Dernier souffle - Partie II

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« Quelle erreur pour une femme d'attendre que l'homme construise le monde qu'elle veut, au lieu de le créer elle-même. »

Anais Nin.



-Tu peux te relever Ilyana, dit-il d'un ton sec.

            Plus aucune trace d'angoisse n'était visible sur le visage de la jeune fille. Elle souriait, l'air tranquille.

            Ayaan ne l'aimait pas. Il se souvenait que trop bien d'Anna, et Ilyana appartenait à une famille de rebelle. Il se méfiait d'elle. Mais la jeune fille était intelligente, et ne laissait rien transparaitre. La moindre erreur lui serait fatale et elle le savait.

            -Votre majesté, vous êtes là, fit Evarion, en revenant de la pièce d'à côté. Je viens tout juste d'occulter Hélios, il est en parfaite santé !

            Ayaan sourit.

            -Parfait. Vous pouvez nous laisser, à présent.

            Évariste et Ilyana quittèrent la salle, non sans m'avoir lancé un dernier regard.

            -Tu sais bien que je n'aime pas que tu passes ta journée avec cette fille, lança Ayaan d'un ton las. Sa famille n'est que racaille et traitre. Tu ne sais pas à qui va vraiment sa loyauté. Imagine qu'elle s'en prenne à Hélios.

            Je balayai sa remarque d'un revers de main.

            -Tu t'en fais pour rien. Certes, la famille d'Ilyana est... marquée par les agissements de sa sœur. Mais j'ai pitié d'elle, elle et son frère se retrouvent seuls. Vous avez assassiné le moindre oncle, la moindre tante, les moindres cousins qu'ils avaient... c'était cruel et inutile. Ne t'étonne pas qu'après ces gens se retournent contre toi. Et pour Hélios, tu sais très bien que je ne laisserais personne lui faire du mal. J'ai appris à me battre En Bas, je défendrai mon fils jusqu'à ma mort.

            Il sourit.

            -Je suis conscient que tu sais te défendre... Concernant la famille Desrose, que penses-tu que nous aurions dû faire ?

            Cela arrivait de plus en plus souvent. Ayaan me demandait ce que je pensais, ce que je ferais dans telle ou telle situation. Il me demandait conseil, il disait que j'étais plus sage qu'il ne le serait jamais... c'était loin d'être gagné, mais au moins en avait-il conscience.

            Ayaan cherchait à faire de moi la Reine que j'étais censée être. Il voulait gouverner à mes côtés, il n'avait pas menti là-dessus. Malheureusement, ces derniers temps, le caractère d'Ayaan devenait de plus en plus impulsif et violent. Il torturait, tuait et condamnait à tour de bras. Les injustices devenaient monnaie courante. Pas plus tard qu'hier il avait fait assassiner un enfant de 9 ans pour avoir osé crier « Mort aux Quatre Familles ». Je n'avais rien pu faire pour empêcher cette horreur. Mes cris, pleurs, hurlements, menaces n'avaient pas infléchi la détermination d'Ayaan. Depuis que Seth était prisonnier dans la Tour, Ayaan était devenu plus fou qu'avant. Il ne savait pas que Seth était encore en vie, Galaad me l'avait assuré, mais selon mon frère, si une partie de lui refusait de croire ce que Seth lui avait dit – que nous nous aimions – l'autre partie de lui connaissait la vérité. Jamais il n'obtiendrait de moi un amour total. Et cela, il ne pouvait l'accepter. Il passait alors par des phases de cruauté et de violences accrues, où il se moquait bien de moi et de mes sentiments, à des moments où il venait quérir des conseils auprès de ma personne. C'était à ne plus rien y comprendre.

            En attendant ma réponse, il partit dans la pièce à côté. Lorsqu'il revint, il tenait Hélios dans ses bras.

Qu'il semblait petit dans les bras d'Ayaan...

La Tour d'Ivoire - Tome 3Où les histoires vivent. Découvrez maintenant