Chapitre 5

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Je marchais dans cette forêt depuis presque une heure. La cape que je portais n'était pas pratique car le bas se prenait dans les branchages. J'avais voulu l'enlever mais Ava avait refusé en me disant que c'était trop risqué de montrer mon visage, alors même qu'on ne croisait personne dans cette forêt. C'était la seule fois où elle m'avait adressé la parole depuis le début de notre expédition et à présent elle avait pris la tête du petit groupe, sa capuche sur la tête et son sac sur le dos. Nous avions tous un sac qu'Ava avait préparé et qui contenait des affaires de rechange ainsi que des vivres. Je me demandais bien quand est-ce qu'elle avait eu l'occasion de les préparer mais je me rappelais que l'organisation avait toujours été son point fort. Avec elle tout devait être rangé et organisé au centimètre. Elle refusait de laisser place à l'improvisation. Je me souvenais comment elle avait crié sur les cuisiniers pour que notre gâteau de mariage corresponde bien à ses exigences... Mariage... cette pensée entraina une boule dans le ventre et je poussa un soupire de rage. Jason, qui marchait à mes côtés, cru que ce soupire était dû à de l'agacement et me demanda alors.

-Laisse moi porter ton sac Ethan.

Il n'avait cessé de me le demander et ma réponse était inchangée. Même si cette situation ne m'enchantait guère, j'étais tout de même capable de marcher avec un sac à dos. Regardant le visage tuméfié de mon ami je lui demandai.

-Que s'est-il passé quand ils t'ont emmené ?

-Ils ont essayé de m'interroger mais comme ils n'obtenaient aucune réponse de ma part j'ai eu droit à ça.

Il disait ça d'un ton banal mais je savais qu'il avait dû avoir mal.

-Mais ne t'inquiètes pas je suis coriace.

Je lui ai lancé un petit sourire. Effectivement Jason était coriace, il l'a toujours été. Avant qu'il ne se lance dans sa formation de garde royal et qu'il ne soit mon garde officiel, lui et moi étions déjà amis. Même si j'avais droit à des formateurs particuliers pour m'enseigner l'histoire, la politique, les uses et coutumes, à certains de ces cours quelques autres jeunes issus d'un rang élevé, suivaient également les cours avec moi. C'était à l'un d'eux que j'avais rencontré Jason alors que nous n'étions que des adolescents . Lorsqu'il avait commencé sa formation j'avais éprouvé une pointe de jalousie à son égard. Alors qu'il s'entrainait à devenir un soldat, je m'entrainais à devenir un futur roi. Mes armes étaient la diplomatie, la politique, les traités et les stratégies. Celles de Jason étaient ses mains, des épées, des boucliers. Je n'avais eu droit qu'à suivre le cours sur le maniement de l'épée, mais c'était plus par tradition que pour faire de moi un bon soldat. Mais j'avais fini par m'habituer à mon statut et même à l'accepter. Je voulais devenir Roi non pour le pouvoir car il ne m'a jamais intéressé, mais pour aider le peuple et nous construire un avenir plus serein et surtout un avenir en paix.

-Tu sais pour l'endroit dont parlais Ava, tu ne penses pas qu'elle faisait référence aux autres peuples ?

Suite à la question de Jason, j'hésita avant de répondre.

-Mais il n'y a aucun autre peuple à part eux. Insista Jason

Le territoire dans lequel je vivais était divisé en quatre peuples chacun gouverné par un Roi : mon peuple, le peuple Luna, le peuple Andhara et le celui de Kanous. Chaque peuple vivait selon sa propre organisation, ses propres lois, son propre système de fonctionnement mais nous vivions tous en harmonie. Aucun ne prétendait avoir le pouvoir sur l'autre et aucune guerre n'avait éclatée entre nous, principalement grâce à des accords et traités de paix signés entre les Rois.

Après des heures de marche, Ava avait finalement accepté qu'on fasse une pause. Dan cette immense forêt nous avions finalement trouvé un petit espace plat, entouré d'arbre. A la vue d'un petit rocher positionné sous un arbre, j'avais fait signe à Jason de s'y installer pour essayer tant bien que mal de soigner ses blessures au visage. Ma mère m'avait appris très tôt à soigner mais jamais je n'avais eu son don à elle. Ce que je faisais n'avait rien de magique. Je savais comment soigner une plaie, recoudre ou encore arrêter une hémorragie. Mais ce n'était rien comparé à ma mère. Elle avait le don de guérisseuse, ce qui était très rare de nos jours. Elle pouvait, par la seule force de sa pensée, soigner n'importe quelle blessure. Son don avait bien évidemment des conséquences. Chaque fois qu'elle soigner une personne, ses forces diminuaient, et plus la blessure était importante, plus son don était utilisé, et plus elle s'affaiblissait. Mon père avait fini par refuser qu'on fasse appel à ses services pour guérir, ayant bien trop peur de la perdre. Mais ma mère n'en avait toujours fait qu'à sa tête. Il y a cinq ans les sauvages avaient mené une attaque contre un petit groupe de marchand de pierre qui avait emprunté la route principale pour se rendre dans notre cité. Ce n'étaient qu'une famille de marchand avec leurs jumeaux de seulement trois ans. Des bébés. Les sauvages avaient pillé leurs pierres et étaient repartis les laissant agonisant. Ma mère n'était pas très loin lors de l'attaque. Alors que ses gardes l'avaient supplié de rentrer au château elle s'était précipité vers eux pour les guérir. Mais leurs blessures étaient graves, trop grave pour qu'elle puisse tous les sauver. Je pouvais la revoir, agenouillait avec les bébés dans ses bras, à leur chuchoter tout en les berçant. Je revoyais encore la lumière bleue qui avait jaillit tout autour d'elle pour s'enrouler tout doucement autour des bébés. Je la revoyais qui commençait à avoir des spasmes mais elle continuait à produire cette lumière. Je me rappelais comment elle s'était tournée vers moi, m'avait souri « Ethan mon cœur... n'oublie pas à quel point je t'aime. N'oublie pas à quel point mon amour pour ton est infini » Puis je l'avais vu s'éteindre, le sourire aux lèvres. Elle avait réussi à sauver les jumeaux alors même qu'ils étaient presque morts. Je me rappelais que j'avais été en colère contre eux, énervait de les savoir vivant alors que ma mère était morte. Puis j'avais été énervé contre ma mère, furieux qu'elle m'ait abandonné. Puis j'avais réalisé que rien de cela ne se serai produit sans l'attaque des sauvages. Ma mère s'était montrée généreuse et courageuse, et je ne pouvais qu'être fière d'elle. Mais son don avait été son fardeau. Elle m'avait dit que je possédais aussi ce pouvoir, mais c'était faux. Malgré toutes mes séances avec elle, je n'avais jamais réussi quoique ce soit, et après sa mort j'avais arrêté d'essayer. Je n'avais aucun don et, même si c'était égoïste, j'étais heureux de ne pas en avoir.

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