- L'attente et la confiance qu'on met dans notre famille transforment les mots ou les actions en véritable trahison, lui dis-je finalement.

- Tu crois ?

- Oh oui ! Parce que la famille est la seule qui est... Normalement, c'est la famille qui nous accepte tel qu'on est. Notre vie est construite autour d'elle alors si notre pilier nous critique, on perd nos repères...

- Tu y as beaucoup réfléchi, on dirait ! me fait remarquer Edouard.

- Ca fait presque dix-huit ans que je supporte les imitations à chaque repas de famille alors il me fallait une explication pour supporter tout ça.

Je souris en reprenant ma position initiale.

- Et puis, je te rappelle que je suis gay, ajouté-je tout bas.

Ma famille paternelle n'est pas au courant de cette information me concernant. Non pas que mes parents veuillent leur cacher, c'est moi qui ai décidé de ne pas faire mon coming out devant eux. Ils sont très... Traditionnels disons. Ce qui est loin d'être le cas de ma famille maternelle.

- Ce genre de vérité amène beaucoup de disputes, d'incompréhensions, d'abandons et surtout de morts.

Avant que mes parents l'apprennent, j'ai longtemps hésité et je pense que s'il n'y avait pas eu ma rupture avec Gabin, ils ne le sauraient toujours pas aujourd'hui.

- Alors il faut se mentir en famille ?

Je fronce les sourcils à l'écoute de la question de Sophie.

- Je n'ai pas dit ça.

- Si, un peu...

- Non, je dis juste qu'il y a des vérités qui peuvent briser des familles entières, des fraternités pourtant solides... Certaines choses qu'il vaut mieux garder pour nous si on est pas prêts à y faire face...

Comme le fait que je craque sur le même garçon que toi...

Dans l'autre pièce, le bruit d'une bouteille de Champagne qu'on ouvre, retentit suivi par des rires.

- Ecoute-les ! lui ordonné-je gentiment. Ils n'ont rien dit et maintenant, tout le monde continue sa vie et est heureux.

- Ils lui ont menti, ils ne sont pas heureux. Ils ont souffert pour faire plaisir à tata.

- Mais c'est ça la famille ! Préférer souffrir que faire souffrir les personnes qu'on aime le plus.

- Je suis pas d'accord, s'écrie-t-elle.

Je suis surpris par le ton qu'elle a utilisé. Elle est comme déterminée et ce n'est pas un des traits de personnalité de Sophie. Je la sens se tourner vers moi alors je la regarde. Elle plonge son regard dans le mien et m'avoue :

- Je ne veux pas que les gens souffrent pour soi-disant me rendre heureuse. Je veux savoir les choses et si on est une famille qui s'aime, on se remettra de cette trahison dont tu parles.

Je reste sans voix parce que j'ai comme l'impression qu'elle veut me faire passer un message et je n'aime pas ce message. Je déglutis.

- Parfois, ça peut...

- Non. Dans une famille, on se dit la vérité et on se pardonne. Le reste n'a aucune importance ! affirme-t-elle, sûre d'elle, avant de se relever et de s'éloigner.

Je la suis du regard le plus longtemps possible, estomaqué par ses paroles.

- Je sais pas ce que tu lui caches mais il est clair qu'elle est au courant, elle !

Walls Could TalkWhere stories live. Discover now