Jacob Bellay

101 23 47
                                    

"N'oubliez jamais ceux qui vous ont tendu la main, ne délaissez point ceux qui rendent agréable votre quotidien." R.G





- Pourrais-tu être plus ponctuel pour les shootings Jacob ?!

Edward essayait tant bien que mal de rattraper Jacob qui prenait plaisir à accélérer le pas.

C'était presqu'hilarant de voir le bonhomme balancer ses mains d'avant en arrière pour prendre son élan.

Edward était un petit homme bedonnant au beau milieu de la cinquantaine qui pensait que porter des lunettes de soleil et des baskets avec son costume le rendrait plus... jeune et refusait tout raisonnement contraire.

Tout en continuant sa course et sans un regard pour Edward, Jacob lui lança:
- Bien sûr que je pourrais, mais tu sais déjà, j'ai la flemme de me lever tôt.

Jacob aimait ce petit sentiment de pouvoir qu'il avait sur Edward et sa boîte, il ne faisait que dix petites heures, pas la peine d'en faire un drame.

Il savait pertinemment qu'Edward ne pourrait le virer, c'était en partie grâce à lui que ses affaires florissaient.
Logiquement Edward était le patron, mais c'est lui qui faisait rentrer les liquidités.

Le regard fier, il traversait la salle, les mains dans les poches de son pantalon dont le tissu épousait à la transcendance son arrière-train impeccablement musclé, Edward sur ses talons.

Derrière son bureau la réceptionniste l'admirait sans gêne, il suscitait constamment ce genre de regard sur son passage, surtout près de la gente féminine.

Car couramment, il était accosté par des hommes, qu'il envoyait balader plaisamment, comme le disait si bien le grand Sigmund Freud " on sait , en effet qu'en plaisantant on peut tout dire...même la vérité".

Non il n'était en aucun cas homophobe, mais préférait plus agréablement l'idée de la saucisse dans le pain.

Lorsqu'il arriva à la hauteur de la jeune femme, il lui fit un clin d'œil, et toute excitée, elle se mordit la lèvre.

Une fois disparu de son champ de vision, il roula des yeux, elle serait naïve de penser qu'il pourrait un tant soit peu intéressé par elle. Mais inutile de lui ôter un fantasme.

Certaines le pensaient après un petit flirt de rien du tout, alors que tout ce qu'il recherchait c'était trouver un allié sûr, hormis sa beauté appolonnienne .

Elle était belle sans doute, toutes les femmes l'étaient. Seulement il avait ses préférences, et elle n'en faisait pas partie tout bonnement.

Edward n'avait rien perdu de la scène. Il trouvait désespérant qu'une femme puisse avoir des yeux sur un homme comme Jacob, " si on pouvait le qualifier d'homme même".

Pour lui, c'était un gamin de trente deux ans, complètement immature, avec des atouts particulièrement enviables et une bourse bien garnie.

Jaloux ? Non il ne l'était en rien. De son temps, il avait marqué les esprits lui aussi, et ça ne lui avait rien apporté, sinon une tonne d'ex, qui lui rappelait à quel point il avait mal vieilli.

Mais qu'y pouvait t-il si l'âge avait eu raison de son torse jadis parfaitement sculpté ?

- Le photographe t'attend depuis une heure, il a failli partir, et Dieu seul sait, par quels moyens on aurait pu dénicher quelqu'un d'autre.

- Ça va Edward, relax, je suis là maintenant et le photographe aussi est là, bah tu en as de la chance, mon vieux.

Il lui donna une petite tape amicale sur le bras. Jacob savait qu'il ne se fâcherait pas, certains jours il lui faisait pire que d'arriver en retard.

De toutes les façons, ce n'était en rien de sa faute si le réveil n'avait pas sonné à temps, et que par conséquent, il ne pouvait en aucune façon, négliger sa séance sportive matinale.

Franchement, ces gamins.

Le photographe, un petit roux, entamant la quarantaine, se tenait dans une pièce adaptée au thème du shooting.

Ce matin, il avait reçu un appel d'Edward, qui lui disait de passer à neuf heures, il avait fait aussi vite que possible, et dès neuf heures, il se tenait dans ce petit studio.

Il commençait à s'impatienter, il avait passé plus qu'un quart d'heure assis sur ce tabouret sans avoir grand chose à faire.

La pièce était déjà rangée, sa caméra avait été bien réglée, il ne manquait plus que son modèle.

À neuf heures cinquante, il s'était résolu à partir, mais par les supplications d'Edward, il patienta encore un peu, d'autre en plus qu'Edward payait lourd pour ses services.

Lorsque la porte s'ouvrit, il se leva en hâte. Devant lui se tenait un Edward désolé, et l'autre, devait sûrement être le modèle qu'il attendait.

- Désolé Parker, voici Jacob notre modèle, il a eu un...

Sans lui laisser finir, Jacob s'installa sur le tabouret, qu'il devrait sans doute utiliser pour l'une des prises.

- Assez parlé de moi chers amis, nous pouvons commencer.

Parker se tourna vers Edward et pointa Jacob du doigt.
- Ravi de faire affaire avec ce mec là.

Puis se dirigeant vers son appareil, il ajusta un peu la lumière et fit tourner légèrement le ventilo pour faire bouger ses cheveux souples ce qui ferait ressortir l'essence vitale des photos.

Jacob était un habitué des caméras, il savait ce qu'il faisait, tout lui allait, il posait pour toutes sortes de marques et participait même à des défilés.

Il pouvait quitter la boîte d'Edward s'il le voulait, il avait déjà un nom dans le secteur et beaucoup de contacts, mais Edward était comme une famille pour lui.

Il n'avait jamais connu ses parents et a passé son enfance dans des centres d'accueil, où il n'était pas trop apprécié des autres orphelins.

Lorsqu'il a connu Edward, il n'était pas encore celui qu'il était devenu aujourd'hui.

Il fouillait les poubelles, se droguait à en perdre la raison et fréquentait les mauvaises personnes.

Un jour alors qu'il traversait une mauvaise passe de son quotidien impitoyable, il voulait commettre l'irréparable.

Et comme si la vie désirait lui accorder une seconde chance, il avait rencontré Edward dans un café, juste avant le grand saut.

Intrigué par toute cette essence qui émanait de ce jeune homme misérablement vêtu, Edward voyait en lui le futur de sa boîte.

À partir de ce jour, Edward l'avait pris sous son aile, et jamais plus il n'avait manqué de rien.

Oui la boîte d'Edward prospérait grâce à lui, mais il devait tout à cet homme, qu'il considérait comme le père qu'il n'avait jamais eu.

Sans lui, il séjournerait aujourd'hui dans les méandres du monde d'Hadès.

Eden Island Where stories live. Discover now