Chapitre 11

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Deuxième jour d'entraînement et j'ai déjà des courbatures dans tout le bras droit. Déjà que je ne suis pas parfaite au lancer de couteau, mais si en plus on me rajoute des handicaps ça ne va pas aller. Mais bon, on prend son courage à deux mains et on va se préparer.

Je me rends d'abord dans la salle de bain. L'avantage de ceux qui sont du matin comme moi, c'est qu'on peut avoir la pièce pour nous tout seul, sans personne pour déranger. Je me fais une toilette rafraîchissante, m'habille avec les vêtements qu'on nous a donnés, c'est-à-dire le même pantalon et tee-shirt gris et me coiffe aujourd'hui de mon éternelle tresse sur le côté. La seule chose qui me manque ici c'est le parfum, c'est déjà bien qu'ils nous aient donné du déodorant alors je ne vais pas les infortunés pour une broutille comme celle-là...

Je sors finalement, mais à peine ai-je ouvert la porte que Nolan me pousse pour s'y enfermer.

- Ne t'excuse surtout pas ! je grogne.

Rien. Aucune réponse. Il doit être trop occupé à regarder ses muscles dans le miroir...

************

Nous sommes assis en arc de cercle autour de Bishop. Celui-ci nous félicite pour la journée d'hier, car il ne s'attendait pas à une telle réussite. Je pense qu'en traduisant ça donnerait quelque chose comme : « En vous voyant je pensais que vous étiez de gros nuls, mais en fait ce n'est pas le cas. Vous êtes plus forts que je ne le pensais ». Tout le monde ne rechigne pas et accepte ses paroles. Mais comme toute bonne chose à une fin, le patron nous invite à reprendre des couteaux et continuer à les lancers. Sauf que cette fois on fait comme si c'était l'évaluation, qui sera cette après-midi. Les mannequins ont laissé place à des cibles réparties dans cinq zones de tailles égales. Il nous explique que c'est comme un jeu, le but est de marquer le plus de points avec seulement trois couteaux de tailles différentes.

Chacun se met dans une zone. Je suis entre Brian et Yanis et je suis bien contente de ne pas être à côté de Nolan, car j'aurais trop peur que ses couteaux atterrissent sur moi plutôt que sa cible.

On commence. Sur les trois armes présentes devant moi, je prends le plus petit, car je sais que c'est le plus léger et que je peux en faire ce que j'en veux. Non, en réalité, c'est juste qu'hier je me suis entraînée qu'avec le petit et que si je veux faire bonnes impression, autant commencé avec ce qu'on connaît déjà.

J'agrippe mon couteau, j'inspire, je vise et je lance. Et... c'est raté... Ce n'est pas si grave, c'était le premier lancer alors c'est normal. On se remet dans le bain et on réessaie. Je reprends mon petit couteau. J'inspire de nouveau. Je vise. Je lance. Et... c'est réussi ! Il n'est pas au cœur de la cible, mais il est planté dessus et c'est le principal, non ? Je me force à ne pas exploser de joie, car je n'ai aucune envie d'attirer l'intention du patron. Savoir son regard posé sur moi me stresse et je n'arrive plus à réagir. Comme s'il avait un pouvoir sur moi qui fait que mon cerveau refuse d'obéir.

Cette fois-ci je prends un deuxième couteau, un peu plus grand. J'inspire. Je vise. Je... Je sens quelqu'un derrière moi. Je me retourne et vois Bishop me regarder. Faut pas qu'il me regarde, faut pas qu'il me regarde, faut pas qu'il me regarde. Il n'a pas l'air de bouger, donc je n'ai pas trop le choix, je ne peux pas rester planter à le regarder pour lui faire comprendre de partir... J'inspire. Je vise. Je lance. Mon couteau a touché la cible, mais ne s'y est pas enfoncé. Il est retombé sur le sol dans un fort bruit de métal.

- La prochaine fois tu mettras plus de force dans ton geste, Mila, me dit le patron.

Merci du renseignement Sherlock, mais je crois que j'aurais pu le deviner toute seule.

Je vais chercher mon couteau et retourne à ma place sauf qu'à ma place se trouve Bishop. Je m'arrête net et ne bouge plus.

- Tu peux t'approcher, je ne vais pas te mordre, me dit-il impassible.

Je n'ai pas confiance, mais je m'approche quand même. De toute façon je ne risque rien vu que j'ai un couteau entre les mains et lui rien.

Je me remets à ma place et Bishop se place à côté de moi.

- Montre-moi comment tu te positionnes.

J'obéis. J'inspire. Je vise mais ne lâche le couteau.

- Écarte un peu plus les jambes.

J'obéis encore une fois. Je refais la même chose. Mais cette fois-ci Bishop se met derrière moi et prend mes mains dans les siennes. J'ai un geste de recul quand il me touche.

- Je ne vais pas te faire de mal, tu sais ?

- Ce n'est pas l'impression que j'ai eue hier dans le couloir, je rétorque.

- Je me suis excusé et je t'ai fait passer devant tout le monde à la cantine.

- Mouais...

Je balais notre pseudo discussion et me repositionne. Il reprend mes mains. Nous inspirons. Nous visons. Nous lançons. Le couteau se plante dans la cible. Encore une fois pas au cœur, mais presque. Ce n'est pas le meilleur lancer du monde, mais je suis très fière de moi. Je me retourne et vois Bishop, le regard neutre, regarder ma cible. Je ne sais pas à quoi il pense, mais ça à l'air profond. Il revient à la raison, me félicite et s'en va vers Brian.

Je reprends mon couteau et retente le coût. Je ne veux surtout pas croire que j'ai réussi à cause de Bishop. Je veux réussir de mes propres moyens. 

L'Envers du Décor [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant