*chapitre 13*

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Contrairement à l'aller, le bus dans lequel Douta est monté est beaucoup plus bruyant. Par chance, il a pu obtenir une place car il y'avait une absence. A côté de lui était assis une femme de la trentaine environ avec un bébé. Quand la mère voulait faire ou chercher quelque chose, elle n'hésite pas à déposer son bébé sur les jambes de Douta sans même demander sa permission. Il ne disait rien, mais pensait que c'était pas poli d'agir de la sorte. Il tenait le bébé pendant ces moments et jouait un peu avec lui. Derrière là où il était assis se tenaient deux vieilles femmes qui élevaient la voix quand elles se parlaient. Aucun moyen qu'elles parlent doucement, sûrement elles ont des problèmes d'ouïe. Devant lui étaient assis deux enfants, un garçon et une fille qui se chamaillaient sans cesse. Ils se dénonçaient toujours auprès de leur mère qui était assisse de l'autre rangée. Celle-ci n'hésitait pas à montrer sa main en signe de gifles si on la pousse à bout. Un peu plus devant, on entendait un groupe d'hommes discuter et rire bruyamment, des vieillards parlaient au téléphone à haute voix ainsi que la radio du bus qui émettait du "mbalax" auxquels certaines femmes gesticulaient et tapaient des mains. Douta posa sa tête sur la fenêtre et observa les endroits qu'il traversait au fur et à mesure que le bus avançait. Le voyage risque d'être long et bruyant.

Ce séjour au village sera un très beau souvenir. Grâce à ses cousins, il a pu connaître davantage de monde et a réussi à gagner la sympathie des concessions. Il était bien accueilli partout où il allait. Il n'hésitait pas à se rendre disponible pour quiconque a besoin de quelque chose ou pour faire un travail. Il a assisté à certaines événements du village : Les "navetanes" (tournois de foot pendant l'hivernage), les soirées organisés par les jeunes, les "simb gaïndé" (faux lion), et pleins d'autres loisirs. Il s'était bien amusé et avait oublié pour un temps ses problèmes à la ville. La veille de son départ on avait organisé une danse autour d'un feu en son honneur dans sa concession. Il était vraiment ému par la gentillesse de sa famille. L'oncle Arfang lui avait dit que le dernier sejour de son père s'était déroulé ainsi. En effet son père les a beaucoup aidés en matériel pour l'agriculture et en reconstruisant leurs logements. Lui aussi, a eu droit à une danse autour du feu pour lui faire honneur. Le fils aussi doit avoir droit à cela, pour son honneur et pour rendre fier le père car lui aussi a été là pour eux. Douta a réussi à convaincre son oncle de venir a Dakar pour se soigner et qu'il fera tout pour l'aider financièrement. Il ne reste qu'à attendre la fin de la récolte pour qu'il puisse venir. Il était content de la nouvelle et s'était promis de tout donner pour que son oncle soit dans de  bonnes conditions quand il viendra. Sa mére n'aura aucun problème à l'accueillir, elle respecte beaucoup l'oncle Arfang.

Entre temps, la plupart des passagers se sont endormis. De l'autre côté des sièges, on apercevait un homme, bouche ouverte, entrain de ronfler doucement. Un jeune homme qui était a côté de lui prit son téléphone et le filma en cachette. Puis il se mit à rire en mettant sa main sur la bouche. La nuit était apparu et l'absence de soleil avait favorisé le sommeil. Il faut noter aussi qu'après tant de bruit, les passagers se sentaient extenués. Quant à Douta, il avait les jambes lourdes et s'empressait pour rejoindre sa demeure au plus vite. Malgré le calme, il n'arrivait pas à dormir et penser sans cesse à son avenir. Quelques petites villes traversés, un court arrêt, et sa joie quand il aperçut les lumières de Dakar et qu'il va bien pouvoir se reposer.

