Chapitre 9

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Chapitre 9 :

Je dois bien avouer que je suis surpris de la facilité avec laquelle nous sortons du batiment. Lorsque tout les pensionnaires vont se coucher dans un brouhaha de discussion tardive, nous nous faufilons jusqu'à la sortie de secours, la seule qui reste toujours ouverte au cas ou. J'ignorais sa présence jusqu'à aujourd'hui, mais je crois que ce n'est pas la première fois que Julian doit sortir du pensionnat quand il fait nuit car il connait les escaliers et le couloir qui mènent du côté Est des jardins, là ou sont rangés les vélos dans la grange, par cœur.

Je me demande, lorsque nous arrivons au bout d'un instant plus rapide que je ne le pensais à l'extérieur, si il est déjà sortit accompagné. Si oui, qui étais – ce ? Un de ses amis populaire ou bien un garçon juste... comme moi ? Mais cette deuxième hypothèse s'efface aussitôt dans mon esprit : Julian n'est pas comme ça. Il n'embrigade pas tout les gars solitaires du pensionnat dans des escapades défendues.

J'écarquille les yeux lorsque Julian s'introduit dans la grange et récupère deux vélos en bon état. C'est vraiment déconcertant la facilité avec laquelle nous parvenons à sortir du pensionnat, jetant d'abord les vélos au dessus de la cloture qui délimite les jardins de la propriété ( ils tombent dans un bruit sourd de feraille, mais la chute légère ne les abîme pas ), puis escaladant juste après.

C'est plus facile d'escalader la clôture que la grille à l'entrée qui est bien plus haute de trois mètres. Je suis moi-même étonné de la fluidité avec laquelle je monte dessus, et réattéris, mon uniforme intact.

On monte chacun sur un vélo, et c'est Julian qui s'élance le premier le long du chemin caillouteux, faisant le tour du domaine pour arriver sur la route principale. Je le suis en pédalant rapidement, essayant de se hausser à son rythme, mais il est trop sportif pour moi. Je peste contre mon corps frêle au moment ou il accélère, l'air joyeux.

Heureusement, au bout de quelques minutes, je réussis à garder une vitesse convenable et il ralentit un peu pour que nous soyons côtes à côtes. Ses yeux sont rivés sur la route, et je lui lance des regards quand je suis sur que je ne vais pas me vautrer par terre ou rentrer dans un fourré. Le vent frais ébouriffe mes cheveux et entre dans mes poumons brûlants ; pour apporter cette dose d'adrénaline qui fait trembler mes doigts sur le guidon. J'entends mon cœur battre fort dans ma poitrine, à cette heure je devrais être dans le dortoir, dans mon lit en train de m'endormir. Je n'arrive pas à croire que nous soyons sortits et que nous nous dirigeons vers un village ou je n'ai jamais mis les pieds pour faire une fête – célébrer quelque chose ? Je n'en sais rien, je m'en fiche – et que ce nous soit Julian et moi.

Autour de nous, la neige a fondu, mais je sais que cet instant de répis ne durera pas longtemps.

On pédale encore longtemps, et je songe à l'entorse de Julian qui a, certes, disparue, mais qui a affaiblie sa cheville. Tout ça est – il bien raisonnable pour lui ?

Au bout d'un moment, nous distinguons au loin des maisons, une église et des lumières vives. Il y a de la musique, et beaucoup de gens, comme je l'avais imaginé. On continue jusqu'à arriver sur la place, en plein cœur de la fête. Autour de nous les gens dansent, ou discutent, un verre à la main, il fait sombre, comme Julian me l'avait dit, même si des dispositifs posés sur les côtés envoient des taches de couleur par bribes ou illuminent les danseurs d'une lumière artificielle. On met les vélos dans une rue déserte proche de là ou se passe la soirée, on les cale sous un banc pour que personne ne puisse les repérer.

Puis Julian m'entraine au milieu de la foule et se fraie un chemin, veillant aussi à ne pas me perdre de vue. Les gens autour de nous ne nous regardent pas, personne ne fait attention aux deux adolescents en uniforme, ils dansent. Des serveurs déambulent dans la fête et l'un d'eux passe juste à côté de nous. Julian récupère deux verres posés sur un plateau et m'en tends un des deux.

J'irais en EnferOù les histoires vivent. Découvrez maintenant