Chapitre 10 : Je m'envole et quelqu'un d'imprévu

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   J'avais tout ce qu'il me fallait. Du moins c'est ce que je croyais... J'étais contacté, ou prenais le soin de moi même m'avancer, et de proposer mon univers pas encore totalement défini. Rien. Absolument rien ne semblait satisfaire. Peut-être que j'allais vers les mauvais gens, ou simplement que j'étais mauvais ? Je n'en savais rien et une chose est sûre, quelqu'un devait m'éclairer. Je ne comprenais rien et comprenais tout en même temps... Je voulais tellement signer quelque part. Je ne voulais pas quelque chose de grand, juste me sentir accepté et si j'ose espérer, admiré. J'apportais ma musique partout, jusqu'au jour où...
« Non, ça ne marchera pas »
Concrètement. Les mots étaient bien évidemment plus lourds et leur sens résonnait de mille façons différentes dans ma tête. Positif ? Négatif ? Je n'étais pas triste, mais fou de rage. Non, ce n'était même pas ça. J'étais juste très énervé. Contre moi même ? Certainement pas. On venait de me claquer à la figure je n'étais pas assez bizarre, pas assez « pop », et sans la moindre gêne, on me demande ce que je suis ? On m'affirme que je ne suis rien d'autre qu'une chose étrange ? Tu vas leur montrer ce que tu es. Alors je rentre.
   Je suis là. Qu'est-ce que je fous ? Je vais écrire. On dit que c'est dangereux quand on a pas forcément les idées claires. Je dis que c'est d'une efficacité singulière. Je ne réfléchis pas. En un rien de temps c'était fait. Je sors de ma bulle en hallucinant presque. Je ris en pensant à ce que j'ai pu écrire avant et qui avait pris un temps fou durant les derniers mois écoulés. Car oui, je n'avais fait que ça. J'ai déjà passé plusieurs semaines à me concentrer sur juste une phrase sans jamais pouvoir la finir. Qu'est-ce que je disais ? Ah, efficacité.
   Je me suis relu. Vous savez, je peux être tout ce que vous voulez. Qu'est-ce que vous cherchez ? Est-ce que je dois changer pour vous satisfaire ? Vous ne savez pas ce que vous perdez. Je m'emmêlais entre ce que je pensais vraiment, les réelles paroles, la chanson globalement, moi, le reste... Je recentre un peu mes idées et descends chercher une bière. Ma cuisine. T'aurais dû t'installer là. Je sais... Je pose mon coude sur le plan de travail et me mets à regarder le sol comme si il me parlait. Not sad. Not sad. Not sad. No, I'm not. Je fronçais les sourcils, comme à mon habitude, sans m'en rendre compte. Mais cette fois c'est comme si le moindre petit détail me dérangeait. Alors j'arrête de le faire et après avoir fini ma bière un peu trop vite, je la laisse traîner et, pris d'une adrénaline que je déteste quand c'est si soudain, je décide d'agir. J'attrape ma veste, prends mes clés et ouvre la porte. Je m'arrête surpris d'abord par la violence de mon geste, puis parce que quelqu'un s'apprêtait très probablement à l'ouvrir. Ou plutôt d'abord surpris par ce que j'avais devant moi, puis par la violence de mon geste ou même pas du tout par la violence de mon ge-. Chut. Mon dieu tu as les yeux humides à cause de tout ce que tu ressens, tu dois être un peu rouge parce que tu as trop chaud avec cette fichue veste, tu dois respirer très fort. Chut. Qui est-ce ? Je suis embarrassé, enfin je suis dans la merde. Je sais plus parler, j'ai de nouveau 5 mois et demi si ce n'est moins, je veux reculer et rentrer chez moi me cacher, rembobiner la scène, que j'entende toquer et vienne ouvrir, pas que je le surprenne autant que je demeure surpris. Bon.
« Hi... You ? »
« Sorry I can come back later if you want ! And... Hello ! »
« No no no, I mean, yes. Hum, I'm confused... » avouais-je en me grattant la nuque et en ayant un regard un peu trop percant et gêné. Je regardais sans regarder. Silence. Oh non. On finissait par souffler un assez long rire, en même temps.
« So you forgot about me huh ? »
Oui ? Non ? Je ne sais pas ? Je veux pouvoir être capable de penser à nouveau s'il vous plaît ? Je ne répondais pas.
« I'm just one of the people who can support you if you want. You have some issues, someone gave me your address and I'm here. It's better not to make it wait too long »
« Yeah, sure, come in, I guess... »
Qu'est-ce que je foutais encore ? Je ne faisais que rire nerveusement, y'avait rien de drôle. Je lui fais signe d'entrer.
« Are you sure ? You were leaving and- »
« No... Yes ! »
Je me fige en souriant les mains dans les poches arrières de mon jean. J'avais arrêté de respirer et donc souffle quand je reprends enfin :
« I can stay, it wasn't important anyway... »
Il sourit. Son sourire ah, celui ci devient plus large lorsqu'il tourne la tête et voit cette bière vide pas encore jetée. Je ne le laisse pas faire son commentaire :
« Do you want some ? »
« We need to be productive but yeah »
Sérieux mais pas trop... Je remarquais silencieusement.
« Oh with a beer, you always are ! Trust me ! »
Je me tourne et en sors deux, j'en avais bien besoin d'une nouvelle moi aussi. Je sens que son regard se pose sur moi et mon dos tourné alors que je les décapsulais. Je me retourne et il sourit encore à la vue de pas une mais deux bières. Il sourit beaucoup dis donc. Mais jamais de la même manière. Rien ne change mais pourtant si. On s'assoit à table, silence encore durant quelques secondes, il s'attarde sur les manches retroussées de ma veste mais je ne baisse pas le regard pour les regarder, ayant conscience qu'il allait comprendre que j'avais remarqué. Il reprend ses esprits.
« I'm gonna help you »
« Yeah, thanks... I guess. But do you know my sto- ? »
« No »
« What I want ? »
« No no, I know nothing. I was called, I was free these days, I needed to work, I came here, I found you, a bit lost, I'm just saying that I'm gonna help »
« ... »
« I'm Andy »
« Nice to meet you »
Il me sert la main. Pour la première fois. Au dessus de ce bois, et de cette table qui semblait disparaître au fur et à mesure que je clignais pourtant des yeux.

PrénomOù les histoires vivent. Découvrez maintenant