Chapitre 7

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La vérité d'un homme est d'abord ce qu'il cache.

                                                                                          -Andre Malraux

-Vous avez le sens de l'observation, voilà tout.

Il sourit à ma réponse, but une gorgée de son wisky puis me dit:

-C'est plus que ça, je commence à vous connaitre.

Dans ce cas, je devrais commencer à m'inquiéter.

-Et je sais que vous détestez ça.
-Vous savez beaucoup de choses à ce que je vois.

Je bus plusieurs gorgées de ma boisson, me cachant derrière le verre.

-Vous m'avez sous-estimé.
-Je ne vous ai jamais estimé.

Il me regarda, haussant un sourcil.

-Excusez-moi.

C'était partit tout seul.

-Au moins vous dites ce que vous pensez.

Je ne le pensais pas, c'était mon "repousse humain" qui parlait. Il avait l'air de m'apprécier. Son regard mielleux ne me disait rien qui vaille, mais cette lueur sexuelle dans ses prunelles réussit à me laisser imaginer toute sorte de... choses.

-Pourquoi ne parlez-vous jamais de vous ?
-Et vous? Demandais-je.
-Vous voyez, vous faites toujours balancer le sujet sur quelqu'un d'autre.
-Parler de moi me dérange.

Et voilà que je lui répondais sincèrement.

-Pourquoi ?
-Et vous ?
-Je ne suis pas intéressant.
-J'en doute fort.
-C'est mignon, fit-il, que voulez-vous savoir ?

J'ai toujours su qu'il était plus humain que moi, sinon, il aurait fuit comme je l'avais fait.

-Tout.
-Pourquoi ? Me demanda-t-il. Pour pouvoir me contrôler ?

Je me penchais sur le contoir, posant mon coude dessus puis mon menton dans ma paume. Il me regardait, souriant toujours. Son regard brûlait toutes les parcelles de ma peau. Je hochais la tête à sa question, le faisant se lécher les lèvres et regarder les miennes.

-Si c'est ce que vous voulez, vous n'y arriverez pas.
-Si vous le dites.

Il but une nouvelle gorgée, toujours sous mon regard indifférent.

-Alors ?
-La seule chose que vous avez besoin de savoir est que je suis célibataire.

Je haussais un sourcil à nouveau, lâchant un rire.

-Ça ne m'avance à rien.
-Je suis sûr que si, répondit-il, vous aurez aussi besoin de savoir que si je veux quelque chose, je l'ai.

Le vilain sous-entendu...

-Encore un point commun entre vous et moi.

Il fallait qu'il arrête de me regarder avec ce regard. Il avait tendance à oublier que j'étais sous contrat avec lui. Ça me genait. Il s'arrêta de parler et se contenta de regarder les gens défiler derrière nous. À l'étage, je reconnaissais Break the Rules, de Charli XCX, faire trembler le plafond. Coïncidence, j'étais entrain d'enfreindre toutes mes règles.

-Vous savez, la première fois où je vous ai vu, j'ai pensé que vous étiez une salope haut perchée.

Je ris à sa phrase, ce qui le fit sourire. J'aimais bien le voir sourire.

-Puis je me suis rendu compte que c'était tout sauf le cas, souffla-t-il. Même si vous êtes une personne hautaine et vite détestable, j'ai vu le bon en vous.

Pourquoi me racontait-il tout ça ?

-Enfin, j'ai vu ce que vous ne vouliez pas montrer. On se ressemble trop pour ne pas lire en l'autre.

C'est bien ce dont j'avais peur. Il me comprend, et c'était l'une des seules personnes. Malheureusement, je ne voulais de l'amitié de qui conque, et encore moins de l'attention, de la compréhension ou des mots doux.

-Mais vous l'avez déjà compris.

Il était malin, il jouait en sous-marin. Depuis que je le connaissais, il n'avait jamais rien dit de tel, ou encore parlé de moi comme ça. Je commençais à paniquer, le souffle court. Il changea de discussion, comme si mon appel au secours l'avait alarmé.

-Vous restez pourtant un mystère à mes yeux.
-Je suis un mystère qui ne vaut mieux pas résoudre, monsieur.

Il sourit à ma réponse, toujours ses yeux plantés dans les miens. Il allait parler mais quelqu'un le fit à sa place, m'attrapant doucement par l'épaule. Ce toucher me fit frémir.

-Salut, ça te dirait de danser ?

