Chapitre 17 - Lhortie (Partie 4)

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Lhortie avait parcouru les couloirs du premier étage en distribuant directive sur directive

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Lhortie avait parcouru les couloirs du premier étage en distribuant directive sur directive. La situation du Présage s'avérait bien plus alarmante qu'elle ne l'avait prévue. Tout le mobilier s'était entassé, mélangé, disloqué. Le lieutenant n'osait même pas imaginer l'état du salon, encore moins celui des réserves de coke. Dans le réfectoire traversé un peu plus tôt, elle avait dû se faufiler entre les tables et les chaises encastrées en un solide barrage. Dans les dortoirs, elle avait chevauché les matelas qui ne formaient plus qu'une entité moelleuse. Et voilà seulement qu'elle atteignait la salle de réunion où un troupier quittait l'entrepôt d'armement en titubant, les bras chargés de munitions, pour rejoindre le sas ouvert sur la passerelle de proue. Dehors, quatre autres soldats l'attendaient. Parmi eux, Hourdis et Pinçon, toujours vivants, se tenaient à la rambarde de sécurité. Lorsqu'il virent passer leur lieutenant, ils se redressèrent instantanément. Sans un regard, elle s'enfila, pressée, dans la cage d'escalier – désormais escarpée – qui menait au cockpit. Elle espérait y préparer l'atterrissage d'urgence, mais à peine eut-elle posé le pied sur la première marche que Gaspé, le timonier en second, l'un des conducteurs du Présage, remonta en courant dans sa direction.

« Rupture des communications, j'imagine ? » le devança Lhortie.

Elle n'envisageait pas d'autre raison pour qu'il en vienne à quitter son poste.

« Non, non, non, chef ! Tubes acoustiques intacts ! débita le soldat, en sueur.

— Et que fait Lapointe ? Il n'y a plus personne pour sonner l'alarme ? »

— Personne ! On m'envoie vous chercher. »

Derrière une barbe épaisse et foisonnante, la bouche du timonier se tordait.

« C'est un des protégés, chef !

— Un des... Que fait un protégé dans le cockpit avant ? »

Abasourdie, elle le repoussa et s'apprêta à descendre.

« C'est... c'est le protégé d'Apostasis la Morte. »

Gapsé reprit son souffle.

« Il retient le délégué de Pentagua en otage. »

. . .

Encerclés, les deux fugitifs se positionnèrent dos à dos. Deux geôliers remontaient le couloir. Un rideau en occultait le fond. De l'autre côté, à l'intersection menant aux passerelles, trois autres s'approchaient prudemment. L'un d'eux meugla un chapelet d'injures avant de se ruer dans leur direction. Son gabarit rappelait celui du colosse. Zacharie recula d'un pas lorsqu'il le vit tendre les bras, prêt à les faucher dans sa course. Mais l'homme s'arrêta net ; Yalthia avait frappé le premier. Son poing s'écrasa d'un bloc sur le visage de l'assaillant persuadé que sa masse corporelle pouvait l'emporter sur celle du géant. Démenti par la brutalité de l'impact, il termina sa chute, le nez en sang, entre ses deux collègues qui s'accrochèrent à leurs armes et les brandirent bien haut comme des lances acérées.

« Fais gaffe ! » hurla Yalthia en tentant de protéger le rouquin.

Deux détonations suivirent, mais Zacharie fonçait déjà vers eux. Un étrange sifflement lui déchira l'oreille. Sans y prêter attention, il joua de sa lame pour écarter les leurs qui pointaient encore derrière une épaisse fumée jaunâtre. Un coup de pied dans les rotules, quelques coups de coude bien placés et les deux hommes s'entassaient déjà au côté du plus gros qui grognait sa douleur.

Ceux qui remontaient reculèrent, les yeux écarquillés.

« Regarde-moi ces péteux ! » lança Yalthia en approchant l'intersection.

Zacharie s'y tenait déjà, pris dans les bourrasques. Lorsque le colosse arriva à sa hauteur, il balbutia quelques mots incompréhensibles. D'un côté comme de l'autre, le vide se dessinait sous leurs yeux abattus. D'un côté comme de l'autre, il n'y avait aucune échappatoire, pas une falaise, pas une montagne, pas un chemin vers la terre ferme. Seulement d'autres geôliers combattant ces étranges oiseaux.
Zacharie tremblait. Son arme improvisée lui glissa des doigts.

La hauteur, il ne la supportait pas.


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