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Le lendemain, Isidore ne la lâche pas. En fait, Coline ne le lâche pas non plus. Ils sont tout le temps fourrés ensemble. Angèle regarde le blond d'un air intrigué pendant la pause du midi.

— Vous êtes devenus si potes que ça ? demande sa meilleure amie en voyant le blond jouer avec les béquilles de la blonde.

Coline regarde le blond, fait la grimace, hausse un sourcil et prétend faire la moue.

— On parle de moi ? clame Isidore haut et fort.

Il a une putain d'intuition. La blonde acquiesce et il se rapproche des deux filles.

— Je disais à quel point t'étais lourd, ment Coline avec un sourire.

— Hé, mais c'est méchant !

Il boude en souriant.

— Pour la peine, je te vole tes béquilles !

On dirait un gosse. Le blond s'enfuit à l'autre bout de la cour pour rejoindre la bande de potes de Selim, laissant Coline lever les yeux au ciel.

— Vous flirtez un peu, remarque Angèle.

— Hein ?

Coline s'agace.

— Vous vous taquinez pas mal quand même...

— C'est le fan n° 1 de mon crush sur Selim. C'est pas du flirt.

Angèle hausse les épaules, mais Coline ne l'écoute déjà plus. Elle se met sur son pied valide et saute jusqu'à Isidore sous les regards intrigués des lycéens. Elle est en terminale de toute façon, le regard des premières ou des secondes ne lui fait plus peur. Juste peut-être du brun pour qui elle en pince.

— Prends garde ! lance Coline en reprenant une de ses béquilles.

Isidore dégaine l'autre et débute un combat d'escrime-béquille. La blonde sent le regard de Selim sur elle. Son ventre se retourne. Mais avant de fondre, elle doit botter le cul à l'autre trouduc'.

*

Alleeeeeeeeeez Coline !

Coline ouvre la porte. Selim. Le brun la dépasse d'une bonne tête et lui sourit. Ses cheveux sont bien coiffés. Il est dans un sweat différent. Elle le trouve beau, mais n'ose pas le dire.

— Coucou, lance-t-elle en s'avançant pour lui faire la bise.

Le sourire qu'affiche Selim lui creuse les fossettes. Elle est seule avec lui. Alerte rouge. Elle est seule avec lui. Et dire qu'il y a un mois, elle espérait pouvoir le connaître en dehors des cours. Là, ce soir, elle a l'impression de l'avoir rien que pour elle.

Sa mère ne rentrera que d'ici minuit, sortie pour le concert de son petit-ami.

Coline laisse Selim entrer, lui conseille de faire comme chez lui et lui montre les bols de popcorn qu'elle leur a préparé. En fait, elle les a faits pour déstresser, en écoutant les conseils d'Isidore.

Ce rendez-vous peut être atrocement gênant si Selim continue à la regarder de cette manière. Avec ses yeux brillants. Elle referme la porte derrière elle, respire, inspire, expire.

Alleeeeeeeeeez Coline !

— J'ai pris Your name. Fin, un film jap', tu connais ? informe Selim en s'installant sur le canapé.

Non, elle ne connaît pas et n'arrive pas à réfléchir. Parfois, elle oublie que Selim est mi-algérien, mi-japonais.

— C'est parti !

Durant le visionnage du film, Coline aurait voulu poser sa tête sur l'épaule de Selim ou piquer des popcorns dans son bol. La vérité c'est qu'elle a chialé, sur son canapé face au film. Elle a regardé l'œuvre avec tellement d'intensité qu'elle a oublié ce que ça faisait d'être en plein rendez-vous. Et ses larmes ne font que couler depuis la fin. Encore et encore. Ça fait longtemps qu'un film n'avait pas usé toutes ses larmes. De joie, de tristesse, de confusion.

— J'arrive pas à arrêter de chialer, te moque pas, prévient la blonde en se mouchant.

Selim à côté sourit. Encore. Il ne fait que sourire avec elle. Même quand elle ne ressemble à rien. Ça réchauffe drôlement son cœur.

— J'ai pris deux jours à m'en remettre, assure le brun.

Elle le regarde un instant, se demande ce qu'il lui prend d'ouvrir ses bras comme ça, d'un coup.

— Quelqu'un a besoin d'un câlin, lâche-t-il sans oublier son sourire.

Et elle fond, subitement, comme elle n'a jamais fondu auparavant. Et l'instant paraît interminable tant la bulle créée par le film lui échappe.

— Je ressemble à rien, et ma morve va te couler dessus, remarque-t-elle sans aucune classe.

Il rit.

— Je referme mes bras dans... 3... 2...

Coline accepte finalement le câlin, renifle un peu, essuie son nez et ses joues, puis soupire de satisfaction. Elle entend son cœur battre, a les images du film en tête, entend encore la jolie musique de ses sentiments. Peut-être que son ventre grouille de comètes.

Puis, elle recule un peu, sent la main du brun sur sa taille. Ça fait longtemps qu'elle ne s'était pas sentie aussi bien.

— Je peux ? lance-t-il hésitant.

Et ils se regardent, deux petites secondes avant qu'il n'approche son visage du sien. Et qu'il l'embrasse sur le front, pour la rassurer un peu.

— Hop, tu ne pleures plus ! remarque-t-il fier de son coup.

Alors Coline entend la voix d'Isidore l'encourager à le faire. Là, maintenant.

Avec son Alleeeeeeeeeez Coline ! pourri. Ça lui donne du courage.

De sa main, elle enveloppe la joue du brun, caresse sa fossette. Selim semble confus. Et sans attendre, elle se lance.

— Je peux ? bredouille-t-elle dans un souffle.

Et lèvres contre lèvres, peau contre peau, elle lui offre un premier baiser qu'elle n'a jamais cessé de rêver.

OupsWhere stories live. Discover now