Station 19 : Le goût de vivre

Chapitre 14

Quelques semaines plus tard

Les jours et les semaines se passent et se ressemblent. L'ogre qui a pris possession de mon utérus me rend complètement marteau.
Je ne me reconnais plus. Un rien m'énerve. Je me plains tout le temps, j'ai tout le temps faim et je crois que j'ai effrayé mes amis et ma famille.
Bon j'avoue je ne suis pas facile et je crois que mon côté italien ressort beaucoup quand je suis enceinte, peu de personnes osent encore me dire quelque chose, ils ont tellement peur de moi qu'ils préfèrent m'envoyer ma sœur. Dans d'autres circonstances, cette situation serait assez ironique.

***

Un juron s'échappe de la future chambre de mon enfant. Carina, qui me tenait compagnie, se retourne et laisse s'échapper un rire

Carina : pensi che dovremmo andare a vederlo (tu crois qu'on devrait aller le voir)
Vita : puoi andare se vuoi, ma io al tuo posto, non ci andrò. Non ho voglia di prendermi un martello in faccia (tu peux y aller si tu veux, mais moi à ta place, je n'irai pas. Je n'ai pas envie de me prendre un marteau dans la figure)
Carina : smettila, è un chirurgo, non può essere così imbarazzante (arrête, c'est un chirurgien, il ne peut pas être aussi maladroit que ça)
Vita : stiamo parlando di Andrea, quello stesso Andrea che si è colpito le dita con un martello. (on parle d'Andrea, ce même Andrea qui s'est tapé les doigts avec un marteau.)
Carina : bene resta lì, andrò a vedere (bon reste là, je vais aller voir)
Vita : dove vuoi che vada? (où veux-tu que j'aille ?)

Carina se lève et se dirige vers notre frère. Je profite de leur absence pour aller dans la cuisine et nous préparer quelque chose à manger. J'essaie d'aller assez vite. Je n'ai pas envie d'avoir encore une leçon de morale de ma sœur qui me dit que je dois faire attention et que je dois ralentir.
Après avoir disposé ce que j'avais préparé sur un plateau, je ramène le tout dans le salon et je me réinstalle comme si de rien n'était. Carina revient quelques minutes plus tard.

Vita : allora credi che mio figlio avrà un giorno una stanza pronta? (alors tu crois que mon enfant aura un jour une chambre prête ?)
Carina : Francamente, non so perché gli è stato chiesto di montare i mobili (franchement, je ne sais pas pourquoi on lui a demandé de monter les meubles)
Vita : peut-être, parce qu'il était là, quand on a parlé qu'il s'est proposé.
Carina : on aurait peut-être demandé à Jackson, Travis ou Maya nous aider parce que là je ne suis pas sûr que ton enfant ait un jour une chambre.

Je gémis, lève les yeux au ciel. J'adore mon frère vraiment, mais il n'est pas, mais alors pas du tout manuel. Carina pose les yeux sur la table basse et me lance un regard noir.

Vita : cosa? (quoi ?)
Carina : non dovresti riposare, tu? (tu n'es pas censé te reposer, toi ?)
Vita : è quello che faccio (c'est ce que je fais)
Carina : e mi dirai che tutto questo (et tu vas me dire que tout ça) (pointant la table basse) , si è messo da solo (ça s'est mis tout seul)

Je hausse les épaules. Carina pousse à long soupir avant de se réinstaller dans le canapé.
Un peu plus tard dans la journée, Andrea nous rejoint dans le salon. Il s'installe entre Carina et moi.

Vita : alors ça y est, c'est fini ?
Andrea : disons que je vais faire appel à des amis pour finir demain si ça te va, bien sûr.
Carina : tu n'as pas réussi à les monter alors tu as demandé à Jackson ou quelqu'un d'autre de venir t'aider, c'est ça ?
Andrea : on peut dire ça, oui

J'éclate de rire et mon frère me lance un regard noir. Je me relève avec les difficultés et je me dirige vers ma salle de bain. Quelle idée d'avoir demandé à Andréa de monter les meubles de la chambre. Je suis sûr que même moi enceinte de trente-trois semaines, j'aurais pu le faire. Sur le chemin entre ma salle de bain et mon salon, je sens des douleurs dans mon ventre. Je m'installe sur mon canapé, la douleur se faisant plus forte.