Chapitre 29

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< 24 Décembre 2017 >
Theodore

Je suis tranquillement allongé. Enfin tranquillement n'est peut-être pas le mot adéquat parce que j'ai l'impression d'être opprimé. Tout ce qui se trouve autour de moi m'oppresse. L'odeur du sapin. Le bruit des bûches qui craquent dans la cheminée. Le parquet lisse et froid sous mes mains. Les lumières éblouissantes au-dessus de moi. Le goût du champagne dans la bouche.

Je cligne à plusieurs reprises des yeux et les ferme finalement. Une multitude de points blancs apparaissent alors à la place des guirlandes. Je crois que j'ai envie de vomir. Je pose les mains sur mon ventre et maudis mon oncle de m'avoir servi en glace au chocolat que j'ai dû engloutir alors que je déteste ça.

- Je peux savoir ce que tu fais là ? me demande la voix de mon petit frère, Edouard.

Je peux comprendre que ma position l'étonne quelque peu. Je suis étendu par terre, la tête sous le sapin de Noël depuis qu'on a fini le dîner du Réveillon de Noël avec ma famille paternelle.

- Ce n'est pas désagréable, dis-je simplement.

Je n'entends plus un son en dehors du feu dans l'antre puis soudain, le bras de mon frère frôle le mien quand il s'installe à côté de moi, sous le sapin. On reste silencieux un long moment et bizarrement, je me sens un peu mieux. Comme si sa simple présence avait pu éloigner tout ce qui m'incommodait, il n'y a pas cinq minutes. Je me mordille la lèvre et commence à jouer avec une boule de décoration.

- Tu as vu ça dans un téléfilm de Noël que tu as regardé avec maman hier ? m'interroge-t-il, amusé.

- Peut-être...

- C'est sûr.

- Peut-être...

Il rit légèrement. Mon frère n'a que onze ans mais parfois, il me donne l'impression d'être plus âgé que moi. En tout cas, il est plus intelligent que moi, c'est une certitude. Cependant quand il rit, c'est toujours un enfant pour moi et c'est agréable.

- Ça lui fait plaisir, me défends-je.

- Ne mens pas, tu aimes ces téléfilms autant qu'elle.

Bon, ok, il a raison.

- Pas tous !

Le silence revient entre nous mais cette fois, les rires de la famille nous parviennent.

- Tata fait ses imitations ?

- Je suis parti après Céline Dion.

- Tu es parti au bon moment, plaisanté-je avec malheureusement une pointe de vérité, en tapotant son avant-bras avec ma main.

- Je confirme, résonne la voix de Sophie quand elle s'installe de mon autre côté. On en est à Brigitte Bardot.

- Pourquoi personne ne lui dit qu'elle est mauvaise ? nous questionne Edouard.

- Parce que parfois, en famille, il y a certaines vérités qui ne sont pas bonnes à dire, expliqué-je.

- Ah bon ? s'exclame Sophie, étonnée.

Je tourne la tête vers elle. Elle a passé son bras sous sa nuque et fixe le sapin au-dessus de nous. Elle ne me laisse pas le temps de lui exposer mon point de vue et poursuit :

- Je pensais que s'il y avait bien des gens à qui on pouvait dire la vérité, c'était aux membres de notre famille, non ?

Je ricane légèrement parce que c'est ce qu'on aimerait penser. Moi aussi, j'ai pensé ça mais entendre certaines choses de la bouche des personnes qui sont censées vous connaître le mieux, peut être brusque, déstabilisant mais surtout blessant. Encore plus blessant que si elles venaient d'inconnus.

Walls Could TalkWhere stories live. Discover now