Je haussais un sourcil, regardant la personne qui venait de me demander ça. C'était un grand type, brun, yeux verts/gris, sourire ravageur et bras de dingues. Il était doté d'une musculature carrée aussi sexy qu'apeurante, ce qui me fit penser à mon boss, qui regardait bizarrement ce parfait inconnu.

-Pourquoi pas ?

Ma réponse franche et pensée eut l'air de les surprendre tous les deux. J'eus à peine le temps d'entendre mon patron lâcher un juron que je me faisais emporter, la main dans celle du sexy boy, me tirant vers l'étage où se trouvait au moins cents personnes sur la même piste. La musique avait changé, c'était maintenant une chanson où l'on dansait du collé-serré: Sexy Back, par Justin Timberlake.

Quand je vis l'ambiance et l'atmosphère sexuelle planer, je regrettais soudainement d'avoir accepté. Je me retrouvais rapidement au milieu de la piste, les mains de cet inconnu autour des hanches, son torse collé contre mon dos, son souffle chaud dans ma nuque. C'était sexuel pour lui, mais pour moi, c'était quelque chose qui ressemblait de près à l'enfer. Mon patron avait raison, je détestais être touchée, et pourtant, je me retrouvais là, à danser, mon cul collé contre la partie d'un gars. Pourquoi avais-je accepté déjà ? À oui, pour énerver mon boss.

Les lumières bleues et blanches m'aveuglaient alors que la musique faisait trembler toutes les parties de mon corps. Je fis abstraction de tous mes haut le coeur dû aux touchés pervers de ce type et me concentrais sur la musique. Je pris alors sur moi et dansais, en rythme avec lui. Quand j'ouvris les yeux, je le vis, le big boss, dans un coin. Il était adossé contre un mur, ne laissant apparaître que sa carrure. Je ne voyais rien de lui, mais je sentais son regard colérique qui me pesait. Apparemment, mon jeu de gamine de collège avait marché. Super. Et maintenant, je fais quoi ?

Je continuais de danser, bloquée à travers une masse de gens. Je fixais la lumière blanche du plafond, oubliant tout le reste. Mes hanches bougeaient au rythme de cet homme, me laissant sentir son érection contre mes fesses. J'eus des frissons, pas de plaisir, mais de dégoût. Quelques secondes et trois battements plus tard, je me fis arracher des mains du gars, le faisant pousser un cris de colère.

-Mec, j'étais occupé avec elle ! Cria-t-il au dessus de la musique.

Je me tournais vers mon sauveur et trouvais un torse dur et tonique. Ça ne pouvait être que lui. L'inconnu s'en alla, me laissant seule avec mon boss, au milieu de la piste. Bizarrement, maintenant, j'allais mieux. Sa mâchoire serrée, ses mains pressants virilement mes hanches, ses yeux noirs brûlant mon âme. Il était beau, il était grand, il était musclé, il était le meilleur, et il était avec moi.

Perdu entre le tas de personnes dansant, je le sentis commencer à bouger. Le voir danser me fit rire puis perdre toutes convictions pour le méchant qu'il était. Mais quand il se colla à moi de la même façon que l'était le type d'avant, je m'étranglais. J'eus du mal à respirer, mais je me repris. Ses abdos collés contre mon dos prirent possessions de mes pensées.

Je sentis ses lèvres chaudes effleurer la peau nue de mon cou, puis ses mains fortes se glisser sous le pan de mon top, agrippant ma peau suante. J'avais chaud, et tout ça à cause de sa partie contre mes fesses. C'était mieux avec lui, ça le sera sûrement toujours.

Je commençais à bouger mes hanches avec les siennes, dans un rythme parfait. Ses doigts serraient ma peau de plus en plus fort et je me pris à aimer ça. Je laissais l'arrière de ma tête tomber sur son épaule, le sentant encore plus proche de moi. Il força mes hanches à se coller fortement avec les siennes, ce qui me surpris. Mais le fait qu'il en veuille plus me fit gémir assez fort pour qu'il l'entende, le faisant sourire contre ma peau.

Quelques minutes plus tard, la musique avait changé et nous nous sommes arrêtés. Il c'était écoulé cinq minutes de collé-serré au milieu d'un tas de gens. C'était chaud, sexy, envieux, désireux. Tous ces sentiments faisaient de ce moment une explosion de joie. Je le regardais alors, tournée vers lui, mes mains sur ses biceps et les siennes autour de mes hanches. La chanson avait changé depuis de longues minutes, mais nous ne nous étions pas séparés pour autant.

