Chapitre 5 : La Corneille Noire

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Devant son ton presque cruel, je cède à son ordre. J'approche mes lèvres de la pomme et croque péniblement un morceau dans sa main. Ma gêne colore mes joues d'un rouge semblable à celui du fruit et une chaleur intense monte dans mon corps. Je me sens honteuse. Zack semble prendre un malin plaisir à me torturer psychologiquement. Mais à quoi bon ? Pour se divertir ? Cette petite humiliation parait l'amuser. Agacée, je décide par une pulsion de rébellion de retourner son jeu contre lui. Cette fois-ci, je m'efforce de croquer un morceau en le mordant sensuellement tout en levant les yeux vers Zack, surpris. Profitant de son étonnement, je me lève de la chaise, et, par une audace qui me surprend moi-même, attrape sa main et l'approche de mes lèvres.

— Ce fruit est vraiment délicieux... j'ai envie de le croquer encore, susurré-je tendrement.

Zack me dévisage pendant une fraction de seconde. Il reste interdit. Or, je vois le trouble se dessiner dans son regard d'ordinaire impalpable. Je tiens sa main à proximité de mes lèvres. Qu'est-ce qu'il m'a pris ? Je laisse glisser ses doigts de mon étreinte et il les approche doucement de ma bouche tremblotante. J'aimerais le repousser, mais je ne me contrôle plus. C'était juste un jeu alors pourquoi ai-je la sensation que nous ne jouons plus ? Pourquoi est-ce que cet homme a cet effet sur moi ?

— Non ! Ne me touche pas.

J'ai brisé le songe. Zack reprend toute sa contenance et son air impassible. Irrité, il me pousse violemment en arrière et je tombe sur la table. Il agrippe fermement mon cou et maintient ma tête plaquée. La pression de ses doigts commence à me faire suffoquer. J'utilise mes mains libres pour tenter d'enlever les siennes. C'est peine perdue. J'essaie de me débattre, mais il me lance un avertissement :

— N'essaie plus de me tourmenter. Sinon je te ferai avaler cette pomme jusqu'à ce que tu t'étouffes.

— Arrête ! Je perds mon souffle, lâche-moi ! protesté-je.

Je ne cesse de remuer, même si je sais qu'il ne me tuera pas. Il veut juste me donner une leçon, bien qu'il risque de finir par m'étouffer s'il me sert encore. Alerté par mes gémissements de douleur, il finit par me libérer.

— Décidément... tu m'agaces, lâche-t-il.

— Et toi, tu m'excèdes, murmuré-je.

Apparemment, je ne l'ai pas dit assez bas, car Zack me lance durement :

— Je te déteste.

— Et moi, je te hais, répliqué-je. Tu es l'un des pires individus que l'humanité n'ait jamais engendrés.

Je le scrute avec mépris, mais il esquisse un sourire narquois.

— Je prends le compliment, mais la flatterie ne te mènera nulle part. D'autant plus qu'il y a bien pire que moi... comme l'individu qui veut ta mort. Garde donc tes remarques pour lui.

— Qui me dit que ce n'est pas toi ? Après tout, je n'ai aucune preuve de ce que tu avances ! Tu es peut-être un stalker ou un psychopathe qui me garde enfermée pour...

Je peine à terminer ma phrase.

— Pour ?

— Pour quelque chose de tordu, tiens !

— Si j'avais voulu faire ce que tu sous-entends, je n'aurais pas attendu. Penses-tu vraiment que je suis ce genre d'homme ?

Je réfléchis un instant. Zack est d'apparence taciturne, l'air souvent impassible quoiqu'il fasse de temps en temps ses agaçants sourires en coin. Il n'est pas dénué d'un certain sadisme quand il s'y met... Il joue aussi beaucoup de son troublant regard noir. En dépit de son penchant pour la torture psychologique avec ses jeux tordus qui lui servent visiblement de distraction, je dois bien reconnaître qu'il ne m'a jamais réellement fait de mal. Pourtant, les occasions ont été nombreuses.

Prisonnière de son cœur [Première partie]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant