Chapitre 9

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C'était bel et bien Olaï, le Meneur du clan ennemi. Malgré la pénombre régnant sur la forêt, Ivella le reconnut aussitôt, avec son air dégageant une férocité à toute épreuve. Elle essaya d'adopter une attitude convaincante et courageuse.

- Non, répondit-elle après un long silence.

Olaï la regarda, assez ébahi qu'elle lui tenait tête. Il gonfla sa poitrine d'un air menaçant, en lui jetant un regard noir.

- J'ai le regret de..., débuta-t-il d'une voix qui voulut être enjouée

Tout d'un coup, une puissante bourrasque expulsa Ivella sur un tronc d'arbre, Olaï se déplaça rapidement vers elle, et la retint violemment par sa gorge. Ivella pendait dans l'air, elle se débattait pour sortir de son emprise, ses doigts fins tentaient vainement de blesser la main qui la tenait en otage.

- De tuer chaque être de ta tribu, en commençant par cette Pelir, finit-il d'un ton comminatoire, elle aura une mort douloureuse et une agonie longue...très longue.

Ivella suffoqua à l'écoute de ces paroles. Olaï regarda sa proie, avant de la lâcher par terre, comme un vulnérable insecte. La jeune fille réfléchissait rapidement à la situation: rien ne lui prouvait la franchise de ces propos. Mais elle ne pouvait pas risquer la vie de toute sa tribu. Elle s'était perdue en chemin, et elle est la Meneuse de son clan. La responsabilité de tout son clan retombe entièrement sur elle.

Olaï était de dos, Ivella se releva, déterminée. Elle poussa un long soupir avant de dire: « Je viens avec toi »

A peine qu'elle dit ces mots, qu'Olaï l'attrapa de la taille et elle sentit une profonde douleur. Sa vue se brouilla, et eut l'impression que ses membres s'arrachaient. Elle éprouva plusieurs haut-le-cœur, avant d'atterrir enfin dans une petite pièce, uniquement éclairée par une fenêtre, rendue opaque par un rideau de pluie. Le martèlement de plus en plus intense de la pluie se mêlait aux hurlements du vent, créant ainsi une atmosphère encore plus terrifiante. Un coup de tonnerre ébranla les vitres, et le ciel nuageux fut traversé par d'un éclair. Ivella remarqua alors un corps, recourbé sur lui-même, sanglotant doucement, parcouru de plusieurs soubresauts. Il s'agissait d'Olaï, dans un état piteux. Ivella le regarda, ne sachant que faire. D'un coup, il se cambra, et hurla si fort que sa gorge semblait sur le point de se déchirer. Il s'efforça de se lever, mais ses jambes flageolantes cédèrent sous son poids. Plus le temps passait, Olaï perdait la couleur de son teint, ses yeux normalement bleus pétillants étaient maintenant vitreux, sans couleur.

Ivella s'élança sur le corps gisant. Elle était complètement effarée. De plus proche, elle pouvait remarquer certains détails, comme les gouttes de sueurs perlant sur le front du garçon ou encore écouter sa respiration pantelante, qui se faisait de plus en plus rapide. Il entamait déjà une autre crise. La douleur lui arrachait d'effroyables hurlements, son corps fébrile était dévoré de spasmes. Ivella le tint par le col de sa chemise, et lui donna une gifle. Olaï hoqueta un peu, puis son souffle s'apaisa doucement. Ivella lui donna une autre claque, au cas où.

« Ça fait vraiment mal, s'écria enfin Olaï, en massant sa joue endolorie.

Ivella regretta aussitôt son acte. Elle ne devait pas l'aider, ni le sauver. C'était son ennemi. Quelques instants plus tôt, il était en train de la faire marchander, menaçant de tuer tout son clan. Et maintenant, il lui adressait un sourire timide. Quel hypocrite ! Elle ne se laisserait pas faire. Tous les hommes étaient profitants et hypocrites, comme son père. Elle était répugnée par sa faiblesse, elle était trop sentimentale, pas assez forte moralement.