Je sentais son souffle chaud et décadancé s'écraser contre mon front, je sentais les battements affolés de son cœur contre mes doigts, je sentais la musique me faire vibrer, mes pupilles dilatées, mes oreilles en feu. J'étais ouverte spirituellement, comme après un orgasme. Tout allait bien, j'oubliais à peu près tout. Son regard était perdu dans le mien, et je me sentis honteuse d'aimer ça. J'eus du mal à reprendre mes esprits, mais je le fis, et en un geste, je me décollais de lui. Je n'en avais pas envie, si j'avais pu, je serais restée dans ses bras pour toujours.

Le son se faisant oppressant, je fis mon chemin solitaire vers la sortie, évitant toutes les personnes saoules, trop heureuses ou en colères. Je fus dehors rapidement et pris un grand bol d'air. Une main sur le cœur, je sentis ces battements perturbés. C'était étrange de le sentir bondir si vite et tout ça à cause d'une personne. Je n'avais pas sentis ça depuis longtemps, tellement longtemps que je ne me souvenais plus que ça faisait du bien. Du bien de se sentir humaine, normale, en vie. On avait juste danser, et voilà que je me trouvais une nouvelle définition. Comme s'il allait changer ma vie...

-Lara ! Cria quelqu'un.

Je fuyais vers ma voiture, ne voulant pas le voir débarquer et encore moins lui parler après ça.

-Lara, attendez !

Pourquoi voulait-il que j'attende ? Il m'attrapa par le bras et me tourna vers lui. Il était rouge, ce qui me fit rire intérieurement. Je me laissais aborder par mon patron, aucune expression au visage.

-Vous partez ?
-J'en ai bien l'air, fis-je, on se voit demain.

Il serra les dents. Je continuais mon chemin et ouvrais la porte de ma RR, j'allais monter quand il me dit:

-C'est ma mère, cria-t-il, c'est ma mère qui ne va pas bien.

Je ris, un goût d'amertume dans la bouche.

-Vous pensez me faire rester avec de la pitié ?

Demandais-je. Il avait raison, j'avais pitié et envie de rester. Mais je montais tout de même en voiture, le laissant comme un con au milieu de la route, seulement éclairé par un lampadaire. Je démarrais et roulais aussitôt.

J'ai merdé.

              Ellipse

Je l'avais évité toute le journée, passant par me cacher sous mon bureau, courir dans les couloirs, me faire couvrir... J'avais tout fait, et au final, je ne l'avais vu qu'en coup de vent. Tant mieux, au moins, on ne reparlera pas de l'autre soir. J'avais honte de moi même. D'habitude, j'affrontais toujours tout, la tête haute et droite comme un pique, mais cette fois, c'était différent. Je m'étais laissée aller, j'avais mis mon code à l'écart pendant quelques heures, ce que je n'avais jamais fait à présent.

Marchant dans les couloirs, je l'entendis arriver de loin. Je fis un pas chassé sur le côté et me cachais dans un coin du couloir. Je m'insultais mentalement, trouvant stupide le fait que je fuis une conversation. Mais il était mon boss, celui avec qui j'avais dansé un collé-serré. C'était plus gênant qu'autre chose. Quelques minutes plus tard, n'ayant entendu aucun bruit, je repris mon chemin. Je ne pus faire qu'un pas que je tombais nez à nez avec lui. Mon cœur fit un bond, mais je restais de marbre.

Il portait toujours l'un de ces éternels costards entièrement noir, le rendant sexy à souhait. Ses yeux caramels me fixaient, me prenant au dépourvus. J'avais envie de fuir loin, voir de sauter de cet étage, mais aucune sortie possible: il barricadait la sortie de sa largeur. Je m'adossais alors contre le mur, prenant un air décontracté qui l'énerva.

-Comptez-vous m'éviter longtemps ?
-Aussi longtemps que possible.

Il s'attendait à ce que je réponde le contraire, mais à l'entente de ma phrase, il sourit. Il commençait à me cerner, ce qui me donnait envie de lui tirer une balle. Il chuchotait et était si proche de moi que mes collègues ne purent s'empêcher de nous épier.

-Parce que nous avons dansé, vous ne voulez plus me voir ?

Exacte !

-Je me fiche de ça, monsieur.
-Bien sûr que non, rit-il, ça vous gène, alors vous fuyez.
-Je ne fuis pas, j'évite cette conversation.
-Vous ne voulez pas en parler ?
-Pas le moins du monde.
-Et bien vous le ferrez quand même, parce que je suis votre patron et que je vous l'ordonne.

Ses yeux étaient rouge vifs, comme s'il avait pleuré ou trop bu.

