Chapitre 21

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Alertée par la voix de Soen qui était au téléphone depuis dix minutes, Elhéa s'efforça à se lever malgré le fait qu'elle avait encore du mal à marcher correctement, à cause de la douleur qui irradiait ses muscles. Elle s'approcha du bureau de ce dernier, mais resta derrière la porte qui était à moitié ouverte.

— Viens Elhéa, prononça-t-il en dirigeant son regard vers la cachette de la jeune fille.

— Comment as-tu su que j'étais là ? L'interrogea-t-elle en s'approchant de lui.

— Ton odeur.

— Mon odeur ?

— Le parfum aux exhalaisons du jasmin ainsi que la bergamote que tu portes, reprit-il en prenant la jeune fille par la main , puis l'attira délicatement sur ses genoux. Surprise, elle ouvrit de grands yeux en se tournant vers lui pour le questionner du regard. Mais, il fit comme si de rien n'était.

— Tu voulais me parler ? Demanda-t-il au lieu de se focaliser sur les rougeurs qui couvrirent les joues de la jeune fille qui peinait à rester indifférente.

— Je pensais qu'il y avait un souci, je t'ai entendu crier, dit-elle en espérant que la tonalité de sa voix ne la trahisse pas.

— Je suis navré d'avoir perturbé ton sommeil, alors que tu peines à dormir convenablement, dit-il en longeant sa main pour effleurer la joue de la jeune fille d'une affectueuse caresse.

Elle rougit davantage lorsque son regard rencontra le sien.

— Tout va bien, j'étais déjà réveillée. Mais, toi, es-tu certain que tout va bien de ton côté ?

— J'étais au téléphone avec Harim.

— Je comprends mieux, articula-t-elle alors qu'il continuait à effectuer des caresses sur sa joue embrasée.

— Peux-tu me raconter l'histoire de la famille royale ? J'avoue que je n'y comprends absolument rien. Pourquoi n'y a-t-il pas de reine ?

— Il y avait une reine autrefois,commença-t-il. Elle a perdu son titre à la mort de son époux, le père du roi actuel.

— Comment est-ce possible ?

— Une reine perd automatiquement son titre une fois que le roi meurt, elle doit céder la place à l'héritier du roi.

— Ne peut-elle pas régner auprès du roi jusqu'au jour où il trouvera sa reine ? C'est son fils après tout.

— L'ancienne reine n'était pas la mère du roi. Sa mère était celle qui a précédé celle qui a dû céder le trône à Harim. Sa mère est morte quelques jours après lui avoir donné naissance.

— C'est triste comme histoire, je n'imaginais pas une telle histoire pour ce pays.

— Malheureusement, c'est la dure réalité de la vie.

— En effet. Mais, Harim est l'unique héritier du trône de Sry amare?

— Par sa naissance, il est automatiquement l'héritier du trône, ainsi que ses descendants. L'ordre de succession est assez complexe dans ce pays, je ne cherche pas vraiment à connaître beaucoup de choses sur la famille royale.

Elle acquiesça avant d'enchaîner avec une nouvelle question.

— Tu es pourtant un noble, tu as même du sang royal dans les veines. Pourquoi une telle indifférence ?

— Ma mère a abandonné son titre pour suivre mon père ici, je ne peux pas réellement dire que je suis un noble, corrigea-t-il.

— Mais, tu es quand même le petit-fils d'une ancienne princesse, c'est tout de même considérable.

— Tu as raison, réplique-t-il en esquissant un léger sourire. Je crois que nous avons assez parlé de royauté aujourd'hui, il est temps que tu te nourrisses afin que tu puisses prendre tes cachets, conclut-il en soulevant la jeune fille dans ses bras, soudainement pour la conduire dans la cuisine.

— Que fais-tu ? Demanda-t-elle en détournant son regard de Soen.

— Je te conduis à la cuisine, tu ne devrais pas faire tant d'efforts . Tu n'es pas complètement rétablie, mademoiselle Stein.

Elle décida de ne pas répliquer, car il avait raison.

— Je vais te faire une soupe miso, je trouve qu'il fait plutôt froid ce matin, confie-t-il en déposant la jeune fille sur une chaise.

— Crois-tu que je peux rester ici jusqu'à ton retour d'az-Zayt?

— Je pense que tu connais la réponse, répondit-il en fronçant les sourcils.

— J'ai pensé que tu aurais eu peut-être le temps de changer d'avis, renchérit-elle en fuyant le regard de Soen.

— Je ne saurai changer d'avis après ce qu'il s'est passé la première fois que j'ai fait l'erreur de te laisser seule ici, n'attends pas de moi l'impossible, trésor.

— Ce n'était pas ta faute, tu n'y étais pour rien. Tu ne devrais pas continuer à culpabiliser.

— J'ai mes torts aussi, je n'aurais pas dû te laisser seule alors que tu es vulnérable, corrigea-t-il en se rapprochant de la jeune fille. Néanmoins, j'avoue que c'est ce crétin qu'est Harim qui t'a conduit à vouloir commettre l'irréparable.

— Je ne veux pas que tu aies une mauvaise relation avec ton ami de longues dates à cause de moi, cela me dérange énormément.

— Ne te perturbe pas pour si peu, s'il faut que je le cogne encore pour qu'il comprenne qu'il y a une manière pour s'adresser aux gens, je recommencerai. Il est pour moi un frère. Néanmoins, je ne tolèrerai pas un tel comportement de sa part, même si ce n'était pas de toi dont il était question.

Elle acquiesça, sachant qu'elle ne parviendrait pas à le faire changer d'avis de si tôt. Elle peinait par ailleurs à saisir la raison pour laquelle le roi l'avait traitée de la sorte. Elle ne se voilait pas la face en se disant que le passé n'avait pas de résonance dans le présent, loin de là.

Mais, qui pouvait oser la juger ? Y avait-il un être humain irrépréhensible sur terre ?

Elle avait conclu qu'il était peut-être déçu d'avoir conduit une prostituée sur ces terres et de l'avoir protégée. Elle s'interdit donc de se sentir blessée ou offensée par les propos du roi. Elle n'était rien pour lui et elle n'était qu'une débauchée à ses yeux.

Elle ne chercherait pas  en conséquence  à prouver qu'il y avait une âme en elle, malgré son passé honteux.

— Cesse de te torturer Elhéa, n'avons-nous pas décidé que tu dois penser au présent et à l'avenir désormais ? L'interrogea Soen en la servant de la soupe miso,une recette de cuisine traditionnelle de la cuisine japonaise, de bouillon à base de miso et de dashi.

— Il s'avère que c'est bien plus compliqué que je ne le pensais.

— Je ne t'avais jamais promis que ce serait simple. Je t'ai promis de combattre tes peurs et tes traumatismes avec toi, dit-il en prenant le menton de la jeune fille dans sa main afin qu'elle le regarde dans les yeux.

— Tu as droit à une nouvelle vie, saisis-la.

Elle acquiesça, ne sachant plus ce qui était juste à dire.

— Nous partons dès cet après-midi, tu verras que ce pays va te plaire grandement.

— Je le crois si tu l'affirmas, réplique-t-elle en le regardant furtivement, empreint à de nouvelles sensations qu'elle ne connaissait point . . .

𝗠𝗜𝗘𝗟 & 𝗙𝗜𝗘𝗟Where stories live. Discover now