Chapitre VII : Le temps des regrets

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De nombreuses semaines s'étaient écoulées depuis le départ de Lyra pour le domaine d'Ormeron. Comme chaque jour, Elwynn passait devant la librairie de Monsieur Paginaut avec un pincement au cœur, il n'avait pas encore trouvé le courage de franchir le seuil de la petite boutique.

Il attendait impatiemment la réponse de son amie, espérant y trouver une nouvelle réconfortante. Pendant ce temps, l'état de santé de Joran se détériorait, les différents traitements prescrits par les médecins s'étaient tous soldés par des échecs. Elwynn avait placé ses espoirs dans la venue de Lyra, persuadé que sa présence pourrait être le remède miracle tant attendu.

Lyra mit le point final à sa lettre et dans sa lancée, se rendit au bureau de Madame Ordonon. Elle frappa doucement à la porte et tendit l'oreille :

« Entrez.

En entrant dans la pièce, Lyra lutta pour ne pas faire demi-tour, tant l'atmosphère qui y régnait était oppressante. L'intendante, penchée sur son bureau, remplissait méticuleusement un livre de comptes un crayon à la main. Elle lança un regard furtif en direction de la jeune femme avant de retourner à son activité.

- Que voulez-vous, Mademoiselle Artelis ?

Le ton sec de Madame Ordonon résonnait dans la pièce, crispant Lyra.

- Bonjour, Madame. Je viens demander votre autorisation pour me rendre à Parnassie quelques jours.

Son interlocutrice releva la tête et l'observa quelques secondes avant de répondre :

- Vraiment ? Vous voulez prendre congé alors que vous n'êtes ici que depuis quelques semaines ?

- Ce n'est pas... J'ai un ami qui est très malade, je veux me rendre à son chevet.

Madame Ordonon poussa un long soupir avant de répondre d'un ton irrité :

- Le moment est très mal choisi, de gros travaux nous attendent, nous devons préparer le retour du Comte et de la future Comtesse. De plus, nous n'avons pas pour habitude d'autoriser le personnel à s'absenter de manière inopinée. Imaginez si chacun faisait comme vous ? Le domaine ne tiendrait pas plus d'un mois !

- Il ne s'agit que de quelques jours, le temps de m'assurer de son état de santé.

- Vous demandez mon autorisation et je vous la refuse. J'ai besoin de vous ici, s'agaça Madame Ordonon.

Lyra, fébrile, se risqua à poursuivre :

- Le Comte et la Comtesse ne seront pas de retour avant plusieurs semaines. Je vous promets de travailler deux fois plus à mon...

- Il suffit ! Je ne reviendrai pas sur ma décision.

Madame Ordonon retourna à son livre de comptes, ignorant Lyra. La jeune femme, sur le point de partir, se ravisa.

- Eh bien, je me vois donc contrainte d'aller à l'encontre de votre directive, Madame.

- Mademoiselle Artelis, commença-t-elle en posant son crayon à côté du grand cahier, écoutez-moi bien, si vous quittez le domaine sans mon autorisation, ne vous donnez même pas la peine de revenir. La discussion est close. Retournez immédiatement à votre poste. »

La jeune femme quitta la pièce en silence, les poings serrés. Sa décision était prise : rien ne l'empêcherait de retourner à Parnassie.

Plus tard dans la matinée, elle attendit que le coursier remonte l'allée du domaine et lui confia la lettre au dos de laquelle on pouvait lire d'une écriture impeccable : « Elwynn Prerya, Parnassie ».

Le Chant De La PluieWhere stories live. Discover now