-Je m'excuse pour ce que j'ai pu dire sur votre mère.
-Vous aviez raison, je pensais vous faire rester avec ça, répondit-il. Encore une fois, gardez ça pour vous.

Il sortit après moi, emboîtant mes pas. En passant à ses côtés, l'odeur d'alcool me parvint. C'était maintenant clair: il se saoulait pour oublier l'état de sa mère. Je secouais la tête, marchant dans les couloirs à ses côtés. Je ne devais pas y penser, n'y même m'en soucier. Rester à l'écart et ne rien savoir me sauverait de beaucoup de choses. Je devais continuer comme ça. Mais pourtant, le fait qu'il aille mal me perturbait quelque peu. Une fois que nous fîmes dans son bureau, je lui posais la question.

-Qu'a-t-elle ?
-Cancer, phase terminale.

Je déglutis, détestant ces quelques mots.

-Je suis désolée.

J'en savais trop pour ne pas l'être. Il se laissa tomber dans son fauteuil, attrapa l'arrête de son nez entre ses doigts et ferma les yeux. Je le trouvais dur, en colère, triste. Il attrapa un verre et le remplit de whisky. Il le but entièrement d'un coup, faisant basculer sa tête en arrière.

-Pourquoi vous restez là ? Allez faire votre travail.

Un verre et voilà qu'il changeait du tout au tout. Je haussais un sourcil avant de m'exécuter, mais il m'arrêta.

-Dégagez. Rentrez chez-vous.
-Ma journée n'est pas finie.
-Est-ce que j'ai l'air d'en avoir quelque chose à foutre ?!

Il tapa du poing contre le meuble alors que son regard tourna au noir démoniaque.

-Arrêtez de me contre-dire et foutez le camp d'ici !

Il criait tellement fort qu'il fit vibrer ma cage thoracique. J'avais envie de lui en coller une pour hausser le ton avec moi. Je détestais l'autorité et encore plus quand elle vient d'un homme. Je rebroussais chemin et m'en allais, claquant la porte derrière moi. Les dents et les poings serrés, je me retrouvais devant la moitié du personnel de cet étage. Marie me regardait de ses yeux verts compatissant, les autres étaient choqués, et Harrington, cet enculé, souriait triomphalement.

-Que ce passe-t-il ? Demanda Marie. Nous l'entendons crier depuis l'étage inférieur.
-Il... a prit conscience de quelque chose.

Je m'humidifiais les lèvres avant de passer entre eux, faisant mon chemin vers l'ascenseur. Une fois à l'intérieur, Harrington se glissa entre les deux portes. Quand son sourire narquois me parvint, j'eus envie de lui crever les yeux avec mes talons hauts.

-Alors, vous êtes virée ?
-Non, je suis même augmentée, fis-je.

Ce qui était vrai: le patron avait rajouté un zéro sur ma fiche de paye sans raisons apparentes. Il se décomposa mais se reprit.

-Il a bu, c'est ça ?
-Vous devriez le savoir, vous le connaissez depuis longtemps.
-Ah oui ? Demanda-t-il, se sentant supérieur à moi.
-Vous vous connaissez depuis que vous êtes ados, Desmond, vous étiez au lycée ensemble, vous avez fait la même école de commerce et les mêmes voyages. Vous êtes de grands amis.

Il me regardait comme si je venais d'une autre planète. Il fronça les sourcils plusieurs fois et me fixa pendant plusieurs minutes. C'était drôle d'être plus intelligente que les autres.

-Vous êtes quoi ? Une agent secrèt ? Vous bossez pour qui ? La mafia ? La CIA ?

Je me pris à rire faussement, le trouvant plus bête que les autres. Quand je me fis plaquer contre le mur, un bras sous la gorge, je déchantais rapidement. Je fus prise par surprise, mais ne fus pas désemparée pour autant.

-Que sais-tu salope, qu'est-ce que tu sais ?!

Il prenait beaucoup trop la confiance, celui là.

-Je sais tout, répondis-je d'une voix sombre.

Il me décolla pour me recoller plus fort encore, faisant craquer ma nuque. Je vis rouge.

-T'es qui ?!

J'en eus marre, alors je lançais mon poing au milieu de son visage. Il me lâcha directement et tomba au sol. Je lui avais brisé le nez d'un coup bien placé, le faisant hurler de douleur. Il me regarda, la main sur son visage en sang. Je me plaçais devant lui, le surplombant de ma hauteur, le regardant comme le moins que rien qu'il était.

-Tout ce que tu détestes.

Confident Où les histoires vivent. Découvrez maintenant