Interlude: les fleurs mortes dans le jardin d'hiver

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Son chagrin s'était tu et il ne versait plus de larmes lorsqu'un rire un peu trop familier résonnait à ses oreilles. Son visage avait pâli, ses lèvres s'étaient plissées et ses yeux s'étaient fait distants à la place. Il y avait maintenant une amertume mauvaise dans le ton de sa voix, et ses mots ne se faisaient pas plus doux, sa langue mielleuse. Il semblait ne plus pouvoir poser les yeux sur un autre enfant sans qu'une rage infinie ne prenne possession de lui, si triste, si seul. L'homme aux yeux d'or lui apportait son thé parfumé d'abricot, et sous les ongles de Magnolia séchait le sang qu'il faisait couler dans son affliction. Rien n'aurait pu le calmer, rien d'autre que l'enfant qu'il avait perdu pour de bon cette fois, et ainsi les jours s'écoulaient comme les saisons changeaient.

L'homme parfois poussait son fauteuil jusqu'au jardin sous sa fenêtre, fleuri au printemps, vermillon à l'automne et resplendissant au plus fort de l'été. Jamais en hiver cependant, non, jamais en hiver. Lorsque enfin le temps se faisait froid et les arbres morts, l'homme quittait le manoir et n'y revenait pas de longs mois durant dans sa quête d'un remède à la folie douce qui prenait Magnolia. Seul dans sa chambre immense et si vide, lui n'en soupirait pas. À la fenêtre il observait la neige blanche effacer les traces de vie dans le jardin que Shahi avait tant aimé. Le printemps sonnant apportait avec lui l'homme de nouveau, les mains vides. Mais il prenait celles froides de Magnolia dans les siennes pour mieux les réchauffer, et il poussait son fauteuil jusqu'à la porte du jardin.

Parmi les ancolies renaissantes et sous le cerisier en fleurs, ils restaient là des heures durant parfois, tous les deux et pourtant plus seuls qu'ils ne l'avaient jamais été. Le rossignol sur la plus haute branche se faisait beau comme la saison des amours avançait, son chant glorieux. Certains jours, lorsque les yeux de Magnolia se faisaient plus clairs, l'homme embrassait son front et tressait ses cheveux, tendre. D'autres, il les passait à ses pieds, la tête sur ses genoux. Ils ne s'aimaient plus, ne s'étaient jamais aimés, ne savaient pas comment se pardonner. Ils ne parlaient pas et sur la poitrine de Magnolia le collier d'or luisait, maladif. Dans le jardin un enfant courait entre les fleurs, traversant les buissons sans douleur et chassant les papillons.

Magnolia haïssait ce jardin. L'hiver venait.

Magnolias dans le jardin d'hiverNơi câu chuyện tồn tại. Hãy khám phá bây giờ