Chapitre 4

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 Assise au bar, je grignote des cacahuètes tout en noyant ma frustration dans un cosmo. J'ai signalé à la serveuse que ma soirée était annulée mais j'ai tout de même payé l'addition, ne serait-ce que pour les récompenser d'avoir préparer les plats. J'ai le ventre trop noué pour avoir de l'appétit. J'aime Kelly. Mais, bien que j'admire son travail, il prend beaucoup de place dans notre couple. Le mien aussi, cela dit, mais beaucoup moins que le sien. J'ai peur qu'elle préfère l'hôpital à moi. Non, je ne fais pas une crise de jalousie, je respecte entièrement son métier. Seulement, je crains de ne plus la voir avec moi. Au point où on en est, elle va finir par coucher à l'hosto, carrément.


- Salut ma jolie.

Je me tourne vers l'homme qui vient de me parler. La voix rendue rauque par des années de tabagisme, il sent l'alcool à plein nez. Bon, il a un coup dans le casque, déjà. Il est à peine 21 heures.

- Désolée, je ne suis pas intéressée.

Je me tourne dos à lui, histoire de bien lui faire comprendre que je ne passerai jamais une nuit avec lui et bois une gorgée de mon cocktail. Encore un truc qui m'énerve avec les hommes. Dragueurs et tellement prévisibles ! Ce qui n'est pas du tout le cas avec les femmes qui, elles, sont plus subtiles et délicates.

- Même pas pour une petite salsa ?

Sa voix s'est dangereusement rapprochée de mon oreille et je me raidis. Je ne peux empêcher des souvenirs douloureux d'il y a cinq ans de remonter à la surface. Max me murmurant à l'oreille, tout comme le fait cet homme en ce moment, à quel point je suis bonne et étroite alors qu'il me sodomisait sans aucune douceur, ne se souciant guère de mes larmes de douleur. Ressaisis-toi, bordel de merde. Tu n'es plus Lucie. Tu es Lana. Tu n'as plus peur des hommes, me rappelle sagement ma conscience, ce qui me rassure quelque peu. J'avale ma dernière gorgée de cosmopolitan avant de me tourner vers ce gros pervers.

- Retourne cuver ta bière ailleurs ou je te jure que je te fais bouffer tes couilles, le menaçé-je.

Puis je me lève du tabouret et marche vite en direction du parking. Je risque un coup d'oeil derrière. Le mec est toujours assis au bar et bois sa bière. C'est bon, il n'insiste pas. Heureusement pour moi, Kelly a préféré me laisser la voiture pour rentrer et a pris un taxi, ce qui m'évite de devoir attendre dans la nuit noire. Encore heureux que je n'ai pris qu'un verre. Pff quels bande de connards ces mecs ! Je peste intérieurement lorsque, dans ma précipitation de rentrer vite me mettre au chaud dans un bond bain moussant, je fais tomber mes clefs devant la portière de la voiture. Je m'accroupis pour les ramasser et au moment de me relever, je sursaute en apercevant dans la vitre le reflet du relou du bar, posté maintenant derrière moi. Je n'ai pas le temps de pousser un cri qu'il m'attrape violemment le bras et me retourne avant de me plaquer dos contre la carrosserie. Le choc est tellement rapide et douloureux que j'en ai le souffle coupé. Le mec, visiblement bien éméché, me serre les joues, rapproche son visage du mien et me souffle de son haleine fétide.

- On ne me tourne pas le dos, à moi. Salope !

La gifle part tellement vite que je ne la vois pas venir et je tombe à genoux. Aussitôt, les souvenirs que je m'étais pourtant jurer d'enterrer à jamais défilent dans ma tête et me poignardent le cerveau tels des coups de couteau à répétition, ouvrant la plaie fragile de mon cœur. L'homme m'allonge par terre et je suis tellement en train de me noyer dans mon enfer passé que je ne pense même pas à me débattre. Max me faisant voler à travers la table. Max me ligotant et me baillonant au lit pour pouvoir me violer et me fouetter jusqu'au sang sur le ventre.

Juste une nuitWhere stories live. Discover now