Chapitre 1 : Je découvre mon sourire

660 15 1
                                    

   Il se fait tard. Avant de passer à la salle de bain, je sens les derniers rayons du soleil de la journée traverser la haute fenêtre de ma chambre. Je suis assis sur mon lit, et décide de me lever, prendre un tabouret et monter dessus afin de voir pour la énième fois ce spectacle qui s'offre à moi. Pile à la hauteur cette fois, je m'accoude comme je peux et respire l'air. Je regarde droit devant moi, les couleurs chaudes m'éblouissent. Je plisse les yeux en baissant la tête et je vois les gens qui passent, fatigués, des gamins de mon âge sautiller, d'autres se plaindre et traîner derrière leur mère... J'en vois qui sont sûrement amoureux, ou pas d'ailleurs. Ils se tiennent la main et regardent dans la même direction que moi. J'étais amoureux moi aussi, de ce que je voyais. J'étais reconnaissant d'avoir la chance d'entendre les mêmes mélodies tous les soirs. Celle que provoquait ces cris d'enfants, celle de la nature, et celle que j'ai dans ma tête. Parfois, je reste des heures, jusqu'à ce qu'il fasse complètement noir, à me torturer l'esprit, j'invente, j'efface, je recommence... J'essaie de trouver un moyen de rendre le monde meilleur en m'inspirant de l'atmosphère, pour quelques secondes je sais le faire. Je rêve éveillé, un instant, qu'un jour, je puisse le réaliser. Remplir le cœur des autres avec l'amour que je peux donner, enrichir leur vie, soulager leur conscience. Je m'imagine avec du talent, remarquable, passionné, sans honte. J'attends, savoure, et reviens à la réalité, à ma fenêtre.
Un autre type de paysage me fait face maintenant. Moi. J'ai l'impression que je le vois beaucoup plus rarement que tous les autres. Pourtant ceux qui m'entourent l'ont devant eux tout le temps, et ça ne me gêne pas. J'ai un peu plus de mal lorsque je me retrouve seul et que je dois à mon tour le contempler. Mon regard se fixe sur autre chose, même quand je suis dans cette salle de bain où je ne peux pas me rater à cause de multiples miroirs. Alors ce soir, je décide de faire un effort, et me regarde. Mes grands yeux brillants, j'ose dire que ce n'est pas de tristesse, que c'est juste qu'ils pétillent, parce que je suis juste un enfant. Je souffle un rire, et mon sourire me surprend. Il ressemble à ça, alors. Je l'agrandis, et me pose des milliers de questions. Je me persuade que quoi qu'il arrive, il sera toujours sincère lorsqu'il se dessinera comme réponse à ce que quelqu'un me dira. Je me mets à rire, pour de vrai, et m'observe. J'ai l'air ridicule, idiot, tout ce que vous voulez, je le sais. C'est bizarre... Tout ça. Oui. Mon sourire disparaît. J'attrape mon épaule en m'étirant la nuque, dans l'espoir que quelqu'un d'autre m'offre la sienne. Qu'il prenne le temps de comprendre, de remarquer, et de tout me donner. Je regarde ma main posée, là, et je souris. Je sais que je ne peux plus le voir maintenant, mais ça n'a plus d'importance. Je l'imagine, comme pour tout ce que je fais. J'attends, savoure, et reviens à la réalité.

PrénomWhere stories live. Discover now