8 - Tapis dans les ténèbres

49 7 16
                                    

Image par AdamPaquette : https://adampaquette.deviantart.com/


Ma poitrine me brûle. J'inspire à fond, mais la douleur n'en est que plus forte. Je me relève brutalement en crachant mes poumons, le nez plongé sous l'eau.

Je recrache tout le liquide que j'ai pu avaler avec douleur et difficulté, cherchant avidement de l'air. Bien que ma gorge et mon poitrail me brûle encore, je parviens enfin à respirer après une bonne minute de suffocation.

A quatre pattes dans ce qui ressemble à une flaque peu profonde, je tousse encore en me relevant pour m'extraire de l'eau. Ma tête tourne à cause du manque d'air, et mes yeux papillonnent longtemps avant de s'habituer à l'obscurité ambiante.

Je ne suis vraisemblablement plus dans le volcan. Il n'y a plus trace ni du monstre, ni d'aucun de mes amis. La température a rudement chuté, et je frissonne même. Autour de moi je ne vois que des arbres noirs biscornus, des monticules de terre à l'herbe sombre, et de la vase. Je m'extrais de celle où je suis embourbée, me prenant les pieds dans des racines et autres algues gluantes. Je gravis un monticule de terre nue, gagnant légèrement en hauteur. Seul le bruit du vent dans les feuillages vient perturber le silence pesant du lieu... Enfin, quand les arbres portent encore des feuilles. Le ciel est aussi noir que l'eau et la boue. L'ambiance est pesante, silencieuse, terrifiante... Je me rend compte que je suis dans un marais.

Je frissonne de froid, mes habits trempés. Je n'ai pas la moindre petite idée d'où je me trouve, géographiquement parlant. Je sens une bulle gonfler dans ma gorge, la nouant fort : je suis à deux doigts de craquer. J'ai froid. Je suis fatiguée. J'ai faim. J'ai peur. Je suis seule. Je m'inquiète pour les autres aussi, ce qui n'améliore pas mon moral : où sont-ils ? Est-ce qu'ils vont bien ? Et le bras de Pierre... Était-ce la réalité ?

Je m'accroupis, me roulant en boule autour de mes genoux, me balançant légèrement. J'ai si froid... et je suis tellement angoissée. Comment vais-je sortir de ce calvaire ? Ces Épreuves sont une véritable folie, une torture même.

Alors que mon angoisse monte et monte encore, je tâche de me calmer. Comme j'aurais aimé que Pierre soit à coté de moi, lui qui est si calme. Il saurait quoi faire.

Je me masse les tempes, retenant mes dents de claquer à cause du froid nocturne. Réfléchis ma grande, que ferait-il ?

-Chercher les autres, je murmure.

Parler me permet de relâcher un peu la pression, et j'ai l'impression d'être moins seule. Tout d'abord, il faut que je me calme pour me concentrer. J'inspire profondément, m'asseyant finalement au sol. Je sens mon jean s'imprégner de boue, mais je m'en moque totalement : il est de toute façon dans un état lamentable, alors un peu plus ou un peu moins...

Un fois plus calme, je regarde au dessus de ma tête pour connaître l'heure : le ciel est noir d'encre, et la cime des arbres reflètent l'éclat de la Lune.

-Au moins je ne suis pas dans le noir complet... Je me console.

Deuxième étape, le lieu. Je jette un regard circulaire sur ce qui m'entoure.

-Je suis au milieu d'un marais glauque avec ses bonnes odeurs et ses bruits chelous... Génial.

Il n'y a pas âme qui vive, ici. Je n'entend pas le moindre bruissement, ou même chant d'oiseau. Tout semble réellement mort à des kilomètres à la ronde.

Troisième étape, Marie et les garçons. Je me décide enfin à bouger, me relevant pour contourner le tronc noir dans mon dos. Je me trouve sur une butte entourée d'eau peu profonde, remarquant de grands bâtons plantés à intervalle régulier dans la vase, formant un chemin typiquement humain dans cette végétation sauvage. Les pics suivent l'eau sans jamais toucher la terre, s'enfonçant au travers des arbres noirs. J'avale ma salive. Est-ce que j'ai envie de suivre cette piste ? Clairement, non. Mais je n'ai pas le choix.

Les ElémentauxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant