Chapitre treize.

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Les jours s'enchaînaient, se ressemblant tous plus ou moins. Le même sentiment de vide, la même humeur maussade, la même envie de crever.

Tic tac tic tac.. le bruit de l'horloge murale était comme incrusté dans ma tête tant j'avais passé de temps devant cette dernière dans le silence le plus complet.

Sacha, ma mère, Sophie, tous se succédaient, souhaitant laisser not.. ma maison vide le moins possible. Tous cherchant à y mettre un peu de vie, un peu de gaieté alors même que j'en était dépourvue.

Ah j'ai essayé de m'en sortir, quand je l'ai rencontré je croyais même être en train d'y parvenir mais la réalité m'a frappée de plein fouet: il n'est pas toi et il ne le sera jamais.

Mes sentiments ne seront jamais si intenses que lorsque tu étais près de moi, oubliés ses sourires niais sans raison particulière, essuyées ses mains moites lorsque tu me murmurais des mots doux, estompé le rouge des mes joues à l'entente de ces compliments dont toi seul avait le secret, envolés ses putains de papillons à la con qui monopolisaient le bas de mon ventre à ta vue. Tu me donnais l'impression de vivre, pour la première fois, je me sentais épanouie, légère comme si rien ne pouvait m'arriver. C'était même plus un sentiment de sécurité que je ressentais, c'était bien plus fort que ça, comme si j'étais invincible face aux dangers du monde, comme si j'aurais pu dire merde à tout mes problèmes sans conséquences.

Tic tac tic tac.. le temps passe si vite et si lentement à la fois. Mais comment voudrais-tu qu'il est de l'intérêt sans toi?

Le temps passe et efface avec lui tes traits me faisant culpabiliser chaque instant d'avantage. Quelle était la forme de tes yeux déjà? Ils étaient en amandes.. non.. plus arrondis.. ou bien.. je n'en sais plus rien il faudrait que je vérifie. Mais comment? Aucune photo de toi dans cette foutue maison, elles se sont toutes cachées, volatilisées pour éviter de me blesser.            Pourtant j'ai besoin de toi, besoin de te voir, je veux pas t'oublier moi, je veux me souvenir de quel côté de ton nez était ton grain de beauté. Mais les autres ne me laissent pas le choix, ils veulent que j'aille mieux, ils sont loin de se douter que ce ne sera jamais le cas.

...

La porte s'ouvrit et quelqu'un pénétra dans ma chambre, trop occupée à fouiller les moindres recoins de cette pièce je ne prit pas la peine de regarder de qui il s'agissait.

-Qu'est ce qu'il se passe ici?

-Désolée pour le bordel, je cherche quelque chose!

-Qu'est ce qui t'arrive? Pourquoi as-tu l'air si... paniquée?

-Parce que je n'arrive pas à remettre la main dessus!

-Sur quoi?

-Sur la boite!

-Quelle boîte?

-Celle dans laquelle j'avais rangées toutes les photos, ça faisait trop mal de les voir alors je les aient rangées mais je les retrouvent plus!

-Et pourquoi tu en as besoin?

-Parce que j'oublie peu à peu son visage... C'est atroce! Comment je peux faire ça?

Je saisit le sommet de mon crâne et tira avec force sur mes cheveux en hurlant de rage, laissant sortir toute ma frustration du moment. Puis je repris plus calmement:

-Ses traits ne sont plus aussi précis qu'avant dans mon esprit! J'ai pas le droit de l'oublier! Je lui ai promis .. Dis-je avant d'éclater en sanglot

-Ehe! Calmes toi! Shhh ça va aller! Dit-elle avant de me prendre dans ses bras

Je la repoussa d'un geste brusque

-Ça va aller? Comment oses-tu dire ça? Tu ne remarques pas qu'au contraire rien ne va? J'ai plus de boulot, j'ai plus de mari, j'ai plus rien et en plus de ça je commence à l'oublier...

-Tu l'as lui, dit-elle en pointant mon ventre

-Je crois devenir dingue je te jure... Parfois quand je rêve de lui ça paraît si réel que le lendemain je tâte le lit avec ma main afin de vérifier qu'il soit bien là, et à chaque fois c'est la même déception. Je l'aime tellement c'est dingue, ça m'en fait mal. J'arrive pas à faire mon deuil, chaque fois que je me rappelle qu'il est mort j'ai l'impression de mourir aussi.. J'aimerais seulement le revoir, juste un instant, pour lui dire au revoir convenablement .. Je sais pas.. Je suis peut être conne mais j'ai l'impression que ça m'aiderait.. Je veux seulement qu'il sache que je ne le déteste pas, que je sais qu'il a fait ça pour moi, par amour..

-Il le sait

-J'en suis pas si sur.. Il n'avait pas confiance en lui, je devais souvent le rassurer...

-Tu sais June, s'il y a bien une personne qui comprend ce que tu vis c'est moi.

-Je sais Sophie mais tu vois, je pensais que t'avoir dans ma vie ça m'aiderait, que je me sentirais comprise, qu'on pourrait s'épauler et pourtant j'ai l'impression de sombrer perpétuellement, d'être dans un puit sans fond et de me heurter aux bords rocheux écorchant un peu plus mon âme meurtrie à chaque fois.

-Le problème c'est qu'on est pas prêtes, on est plongées dans nos routines respectives, emprisonnées dans des lieux qui nous rappellent des souvenirs tous plus douloureux les uns que les autres. Leur fantômes hantent les alentours, ils sont partout et on peut pas y échapper. Et tu vo..

-Alors fuyons, la coupais-je

-Pour aller où?

-Loin d'ici, j'ai un ami qui habite Marseille, on pourrait passer quelques jours là bas et on aviserait ensuite

-Demain?

-Et pourquoi pas maintenant?

On se regarda fixement avant d'exploser de rire. Que cette idée était folle et pourtant qu'elle était attirante. Partir, loin d'ici, avec une amie qui vivait la même chose que moi. C'est exactement ce qu'il me fallait et c'est exactement ce qu'on a fait.

2 heures s'étaient écoulées.

2 heures c'est court, très court mais ça nous avait suffit à réunir quelques affaires, envoyer un message simple mais efficace à nos proches et à prendre place dans ma voiture, direction Marseille!

-T'es complétement folle, me dit-elle morte de rire en réalisant ce qu'on était en train de faire

-T'en as jamais eu marre qu'on te dise quoi faire? Quand le faire? Comment le faire?

-Bien sûr que si

-Alors aujourd'hui tout va changer, on va prendre le contrôle de nos vies.

-J'approuve! Du moment qu'on ne se sépare pas ça va! Tu m'aides à avoir moins peur.

-Et toi à reprendre goût à la vie.

-Je trouve qu'on forme un beau duo toutes les deux

-Ouais, même si on est complétement en miettes

-C'est vrai, mais je pense qu'on se complètes

-Et on finira par se réparer

-Peu importe le temps que ça prendra

I'm just a human disasterWhere stories live. Discover now