" Il n'y a rien de plus beau qu'un rire" Frida Khalo

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Ratayon était un groupe qui avait sous sa coupe plusieurs entreprises. Ainsi il n'était pas étonnant qu'ils aient aussi une influence sur la société de livraison qui embauchait Aéna. Ou du moins, Ratayon s'arrangea pour avoir une influence sur l'entreprise. Aéna ne revit plus jamais Jules et personne ne parlait de lui au Hub. Elle se doutait de ce que Evan avait fait dans l'ombre, sans l'informer et sans l'inquiéter. Elle savait que rien ne pourrait effacer cette sensation d'impureté qui la prenait à la gorge lorsqu'elle songeait à cette soirée.

De la pureté... C'est en lisant Mary Douglas et son analyse de l'hygiénisme que Aéna sortait de cette introspection, de ce rapport à son corps, ce rapport à la violence subie... Car oui, elle l'avait vécu comme de la violence. Une violence certes moindre que ce coups de poing qui l'avait assommée, mais une violence quand même.

Elle avait choisi de se plonger corps et âme dans ses études, abandonnant, pour un temps du moins, son job étudiant. Elle avait discuté avec Evan qui avait réussi à la convaincre de travailler pour la Meute.

Elle n'y travaillerait pas en tant que Luna. Pas en tant que compagne de l'Alpha, mais comme une étudiante lambda qui bossait pour gagner des sous...

Ses principales tâches étaient dans l'entretien du grand Manoir qu'occupait la Meute. Une équipe de Maids travaillait à temps plein, mais quelques jeunes membres de la Meute, encore plongé dans un précarité économique notable, travaillaient avec l'équipe.

L'hygiénisme, écrit par Mary Douglas, n'est pas moins magique que les règles de pureté propres à toute culture. En s'assurant que le sol du couloir n'était pas poussiéreux, lors de son heure journalière de shift dans le Manoir, Aéna s'assurait que le regard posé sur le nom Ratayon était un regard chargé de respect et d'admiration. Il se dit que l'endroit qui porte notre nom reflète notre état d'âme : la pureté hygiéniste des Ratayon donnait à ses convives l'image d'une Meute impeccable.

Il est cependant, dans les règles de la pureté, des prohibitions. Lesdites prohibitions posent sur toute personne désignée comme responsable du maintien de cet hygiénisme, une pression innommable.

Aéna savait bien que certaines des Maids ne l'apprécaient guère. Cela ne l'atteignait pas trop, elle était accoutumée au mépris et à la médisance. Alors, lorsqu'elle reçut pour tâche de nettoyer seule tout l'escalier de service, elle soupira en son for intérieur mais s'en alla accomplir sa tâche. Après tout, elle pouvait s'estimer heureuse de pouvoir jober et étudier dans un environnement aussi sécurisé que celui-ci.

Au lieu de faire cela en une heure, il lui fallut deux heures et demi pour achever le nettoyage à l'eau de l'escalier de service qui descendait sur trois étages et semblait ne pas avoir été nettoyé depuis un moment. Elle mordait sur sa chique, tentant d'étouffer sa fatigue et ses douleurs pour que Evan ne les ressente pas, ne s'inquiète pas, loin d'elle, de ce genre de tracas stupides. Elle n'avait pas envie qu'il se mette à dos des personnes qui étaient là depuis plus longtemps qu'elle... Elle avait besoin de se prouver qu'elle était capable de travailler sans se plaindre et surtout d'encaisser le bizutage qui pourrait devenir encore plus pénible si elle ne se contenter pas d'encaisser.

Lorsqu'elle rejoignit sa chambre pour dormir après avoir nettoyé l'escalier de service, elle ne prit même pas le temps de se changer, s'endormant dès qu'elle posa sa tête sur son oreiller. Le lendemain elle allait devoir commencer à étudier pour un examen hors session qu'elle avait, elle ne pouvait pas se permettre d'être trop fatiguée... La vie au Manoir Ratayon avait son lot de peine, et elle savait que tant que son statut ne serait pas officiel, cela ne pouvait pas aller en s'améliorant...

Lorsqu'elle se réveilla au chant de son alarme pour aller de laver, elle se figea sur son lit. Là, sur sa porte, on avait peint le mot " PUTE" ... En grandes lettres d'un rouge sang à la fraîcheur maladive...

Qui ?

 Quand ?

 Pourquoi?

Elle fixa la porte, l'horreur et la peine l'envahissant sans qu'elle ne puisse rien contrôler, rien garder en elle. Evan était à Berlin pour discuter d'un projet avec un partenaire économique, alors rien ne pouvait arriver pour l'instant. Elle entendit en son cœur la plainte douloureuse du loups qui se prenait un flot de peine et de honte qu'elle avait gardé derrière un barrage de complexes et de refoulements...

Elle saisit son sac à dos, dans lequel il y avait son ordinateur portable et ses syllabi, enfila un jeans et ses vans, et quitta le Manoir plus vite qu'elle ne l'eut imaginé possible. Elle appela une amie à elle en chemin, qui l'accueillit avec un café et un muffin. Elle ne pouvait pas rester au Manoir, et cela, elle l'avait bien compris. Elle ne comptait pas attendre qu'une des personnes la détestant s'en prenne physiquement à elle pour filer.

La luna en elle ne réclamait cependant qu'une chose, et elle le sentait brûler dans sa poitrine : la soumission des bêta et oméga de la meute qui avaient osé défier le lien qui la liait à Evan. Ce lien que chaque personne du Manoir ne pouvait réfuter car ils portaient la même odeur. La même aura.  

- Je vais bien, ne t'inquiètes pas. Je suis chez Nola, dis mois quand tu reviens de Berlin, écrivit-elle à Evan sur son smartphone alors que son amie était allée se changer pour qu'elles aillent toutes les deux étudier en bibliothèque.

- Je reviens dans trois jours ma Luna, j'attends avec impatience que des mots soient mis sur ce déferlement de sentiments qui ont transformé mes pupilles en pleine réunion. Din veille  de loin.

Elle sourit, rassurée. Din était le premier membre de la Meute qu'elle avait rencontré. Elle était heureuse de lire qu'il serait son garde du corps pour les jours à venir.

- On va en bibli, lança tout sourire son amie qui sortit de sa chambre, habillée et coiffée.

- A te voir tu vas à un procès et pas en cours, ria Anéa en renfilant ses vans, pour sortir, suivie par Nola.  Celle-ci ria de sa remarque, disant :

- Pas besoin d'aller à un procès pour porter une belle blouse ou un blaser enfin !

- Fashion victime oui haha !

La journée s'annonçait excellente.


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Au Nom de ma Liberté...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant