-01-

12 1 3
                                    

+S+
ÉTRANGERS

De ma position je pouvais apercevoir six personnes, six villageois enragés à ma poursuite. De l'autre côté se trouvaient deux étrangers, complétements paniqués à la vue des cadavres accrochés sur de grandes croix en bois. N'importe quel aveugle aurait pu deviner qu'ils étaient au bord de l'évanouissement tant ils avaient peur. Je pouvais facilement me faufiler vers eux sans me faire repérer, si un des deux inconnus se faisait voir je risquais de me faire prendre moi aussi. Pour éviter cela je devais donc les éloigner de la forêt.

-Il n'est pas ici, déclara un villageois, le plus jeune qui devait avoir seulement quelques années de plus que moi.

Si seulement tu savais, répondis-je intérieurement à l'attention du jeune homme.

-Il est dans les parages ! Il nous observe ! Ils sait où nous sommes et nous devons le trouver avant qu'il ne nous tue ! répliqua un des plus vieux. Le démon est fourbe ! Nous devons le trouver ! Cherchez encore !

Ils s'éloignèrent un peu, me laissant la voie libre pour approcher les deux étrangers terrifiés.

J'hésitai encore un peu avant de me lancer. Je n'avais jamais sauvé d'étrangers auparavant (la principale raison étant qu'ils étaient morts avant que je n'en aie eu le temps) et je me demandais ce que ça m'apporterait. Rien probablement, si ce n'était la satisfaction inutile d'avoir sauvé deux innocents d'une torture sans nom. J'avais plus à perdre en fait, s'ils m'avaient aperçu ils auraient pu dire où je me trouvais par peur de mourir et ils viendraient me tuer. Non, définitivement, les emmener et les protéger était la meilleure option.

Je descendis prudemment du sapin où je m'étais caché pour courir vers le buisson où se terraient mes deux nouveaux protégés.

En me rapprochant je pus apercevoir plus distinctement la silhouette des inconnus, il y avait un homme, l'air assez confiant bien que paniqué, et une femme, qui n'attendait qu'un prétexte pour hurler de terreur.

Je me jetai derrière l'arbuste au moment où le groupe revint.

L'étrangère se retourna vivement dans ma direction, elle allait crier mais je plaquai ma main sur sa bouche pour la faire taire.

-Tu veux nous faire tuer ? dis-je à voix basse. Je ne vous ferai pas de mal.

J'attendis que le groupe s'éloigne à nouveau pour libérer la femme de mon emprise.

-Vous n'êtes pas avec eux ? s'enquit l'homme à côté de moi.

-Non étranger, c'est moi qu'ils pourchassent. Mais ne parlons pas de ça ici, ils vont revenir.

Je les entrainai à travers la forêt pour arriver dans les hauteurs de la vallée où nous étions abrités et cachés par d'épais sapins.

-Pourquoi vous poursuivent-ils ? demanda la femme, encore sous le choc.

-Parce que j'ai eu le malheur de naitre avec des yeux noirs et que mon père était un étranger, expliquai-je. Ces gens-là sont très attachés à la religion, ils sont persuadés que je suis l'antéchrist.

-Et vous l'êtes ? rétorqua l'homme.

-Non, mais il est vain de leur faire entendre raison, ces gens sont fous. Évitez d'entrer dans les villages ou vous feriez des cauchemars. Ils tuent pour menacer, ils sacrifient des animaux quand ils fêtent quelques chose, il y a des cadavres à perte de vue : des étrangers entre autres. Restez dans les hauteurs et ne descendez ni dans les villages ni dans les marais. Et si quelqu'un vous demande où est Sadan, ne répondez pas.

L'antéchrist - La vallée mauditeWhere stories live. Discover now