Chapitre 3

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Après cet appel étrange et angoissant, j'en ai conclu qu'il est arrivé quelque chose de grave à Théo. J'ai tenté d'appeler la Compagnie des Guides de Chamonix, l'organisme de guides de haute-montagne, afin de les prévenir et de leur demander de secourir mon ami, mais je suis aussitôt tombée sur le répondeur.

Évidemment, s'il y a une tempête de neige, ils ne risquent pas d'avoir beaucoup de réseau là-bas.

J'ai tourné en rond dans mon salon, m'efforçant de trouver une idée. Mais je suis tellement paniquée que mon cerveau peine à fonctionner correctement. Bref, j'étais à court d'idées intelligentes, et j'ai fait la seule chose qui me paraissait être une bonne option.

J'ai sauté dans ma voiture en prenant mon manteau au passage, et j'ai pris la route en direction des Alpes. Et maintenant me voilà, filant à toute allure sur l'autoroute quasi déserte à cette heure si tardive.

Je pense que c'est certainement l'idée la plus stupide que j'ai prise de toute ma vie. Ça aurait pu être un bon choix, si seulement je n'habitais pas aussi loin des montagnes. Malheureusement, il me faut bien huit heures de trajet pour arriver jusque là-bas.

Et je ne compte même pas les pauses pipi.

Le temps me semble long. Au fur-et-à-mesure que la voiture avale les kilomètres, le sentiment de panique s'estompe et je réussis à réfléchir plus sereinement.

Quelque chose de mauvais est arrivée à Théo. Une tempête de neige ou une attaque de bête sauvage, peut-être bien les deux. Il est possible qu'il se soit fait happer par l'étrange bête que j'ai aperçu sur la vidéo qu'il m'a envoyée. Si ça se trouve, il est déjà mort à l'heure qu'il est.

Non, Lilo. Je t'interdis ce genre de pensées.

La route est longue, et je commence à somnoler. Je suis éveillée depuis trop longtemps et ma journée a été plus que fatigante. J'allume l'autoradio et mets le volume à fond. Mais rien n'y fait. Mes paupières sont lourdes et si ça continue, elles vont finir par se fermer d'elles-mêmes.

Je m'arrête à contrecœur à une station service. Une machine à café et un distributeur automatique sont installés juste sous le porche de la boutique fermée. Je sors mon portefeuille en priant pour que la machine accepte les cartes bancaires.

À l'instant où je m'approche de l'appareil automatique, quelqu'un sort des toilettes. C'est un homme de forte corpulence, âgé peut-être d'une quarantaine d'années. Il a une courte barbe négligée et des cheveux en bataille.

L'individu porte une veste élimée sur lequel je peux apercevoir le logo d'une compagnie de transport routier. En jetant un coup d'œil sur la droite, je constate en effet un énorme camion blanc garé près de la station service.

Le pauvre, obligé de travailler la nuit.

Je commande un café bien noir en tentant de faire abstraction de l'homme qui est apparu et qui semble me regarder avec insistance. Mais impossible d'oublier sa présence. Mon instinct me crie de fuir, sans me retourner.

Je suis peut-être simplement paranoïaque. Il est vrai que j'ai tendance à trop regarder d'émissions télé. Cependant, le camionneur ne cesse de m'épier d'un air étrange.

Cette situation ne me dit rien qui vaille.

J'attrape le gobelet fumant qui sort tout juste de la machine à café. Ainsi, je tourne le dos au nouveau venu - une très mauvaise idée. Alors que je me concentre pour ne pas renverser une goutte de la boisson chaude, je perçois la présence de l'homme derrière moi. Je sursaute lorsque je sens un souffle chaud contre ma nuque.

Maudit Smilodon !Where stories live. Discover now