III

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Mélanie

J'avais put observer un comportement étrange chez Lucie. Elle qui était toujours à me parler de ses dernières lectures, elle était dans ses pensées et soucieuse de quelque chose. Je voyais bien qu'elle voulait me parler de quelque chose d'important, mais elle n'osait pas. Rien qu'au cours de sport je l'ai vu m'observer intensément pendant un bon moment. Un autre regard me suivait d'ailleurs, la seule différence était que celui là m'était totalement inconnu.

Je m'afférais dans les vestiaires à ranger rapidement mes affaires. J'étais encore une fois dans les dernières et je savais que les autres n'hésiteraient pas à me laisser seule ici. Rien n'était plus important que leur maquillage et leur coiffure.

Comme je l'avais prédit, je fus seule quelques minutes après. Le silence du grand vestiaire me stressait quelque peu. Je n'entendais que le clapotis des gouttes d'eau tombant encore d'un pommeau de douche. Je me précipitai dans la douche pour le fermer, presque apeurée par ce bruit pourtant anodin. En revenant dans la pièce principale, un cri aigue m'échappa des lèvres.

Un corps se trouvait par terre, sur le carrelage sale, au milieu d'une marre de sang. Il émanait de lui une odeur horrible et je peinais à m'approcher. Je discernais peu à peu des cheveux blonds assez courts. Je contournais le corps pour le voir de face et des larmes se mirent à rouler sur mes joues. Je reconnaissais ces yeux bruns et ce visage joufflus. Mon regard descendit sur son cou d'où le sang s'écoulait par litres. Une large coupure y était gravée. Elle n'était pas nette et on aurait dit que la personne s'y était prit à plusieurs fois pendant que la pauvre Marie agonisait lentement. Je poussais plusieurs petits cris, ma respiration devenant de plus en plus rapide et douloureuses. J'étais à présent à genoux devant le cadavre en décomposition de celle qui avait été mon amie de colonie pendant trois années consécutives.

-Mélanie ! Mélanie regarde moi ! Qu'est-ce qu'il se passe ?

Une voix masculine parvint à mes oreilles. Je sentais qu'il me secouait par les épaules. Il se tenait à quelques centimètres du corps de la blonde. Comment ne pouvait-il pas la voir ? Comment pouvait-il rester là devant le cadavre d'une adolescente sauvagement assassinée ?

-Mélanie calme toi !

Son cri me fit cligner des yeux. Je me retrouvais happée dans son regard bleu foncé emplis de ténèbres. Il semblait à la fois paniqué et résigné. C'était comme si il savait ce qu'il se passait mais qu'il ne comptait rien y faire. Je jetais un œil derrière lui, avant de me rendre compte avec effarement que le corps de Marie n'était plus là. Il n'y avait aucune trace de sang, aucun cheveu blond, aucune odeur nauséabonde.

-Elle était là. Elle était là je le jure ! Je ne suis pas folle !

Je pleurais encore plus et tentait de me défaire de sa prise. C'était peine perdue. Le jeune homme qui m'avait observé pendant ma course me tenait fermement et je n'avais aucun espoir de fuite.

-Mélanie je ne sais pas ce qu'il s'est passé, mais ça n'a pas l'air d'aller du tout. Je vais te signer un papier de sortie ou je ne sais quoi et tu vas rentrer chez toi. J'ai été clair ?

Son ton s'était fait froid et autoritaire, ne laissant place à aucunes répliques négatives. J'acquiesçais sans vraiment pourvoir faire le contraire et me levais avec son aide. Il récupéra mon sac et me traîna presque jusqu'à l'entrée avant de me laisser devant le portail.

-Je t'aurais bien raccompagné chez toi pour m'assurer que tu ne fasses pas un malaise en chemin, mais je ne peux pas quitter le collège sans me faire déchiqueter par mon supérieur. Fais attention, je ne veux pas retrouver ton nom dans les faits divers.

Je lui adressais un léger sourire de remerciement et rentrais chez moi le plus rapidement que mon corps fatigué me le permettait. A peine avais-je passé le seuil de ma porte que je me précipitais aux toilettes pour vomir. Les images du corps de Marie tournaient en boucle dans mon esprit et rien ne semblaient vouloir les effacer. Une petite voix me murmura qu'elle est morte par ma faute, et il ne m'en fallut pas plus pour me mettre à pleurer.

Des soubresauts et des sanglots violents me prenaient et je criais presque. Je criais contre mes cauchemars. Je criais contre mes proches incapables de comprendre que j'allais mal. Je criais contre mon esprit malade qui m'envoie des hallucinations des corps de mes amis. Je criais tout simplement contre la vie qui me poussait à bout.

***

Quand ma mère rentra quelques heures plus tard, elle me retrouva assise sur mon lit, à dessiner dans mon carnet où je note tout ce que je ne peux pas dire. Elle semblait surprise, je ne dessine jamais. Tout ce qui touche aux activités manuelles me répugnent presque. Le dessin est juste la seule chose que j'ai trouvée pour faire passer le temps plus vite. Je suis tellement concentrée que j'oublis tout ce qu'il se passe autour, plus rien n'a d'importance. Au début c'était juste des traits, puis un sourire méchant et recousue est apparue, des cheveux bouclés, un œil que j'imagine vert et que je fonce au crayon et une horloge enfoncée dans l'autre orbite. Mon dessin est affreux tout en étant beau. Ce n'est pas un cheval, une jolie fille ou un beau paysage comme je vois les autres faire. C'est un personnage monstrueux qui me ressemble en certains points.

Je redresse la tête vers ma mère qui me regarde avec inquiétude. Je ne sais pas ce qu'il se passait dans sa tête à se moment précis, mais elle devait se douter que quelque chose n'allait pas. Comme si ce n'était pas évident.

-Qu'est-ce qu'il y a ?

-Comment ça qu'est-ce qu'il y a ? On m'appelle pour me dire que tu as fait une sorte de malaise et je te retrouve à dessiner des horreurs.

Je jette un œil sur mon croquis et hausse négligemment les épaules. Même si ce n'est pas la plus ravissante des filles, elle a le mérite d'être bien dessinée.

-Je fais preuve de créativité, tu ne vas pas m'en empêcher quand même ?

Je la vois inspirer légèrement et déglutir. Je cherche ses limites, j'ai presque envie qu'elle se mette en colère contre moi. J'ai envie qu'elle me prouve que même elle ne me supporte plus. Le problème c'est qu'elle comprend parfaitement ce que je fais et contourne plus tôt habilement ma question.

-C'est juste que tu écris d'habitude, tu ne le fais plus.

-Si, j'avais juste envie de changer un peu. Je ne supporte pas la routine.

-Je...je vais te faire à manger. Tu as besoin de reprendre des forces et je doute que tu ais avaler quelque chose depuis hier soir. Il ne faut pas s'étonner après si tu fais des malaises.

Elle s'éclipsa rapidement et me laissa à ma mélancolie. Peut-être lui avais-je fais peur ? Quesque j'en sais après tout. Je referme sèchement mon carnet et le range à sa place habituelle, caché entre un Harry Potter et un manga. Peu de temps après, ma mère m'appelle pour manger et on a regardé une série comme si de rien n'était. C'est peut-être mieux comme ça. Quand elle se fait trop de soucis elle parle beaucoup et fait un discours de psychologue scolaire et de mère inquiète. Je n'en ai vraiment pas besoin pour le moment, je dois juste forcer mon esprit à se concentrer sur autre chose et ça ira mieux après. C'est ce que je croyais du moins...


Face CachéeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant