Chapitre 4

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Ben <3 : Je suis arrivé. J'ai super peur !!! OMG je vais m'évanouir, Lou !

Je lis son message et m'apprête à lui répondre, mais la voix du train annonce l'entrée en gare. Je lâche mon portable pour l'instant, récupère mon sac à dos et descends rapidement. Je m'éloigne du quai et me plante en plein milieu d'une allée pour rassurer mon meilleur ami. Mieux vaut ne pas le laisser dans son stress trop longtemps.

Moi : Ne le fais pas, si tu ne le sens pas !! Pas besoin de prouver quoi que ce soit. 

Ben et moi avons parié quelques mois auparavant que nous ferions notre coming-out tous les deux à nos parents lors de nos débuts en faculté... Et le jour est venu. À peine ai-je envoyé mon message qu'il m'appelle. Je décroche aussitôt et le découvre en panique totale, essoufflé et sûrement larmoyant.

— Je pense vraiment qu'ils vont me renier, Lou ! Ils...Je les connais, ils ne tolèrent pas les-les gens comme nous et...

— Oui, c'est pour ça que je te conseillerais de te calmer dans un premier temps et de rentrer chez toi. 

— Abandonner ? Bonne idée, Lou, sauf qu'ils devront savoir un jour. Je ne passerai pas toute ma vie dans le mensonge pour leur faire plaisir !

— Je sais, Ben, je sais. Respire, s'il te plaît. Ne m'oblige pas à appeler Tristan pour qu'il te récupère après ta syncope ! Ce pari était stupide et puéril, de toute façon. Ne te force pas. Tu essaieras à un autre moment, en préparant le terrain. 

Son silence m'inquiète. Bon sang, je plaisantais pour la syncope ! Je perçois son expiration lourde.

— Non, c'est aujourd'hui ou jamais. Souhaite-moi bonne chance !

— Bonne...

...Chance. Il m'a raccroché au nez. Typique de Ben. J'espère que tout se déroulera bien pour lui. Pour avoir rencontré ses parents plusieurs fois, je saisis parfaitement son angoisse. Je les ai entendus proférer des critiques et des commentaires limite-limite envers la communauté LGBTQ+. Ça ne me surprendrait pas qu'ils réagissent mal. Cependant, ils adorent leur fils. Les Dubos et les Beaumanoir forment une heureuse et grande famille, je ne doute pas que la situation s'arrangera vite. 

Pour ma part, me voilà à Paris où mes parents ont été mutés cet été. Je quitte enfin le quai, me concentrant sur ma position délicate. Je redoute bien moins leur réaction, mais l'incertitude persiste. Ils n'ont jamais déclaré leur soutien envers cette communauté, ni ne l'ont critiquée. Je suis dans le flou. 

Je pose un pied en dehors de la gare et immédiatement, un petit cri aigu attire mon attention. Ma mère, cette femme incroyable, un brin hyperactive sur les bords, sautille en agitant la main en l'air et se met à courir vers moi. Mon père se contente d'un clin d'œil amusé. Je me positionne correctement dans le sol, jette mon sac à dos, fléchis les genoux et me tiens prêt à l'impact, les bras ouverts. Nos deux corps se heurtent brusquement, mais l'étreinte qui s'ensuit est plus douce que du miel.

— Tu m'as manqué, maman. 

— Toi aussi, mon chéri. Tu n'appelles plus autant qu'avant !

Pour appuyer ses paroles, elle s'écarte et me gifle le bras.

— Eh ! J'appelle tous les samedis soirs, comme convenu. 

— Ce n'est pas suffisant ! Je veux plus de nouvelles de mon bébé. Au moins, deux fois par semaine ! En plus, je reçois plein d'articles sur Avignon. Des dealers, des coups de couteau la nuit et même une fusillade ! Une fusillade dans la rue, à la vue de tous ! Non, non, non, je veux des nouvelles fréquentes de toi !

Sunshine ProtectorWhere stories live. Discover now