La jeune fille se crispa devant les yeux d'Olaï, elle sentit une douleur cuisante au niveau de son cœur, comme s'il se fendait en deux morceaux. Elle essaya de ne rien montrer, afin de ne pas paraitre faible.

- A quoi tu joues, Olaï ? demanda-t-elle avec fougue

- Moi ?! Mais je ne fais absolument rien ! S'exclama-t-il

Ivella sentit s'accroître son malaise. Elle s'assit par terre, tremblante. Elle avait perdu tout contrôle de son corps, et de son esprit. Elle fut prise par des nausées, et son esprit s'embrumait, cédant à cette douleur. Elle avait raison, tous les hommes étaient identiques. 

Ivella se retrouva dans un couloir sombre, mais familier. Devant elle figurait une petite fille, il s'agissait d'elle, lorsqu'elle avait cinq ans. Elle était si fragile, avec ses grands yeux noisette, et ses cheveux noirs jais, à l'époque, ils étaient très courts. Elle voulut les toucher, mais sa main s'enfonçait dans la brume. Ivella comprit alors qu'elle était une simple spectatrice. Lirov, son père était devant elle, étourdi. Il avait encore bu, et s'approcha de la petite Ivella.

« Papa ! Tu me serres trop fort » se plaignit la jeune enfant, en se tortillant de tous les côtés. Anizel, la mère d'Ivella, accourue aux cris.

« Lirov, lâche ma fille tout de suite ! » fulmina-t-elle.

Ivella regarda sa mère et ne put empêcher quelques larmes, elle lui ressemblait tellement, elles avaient beaucoup de caractères en communs. Elle était debout, avec ses traits durcis et son tablier de cuisine bleu ciel. Elle attendait l'exécution de son époux. Ce dernier fit volte face et avança d'un pas lourd vers Anizel.

«  Tu crois que tu nous fais honneur, en rentrant ivre tous les soirs ? Tu ferais mieux de t'effacer de notre vie.

- Tu sais que tu peux vraiment être lourde, Anizel ?

- Fous le camp de chez moi, fulmina-t-elle

Elle ne vit pas arriver le premier coup. Son époux la battait, et l'alcool l'aveuglait, facilitant sa tâche. Des gémissements de douleurs commencèrent à se faire entendre. Le sang d'Anizel giclait partout, mais Lirov voyait rouge. Il voulait lui faire regretter chaque mot, il la battait, sans merci, sous les yeux ébahis de sa petite fille. Elle n'osait bouger, la peur l'avait tétanisé. Elle rassembla son courage et cria de sa petite voix :

« Papa arrête, s'il te plaît »

Le père l'ignora, et continua de battre sa femme.

« Papa... » Supplia-t-elle encore, avant d'éclater en sanglots

Agacé par les cris de sa fille, Lirov lâcha enfin sa femme. Ivella accourut vers sa mère, corps inerte baignant dans son sang.

« Ivella, écoute-moi. Je vais bien. Promets-moi de bien prendre soin de toi, tu trouveras quelqu'un de bien, pas comme ta pauvre mère. Sois serviable, et toujours joviale, ne perds jamais ton sourire. Jamais »

Tel fut les derniers mots que prononça Anizel. Ivella compris qu'elle était...morte. Revivre cette scène était très pesant. Elle était morne, fatiguée, vide. Elle voulait pleurer, mais elle n'arrivait pas. Sa tête tournait, en même temps que le décor. Elle se retrouva couchée, dans une pièce uniquement éclairée par la lumière du soleil. Olaï était près d'elle, étirant un simple sourire. Ivella se leva d'un coup menaçant le jeune garçon de son poignard.

« Tu ne peux pas me faire ça ! De quel droit oses-tu fouiller dans mes souvenirs et ma vie privée ? » Hurla la jeune fille, hors d'elle. 

Olaï la regarda droit dans les yeux, et la fixa intensément en disant :

« Je peux te jurer que je n'ai rien fait »     
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Ce chapitre devait être poster depuis longtemps, mais bon, l'essentiel c'est qu'il soit là. Je sais je suis trop sadique, et j'aime voir mes personnages souffrir. Donnez moi vos avis et partagez.
Grosses bises❤



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