Liars, Liars

Chapitre 3.

Elle avait poussé la porte, les mains tremblotantes et le cœur battant à tout rompre afin de pénétrer dans le salon. Elle avait joué le jeu et avait fait comme si elle était Siobhan en claironnant qu'elle était là. Sauf que maintenant huit paires d'yeux étaient rivées sur elle et elle ne se sentait plus aussi confiante. Et si ils la perçaient à jour sans même penser un instant qu'elle puisse être Siobhan ? D'un autre côté, Sio ne tarderait pas et ils découvriraient vite la vérité. Autant s'amuser un peu. Elle esquissa donc un petit sourire et s'approcha des jeunes installés dans le canapé qui se levèrent tous brusquement pour s'approcher d'elle.

- Putain Sio, t'étais où ?! s'exclama un des trois garçons en l'étreignant rapidement.

Il se recula pour l'observer un instant et passa ses doigts chauds sur les joues encore froides de la jeune femme. C'était le plus grand des mecs. Il était assez baraqué et sa silhouette athlétique était mise en valeur par son tee-shirt moulant à l'effigie d'un groupe de rock connu. Ses cheveux de jais étaient longs et retenus par une ficelle de cuir beige formant un chignon négligé et il avait des yeux d'un vert émeraude qui venaient donner plus de profondeur à son regard perçant. Peau laiteuse, traits virils et carrés, c'était un Irlandais pure souche, Shanleigh en était certaine.

- J'ai juste un peu de retard, pas de quoi en faire un drame, tenta de le rassurer la rouquine en haussant les épaules.

- Tu te fous de nous ou quoi ? T'es pas rentrée hier soir, tu répondais pas à ton téléphone et là tu te pointes comme une fleur, tout sourire.

Un autre des colocataires s'était approché d'elle et pointait un doigt rageur sur elle, apparemment furieux. Contrairement au premier qui lui avait parlé et qui semblait ravi de la revoir, celui-là lui adressait un regard glacial qui la mettait mal à l'aise. Et surtout, elle ne savait pas comment se justifier. Sa jumelle ne lui avait pas précisé qu'elle avait découché sans prévenir et qu'elle allait devoir mentir à sa place.

- Depuis quand je suis obligée de justifier le moindre de mes mouvements ? Si vous voulez tout savoir, j'étais avec un mec. Et j'ai juste oublié de vous prévenir. Je suis désolée, marmonna Shanleigh en espérant que les légères rougeurs qui venaient teinter ses joues ne la trahiraient pas.

Elle vit une ombre passer dans le regard vert du premier coloc et elle espéra ne pas avoir fait de gaffe. L'autre fille de la maison s'approcha à son tour et elle passa son bras autour de la taille de la rouquine en posant sa tête sur son épaule.

- Moi, je suis juste contente de te revoir. On a eu peur Sio, tu sais bien comment on est. Pire que des mères poules.

La rousse lâcha un petit rire et hocha doucement la tête.

- Je sais, t'en fais pas. Je suis contente d'être ... de retour. On est mieux à la maison, souffla la jeune femme.

Et le pire, c'est qu'elle le pensait. Elle était touchée de voir des gens attendre après elle, s'inquiéter pour elle. Elle n'avait jamais eu ça depuis que sa mère était au centre et qu'elle vivait seule. Plus personne ne l'attendait. Et elle se rendait compte maintenant d'à quel point sa vie lui paraissait froide et vide comparé à ce qu'avait l'air de vivre sa jumelle.

- Les mecs s'occupent du repas ce soir, on monte dans ta chambre vite fait ? demanda la jeune femme en la tirant par le bras pour sortir du salon.

Elle adressa un petit sourire aux garçons et les deux jeunes femmes quittèrent la pièce.

- Tu m'as pas parlé de ce mec, je veux tout savoir. Mais je pouvais pas t'en parler dans le salon, Clyde est trop jaloux dès que t'as un mec.

Ainsi, Clyde devait être le premier mec qui l'avait enlacée rapidement. Au moins un des visages sur lequel elle pouvait mettre un nom. Elle aurait aimé savoir le prénom de cette jeune femme qui semblait être plutôt proche de sa jumelle. La rouquine la laissa la guider dans les escaliers et dans le long couloir jusqu'à une pièce dans le fond sur la droite. La chambre de Sio apparemment. Elle contempla un instant la décoration tandis que sa coloc refermait la porte et prenait place sur le grand lit à baldaquin. La chambre était assez spacieuse et lumineuse. La fenêtre donnait sur l'océan et Shanleigh envia intérieurement sa jumelle de pouvoir se réveiller tous les jours avec cette vue. Cela aurait suffi à la combler de bonheur. La pièce, elle, était tapissée d'une peinture vieux rose qui donnait à la chambre un côté maison de poupées plutôt charmant. Elle rejoignit la jeune femme et s'installa sur le lit, presque timidement.