La lumière du soleil s'infiltra par la fenêtre dans la chambre de Douta, pile où ses yeux étaient situés. Il eût du mal à ouvrir ses yeux et se voilà la face avec la main à cause de cette lumière éblouissante. Il se tourna du côté opposé et fixa pendant un moment le ventilateur. Il se leva, s'étira et partit prendre une douche. A sa sortie, il vit Amary assis sur le salon, le visage baissé, les poings serrés.
- Amary, pourquoi tu es rentré de l'école sitôt ?
Amary hésita à répondre, puis décida finalement de le faire.
- on m'a renvoyé, dit-il lentement
- renvoyé ? Demanda Douta, et pourquoi ?
Amary est un peu turbulent mais jamais il n'a été renvoyé. Douta s'assis sur le fauteuil en face en attendant une réponse.
- je suis assis derrière avec un groupe de garçons qui passent tout le temps à bavarder ou à jouer a des jeux vidéos. Mais moi je suis plutôt du genre à me concentrer donc je ne suis pas vraiment leurs délires car j'estime que c'est une perte de temps. Cependant, quand les professeurs en ont assez, ils nous renvoient tous, moi y compris, ou nous donnes de tas d'exercices. J'acceptais la punition sans broncher. Mais là je n'en peux plus, et j'ai commencé à contester les décisions des professeurs, surtout celui qui était le plus sévère d'entre nous, le professeur de français. Il m'a traité d'impoli, et que  si je continue je risque d'être exclu de l'école. Je lui ai dit que ça serait injuste de faire ça puisque j'ai rien fait de mal. Là il était vraiment énervé et à dit que mes parents ne m'ont pas éduqués et que mon impolitesse doit rester à la maison et ne pas l'amener ici. En ce moment j'étais humilié devant mes camarades et j'ai craqué. Je lui ai dit que lui il était pire car son fils je le connaissais et je lui ai dit toutes les bêtises qu'il faisait. A ce moment la classe était dans la stupeur et tout le monde se lançait des regards. Mr Sarr (le professeur) était à bout. Il a ôté ses lunettes et voulait en découdre avec moi. Mes camarades renvoyés m'ont entraîné dehors pendant qu'il me lançait des menaces. Puis le directeur m'a appelé, et m'annonça que si je n'appelle pas un parent, je ne serais plus le bienvenu dans cet établissement.
Douta comprit la situation, mais lui reprocha le manque de respect qu'il a eu envers le professeur.
- quoiqu'il en soit, t'aurais pas dû dire ceci à M.Sarr, tu devrais te plaindre à la direction. Écoute Amary, ne rentre plus jamais dans ce genre de choses, ton avenir en dépend. C'est compris ?
Amary hocha la tête. Douta poursuivit.
- bon attends que maman revienne, tu lui expliquera la situation et vous irez ensemble.
- non Douta, je ne veux pas qu'elle sache, elle ne va pas comprendre. Elle sera là à tout me reprocher, tu sais qu'elle sera pas de mon côté, quoique je dise.
Il hésita. Il voulait pas cacher ceci à sa mère.
- bon d'accord allons à l'école, mais je lui dirais à notre retour.
- non Douta, insista Amary, je veux pas non plus qu'elle sache après. Je veux que ça reste notre secret, entre frères, s'il te plaît.
Douta se résigna finalement.
- j'espère que ça sera le dernière fois. Je veux pas cacher ces choses à notre mére, tu comprends ? Je ne veux non plus que tu te fasses renvoyer, plus jamais, compris ?
Douta parlait avec fermeté et Amary lui promis que plus jamais il sera à nouveau renvoyé. Au même moment, Omar passa et s'apprêtait à sortir. Il vit ses deux cousins assis, les salua et demanda a Amary.
- pourquoi tu es ici à cette heure ?
Amary serra les poings, le regarda d'un air menaçant.
- cela ne te regarde...
- Amary ! Tonna Douta
Amary se tut. Douta le fixa d'un regard avertissant. Omar ne comprenait pas la situation. Il haussa les épaules et s'en alla.
Douta comprit qu'il y'a quelque chose qui va pas avec Amary ces derniers temps. Il ne sait pas encore ce que c'est mais le sens au fond de lui. Son petit frère devra lui donner des explications.

Le chemin de l'EldoradoOù les histoires vivent. Découvrez maintenant