Cabaro

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ID : Cabaro Batathan

Géolocalisation : Löftestad – Ohlde

Date & Heure : 09-E4-A897 8H14

Pouls : Régulier.

État : Stable. Serein.

Aujourd'hui, Cabaro se trouvait au volant d'un bus.

Un bus dont le flanc était estampillé du logo de la PP&E. Depuis quelques semaines, il avait intégré une société affiliée à la grande multinationale qui permettait le transport de Pill Fighters. Outre le complément de salaire que ça lui apportait, ça lui faisait voir plus de pays. À trois-cents kilomètres au sud-ouest de Löftestad, la navette de Yelfran qui les menait jusqu'à Cymrüt d'où ils pouvaient prendre le Frat'Train, sur la fameuse ligne de la Fraternité. C'était là le prochain but de Cab'. Non, pas intégrer la Compétition Mondiale de Pill Fight, mais se mettre aux commandes d'une locomotive. Il pouvait déjà conduire des motos, des voitures, des taxis, des limousines, des bus et des camions. En bon Seylan, il possédait également le permis bateau pour les petites traversées. Cab' voulait maintenant la possibilité de conduire un train.

Il s'engagea sur la bretelle de descente vers Löftestad.

Le paysage ne défilait pas de la même manière dans un train : c'était un sentiment doux-amer, une atmosphère particulière et surtout chacun avait un moment pour soi. Difficile de sauter d'un train en marche, ou de le presser pour qu'il aille plus vite. Dans un train, Cab' se fichait des rares retards et des gens mécontents. Mieux que ça, il s'en nourrissait et la colère d'autrui alimentait sa bonne humeur. Il y avait si peu d'occasion de prendre du temps pour soi. Et par-dessus tout, selon l'heure, la saison, le temps ou l'humeur, les paysages n'arboraient jamais les mêmes couleurs. Il aimait quand le ciel devenait noir au milieu de la journée et les arbres courbés à des angles improbables. L'atmosphère s'électrisait, mais le train filait droit jusqu'à sa destination. Cabaro n'était pas un être d'action, il se laissait porter par la vie, se considérant comme un spectateur transi par la beauté de la Nature. Et il voulait offrir les mêmes sensations à ses passagers.

Cab' quitta la bretelle du Pont de la Concorde, empruntant la voie-spirale, afin de rejoindre la ville en dessous.

La lumière du soleil naissait doucement dans les reflets saphir du lac, et à voir la vitesse de déplacement des nuages, le vent semblait se lever lui aussi. La ville s'éveillait à travers le matériau transparent du Pont : Cab' qui avait pourtant le vertige, adorait la vue sur cette architecture végétale foisonnante. Et dire qu'il tremblait à l'idée d'utiliser un escabeau pour attraper un des rares livres dans la bibliothèque d'Aislin.

Rien ne valait cette sécurité privilégiée derrière un volant. Plus qu'un travail, la conduite était une vocation. Cab' ne pensait pas au vide, ou à l'effondrement improbable de la structure sur laquelle il se trouvait au moins dix fois par jour. Juste à conduire.

Son B.A.I lui indiquait huit heures et quart. Cabaro était en avance. Il pourrait donc prendre son temps pour savourer des pâtisseries dans le quartier de l'Aube. En vingt-huit ans de voyage et en trente-cinq ans de vie, Cabaro en avait vu des choses. Mais, de mémoire, en Ohlde, rien ne remplaçait une pâtisserie chaude parfumée aux baies épicées, dégustée en terrasse de son café préféré : le Speaces. Situé dans une petite rue en pente du quartier surélevé de la ville, l'emplacement de sa terrasse offrait une vue imprenable sur l'eau autour de la capitale lacustre.

Après avoir garé le bus sur le lieu du rendez-vous, Cabaro prit le chemin pentu du Speaces. Si la pente n'avait pas été aussi raide, il aurait laissé sa légère somnolence le ralentir. Rien de tel pour se réveiller que les pentes de Löftestad !

PILLs ╰Niveau blanc⁠╯Where stories live. Discover now