Chapitre 16 - Magena

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Au levé du jour, le réveil fut bien matinal au village. Chayton s'était levé avant l'aube pour rejoindre les autres et malgré les précautions qu'il avait prises pour ne pas me réveiller, lorsqu'il avait ouvert, la fraîcheur s'était infiltré dans tout l'habitacle ce qui m'avait fait frissonner. Curieuse de savoir ce qu'ils pouvaient faire, je n'avais pas réussi à me rendormir et avais décidé de me lever. 

Dehors, les hommes étaient rassemblés et déjà sur le dos de leurs chevaux. J'avais aperçu Chayton au loin qui était lui aussi en train d'équiper son animal mais lorsque je m'approchais je constatais qu'il était en compagnie de la fille de la veille ce qui m'avait arrêté. 

Je m'apprêtais à faire demi-tour afin de retourner dans le tipi là où je ne serais un problème pour personne.

     — Eleanor, où vas-tu ? Avait demandé Chayton en contournant son cheval. 

     — Je ... Je retourne me coucher, je pensais qu'il était plus tard mais finalement rien ne presse et tu sais à quel point le sommeil est précieux pour moi ! Répondais-je le plus naturellement possible bien que je devais surement avoir l'air stupide avec mon sourire forcé.    

Chayton m'avait regardé un moment, il avait surement deviné mon mensonge, il commençait à me connaitre pour autant il en avait fait abstraction et avait demandé à sa compagnonne de le rejoindre.  

     — Quand tu seras enfin réveillé pour de bon, rejoins Magena j'ai confiance en elle, elle saura s'occuper de toi pendant que nous serons partie à la chasse, nous serons de retour avant la nuit. 

Quel aubaine, la petite-amie en guise de nourrisse c'est certain j'allais passé ma journée sous les couverture et inventerait une bonne excuse pour ne pas en sortir ! 

J'avais filé me cacher dans le tipi et je m'étais remis sous les couvertures, peut-être qu'avec un peu de chance je réussirais à me rendormir et lors de mon réveil la nuit commencerait à tomber. Mais ce ne fut pas si simple, mon esprit était en pleine ébullition et je n'arrivais pas à changer mes pensées.

     — Eleanor est-ce ici que tu te caches ? Demandait une voix avec un fort accent.   

Je m'étais vivement redressé en reconnaissant la voix de Magena, elle était entrée dans le tipi et me regardait l'air amusé.

     — Chayton m'a dit que tu aimais beaucoup dormir mais j'ai pensé que peut-être tu voudrais m'accompagner pour aller ramasser des baies dans la forêt ? 

Je m'étais rapidement redressé afin de lui faire face, elle me regardait toujours avec une lueur d'amusement dans le regard. Magena n'avait alors pas attendu ma réponse plus longtemps et m'avait demandé de la suivre, à quoi bon l'éviter de toute façon, ça ne changerait rien à la situation.    

Nous avions rejoint un autre groupe de femmes avant de nous diriger vers un petit bois situé à une dizaine de minutes de marche. Les femmes discutaient et riaient ensemble pendants que les enfants couraient déjà dans tous les sens escalader les arbres et s'amusant à toutes sortes d'arabesques toutes plus dangereuses les unes que les autres, pour autant les mères ne disaient rien, j'avais déjà remarqué ça auparavant les enfants étaient libres et leurs mères ne les couvaient pas comme les Européens le faisaient pour autant elles s'occupaient incroyablement bien d'eux, ils savaient une éducation irréprochable et étaient généralement obéissant, responsable et cultivé. 

     — Est-ce que tu comprends notre langue ? Avait demandé Magena en me rejoignant à l'arrière du groupe.

     — Pas vraiment, je commence à comprendre certains mots mais je ne suis même pas sûr que ce soit la bonne traduction.    

       — Hau, ça veux dire bonjour, expliquait-elle accompagné de son sourire éternel, pilamayaya, merci ... Continuait-elle. 

Et pendant tout le chemin elle avait continué de m'apprendre sa langue. Il fallait l'avouer Magena semblait être une femme adorable et je n'arrivais pas à la détester.

Lorsque nous furent à l'endroit propice à la cueillette, les quelques femmes s'étaient dispersés un peu partout afin de couvrir plus de terrain. Magena avait continué de m'accompagner et m'avait montré ce qui était bon à ramasser et ce qui ne l'était pas.

     — Pourquoi as-tu quitté les visages pâles ? Avait alors demandé Magena tout en continuant sa récolte.   

La question piège, qu'allais-je donc répondre ? Que j'étais banni par les miens . Que j'étais un traître à leurs yeux . J'avais toujours réussi à éviter le sujet jusqu'à ce jour et j'aurai aimé que cela dure encore plus longtemps.

     — Non ne répond pas, je n'aurais pas dû te demander cela, mais les miens semblent avoir de l'estime pour toi, voir une blanche parmi eux est tellement surprenant. Et puis Chayton à l'air de t'apprécier lui aussi.  

J'avais manqué de m'étouffer avec ma propre salive à ce moment la, cette conversation prenait définitivement une tournure effrayante. 

     — Oh ... Je ... Non ... Bafouillais-je ne parvenant pas à articuler la moindre phrase ayant du sens. 

     — Mon frère est un garçon plutôt distant un général, il parle peu pourtant avec toi il semble à l'aise je l'ai rarement vue comme ça. 

     — Ton frère ? Avais-je répété en me redressant. 

     — Oui, mon frère aîné, qui pensais-tu qu'il était pour moi ?

     — Oh, euh .. Personne. Mentis-je en me remettant à la tâche. 

Magena avait alors laissé échapper un rire cristallin, sûrement avait-elle deviné la nature de la relation que je lui imaginais avec son frère.

     — Mais pourquoi ne vis-tu pas avec les tiens ? Avais-je finalement demandé après avoir hésité un instant de peur que cela soit trop impersonnel.  

     — Après la mort de notre père, j'ai longtemps eu du mal à faire mon deuil, je préférais échapper à la vigilance de mon village et voyager, j'ai alors croisé le chemin d'Isha un homme d'une tribu allié, il est devenu mon mari,  depuis je ne suis plus jamais rentré et je suis heureuse ainsi. 

Magena était rayonnante et enchanté de sa propre histoire, elle avait une vie qui semblait la combler. Je l'enviais, j'aurais aimé avec une vie comme la sienne, libre mais pas seule, elle était indépendante et pourtant elle avait toujours sa famille et surtout elle était heureuse. 

Omakiya (Aide moi)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant