Episode 8 - Noël

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Après un weekend étrangement long, le lundi arriva enfin. Comme je l'avais prévu, je manquai les cours cette matinée-là, mais n'allons pas le crier sur tous les toits voulez-vous ? Passer le 24 décembre derrière un bureau, le nez plongé dans un livre pendant qu'on me faisait répéter des lignes et des lignes de caractères, non merci. Je me décidai donc sur une collection de vieux films de noël sur mon PC, ce qui me laissa juste assez de temps pour déprimer sur mes maigres options vestimentaires. J'avais bien essayé de me trouver une jolie robe, mais cela avait été peine perdue. S'il y a bien quelque chose que mes années en Asie m'ont apprises, et de la manière forte, le genre poing dans ta figure même, c'est que nous ne voyons pas les tailles de la même manière. Je n'ai jamais été fine comme un mannequin, mais je n'étais pas grosse pour autant. Et ici, mon M européen correspondait plutôt à un XXXL qui ne se trouvait jamais en boutique.

Autant vous dire que les seuls vêtements que j'avais pu acheter étaient de gros pulls difformes, vous savez, ceux qui sont si confortables que notre coeur se refuse à les jeter quand bien même ils ne seront jamais portés en société ? Le reste, j'avais depuis longtemps tiré une croix dessus. Les manches longues devenaient trois quart, les chaussures les plus grandes étaient trois tailles en dessous de ce que je portais, etc. Vous ai-je parlé de cette fois où je me suis effondrée en larme dans un magasin parce que leur plus grande taille de jean (maudit skinny jeans) ne me passait même pas le mollet ? Le mollet !!! Non ? Tant mieux, ce n'est pas vraiment du ton de ce récit. Je me bornerai à dire que les regards qui vous scrutent de haut en bas lorsque vous entrez dans une boutique, suivi d'un mouvement de tête de droite à gauche qui signifie « ce n'est même pas la peine d'essayer », et bien c'était assez éprouvant pour tirer définitivement un trait sur toutes les boutiques de vêtements de la ville. Le shopping, ma kryptonite à moi. En tout cas, de ce côté-là de la planète.

Lorsque le soleil entama sa descente vers l'horizon enneigé, j'étais aussi prête que je pouvais l'être. Nim m'avait donné rendez-vous dans le hall de l'immeuble, aussi enfilai-je mes grosses bottes et pris-je mon énorme doudoune sous le bras. A – 20 degrés, il y a certaines choses qu'on refuse de sacrifier à la beauté. Je croisai plusieurs étudiants dans les couloirs, certains en train de se préparer pour sortir, les autres se regroupant pour une grande soirée film dans la salle commune. Il me fallut dire bonjour, demander des nouvelles, donner des miennes, et lorsque je parvins finalement à rejoindre les ascenseurs, j'étais déjà en retard.

J'avais un peu culpabilisé de le faire attendre, mais Nim n'était pas seul dans l'entrée démesurée des dortoirs étudiants. Il était facile de le repérer cependant, d'une certaine façon, il lui était presque impossible de se fondre dans une foule. Il était plus grand que la plupart des asiatiques, et un groupe de jeunes filles lui tournait déjà autour pour vérifier s'il était bien coréen, comme son look le laissait apparemment deviner. Il me sourit et délaissa ses admiratrices quand il me vit arriver. J'essayai de ne pas m'attarder sur les regards déçus. Et aussi de ne pas trop réfléchir au fait que hé, c'était lui qui était chanceux de sortir avec moi, et pas l'inverse ! A moins que... Les garçons n'avaient pas spécialement l'air de le regarder avec envie, lui.

Une voiture rouge et jaune attendait déjà devant la porte. Même s'il faut avouer que dans le nord de la Chine les taxis ne coûtent vraiment pas grand chose pour nous, pauvres étudiants, cela voulait dire qu'il sortait le grand jeu.

— On n'attend pas Yuji ? demandai-je en entrant dans la voiture, car je savais à présent que lui et Nim étaient colocataires.

— Non, il nous retrouvera directement sur place.

Cela tombait sous le sens, Ana ne vivait pas dans notre dortoir étudiant après tout. Il avait du aller la chercher, en bon gentleman qu'il était.

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