La Princesse d'Argent - Partie I

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"And I'd choose you; in a hundred lifetimes, in a hundred worlds, in any version of reality, I'd find you and I'd choose you."

Kiersten White, 'The Chaos of Stars'

Le mensonge, tout comme la trahison, était une chose terrible. Il s'enracinait, s'engluait, et au fil des années, on venait parfois à l'oublier, on préférait fermer les yeux, se faire croire qu'en réalité, il n'en était pas un.

            Maria Eléazar, ma grand-mère adorée, ma mère, m'avait menti toute ma vie. En plus de m'avoir abandonnée aux mains d'hommes et de femmes cruels, elle m'avait caché mes origines, mon passé et une partie de mon héritage.

            Ivoirienne. Argent.

            Qui étais-je ?

            Cette question disparue de mon esprit lorsque je vis Seth.

            Je ne vis que ses grands yeux verts tournés vers moi.

            Je ne vis que lui.

            Je me mis à pleurer et tombai dans ses bras.

            Je sentis qu'on me prenait Hélios des bras. Je ne résistais pas. Je me laissai tomber de tout mon poids contre Seth.

            Il murmurait, chuchotait à mon oreille.       

            Je n'entendais pas ce qu'il me disait. Mais il était là. Je sentais la force de ses bras, des muscles de son torse et l'odeur de sa peau.

            J'avais retrouvé mon souffle, mon équilibre, mon centre de gravité.

            Seth.

            Je pleurais sans m'interrompre.

            Des minutes, heure, jours passèrent.

            Seth restait toujours là, debout, fixement ancré au sol, me tenant fermement dans ses bras.

            Je n'aurais jamais dû le quitter.

            Rien n'avait de sens sans sa présence.

            Lorsque mes sanglots tarirent et que me larmes devinrent moins abondantes, je relevai la tête.

            Je remarquai alors tous les détails qui m'avaient échappé : sa maigreur, les plis soucieux sur son front, sa barbe, ses cheveux plus noirs et emmêlés que jamais, et enfin sa pâleur. Après des mois passés enfermé dans les prisons de la Tour, le Roi Émeraude avait perdu toutes couleurs. Mais ses yeux n'avaient pas changé. Toujours aussi verts, toujours cerclés de cet éclatant anneau d'or. Toujours cet air majestueux, immuable, fort.    

            La dernière fois que nous nous étions vus, ses prunelles étaient chargées de déception, de colère et de dégout. Aujourd'hui, je ne vis qu'amour, peur, chagrin.

            -Pardonne-moi, soufflai-je, la voix enrouée. Pardonne-moi.          

            Il caressa lentement ma joue.

            -Il n'y a rien à pardonner. Je suis là, tu es là, c'est l'essentiel.

            D'autres larmes s'échappèrent de mes yeux, de soulagement cette fois.

            -J'aurais dû être honnête avec toi dès le début, insistai-je d'une voix rauque.

            -Oui, mais je comprends pourquoi tu ne l'as pas fait.

La Tour d'Ivoire - Tome 3Où les histoires vivent. Découvrez maintenant