ce qui ressemblait fort au plafond d'une grotte. Une odeur de viande rôtie flottait dans l'air, si alléchante et si friande qu'elle ranima en Arthur sa faim dévorante. Sur un réflexe carnassier, il se redressa un peu pour se tourner vers le gibier en train de cuire. Un rapide examen des lieux suffit pour en déduire qu'il n'était plus parmi les arbres mais bel et bien dans une grande caverne, éclairée en son centre par le feu de camp. De la mousse et du lierre recouvraient une grande partie des parois rocailleuses. Un petit escalier de pierre conduisait tout droit à la sortie, mais bon vu le temps qu'il faisait dehors Arthur préféra rester au chaud. Et puis ce serait un peu manquer de respect à son hôte que de partir sans le remercier, du moins sans faire sa connaissance. L'équipement qui meublait la grotte était plutôt sommaire. Un seul tapis cachait le sol froid et abrupt de l'endroit, un petit coffre était posé dans un coin, sur lequel étaient posés nombre d'objets et d'instruments qu'Arthur ne connaissait pas. Plusieurs couverts, casseroles et poêles étaient disposés autour du foyer, il remarqua que les poêles étaient de grand calibre, sûrement pour accueillir de gros gibiers bien appétissants. Sinon la grotte en elle-même était assez petite, idéale pour une personne qui vit toute seule mais certainement pas pour une colocation.

ONE LEGACY T02 : Protension [En Pause]Where stories live. Discover now