Ina

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En dépit de l'hiver, il faisait aussi chaud au parc d'Ynys que la dernière fois que Joakim y était venu, quand Elgud s'était imaginé chevaucher l'Indomptable. Les fleurs y étaient toujours aussi belles, les arbres toujours aussi verts : c'était encore le printemps.

Joakim se mit tout de suite à fouiller les allées. Il trouva un homme en habits de jardinier à quatre pattes dans un parterre.

– Bonjour.

Le jardinier leva les yeux, « Bonjour », et il se remit à travailler. Joakim fit la moue, il recommença à chercher alentour, mais n'apercevant personne d'autre il se retourna vers le jardinier.

– Excusez-moi, dit-il franchement, je cherche quelqu'un qui pourrait me renseigner à propos de quelque chose qui brûlerait les plantes ?

L'autre releva la tête à nouveau. Il prit l'air de réfléchir une seconde.

– Eh bien... Il y a le feu, par exemple ?

– Oui, bien sûr, mais je veux dire...

– Une forte chaleur, à la limite ?

– Oui, mais...

– Ou alors des radiations, mais je ne suis pas sûr.

– Non non non, rien de tout ça. Je veux dire, quelque chose qui brûlerait les plantes quelque part, on ne sait pas où. Quelque chose qu'on ne connaît pas.

Le jardinier se mit à genoux dans la terre et le considéra d'un air bizarre.

– Tu cherches quelqu'un qui pourrait te renseigner sur quelque chose qu'on ne connaît pas quelque part on ne sait pas où ?

– Je veux dire...

– Joakim, je t'avais dit de me laisser faire !

Elgud arrivait en trottant.

– Excuse-le, Tudi.

– Salut Elgud ! Qu'est-ce qui t'amène ?

En quelques mots bien choisis, Elgud lui expliqua ce qu'ils cherchaient.

– Jamais entendu parler de ça.

– Il y a quelqu'un d'autre dans le parc qui pourrait avoir une idée ?

– Ina, peut-être.

– Ina ?

Tudi leur indiqua le fond du parc.

– Merci Tudi.

Joakim et Elgud s'y pressèrent. Ils se retrouvèrent face à la clairière où se tenait jadis le cheval du roi Marc'h.

Et alors Elgud se figea à l'entrée.

Une main en l'air pour indiquer à Joakim de ne plus bouger, comme s'il ne voulait pas effrayer un animal sauvage.

Au fond de la clairière se trouvait la jeune femme de ce jour-là, celle qui était repartie sur le dos du cheval de bronze. Elle finissait de remplir un arrosoir.

Joakim sentit son cœur sursauter dans sa poitrine.

La fille se mettait à traverser la clairière, et tous les oiseaux dans les arbres la suivaient, toutes les fleurs des parterres se tordaient sur leur tige pour se maintenir face à elle.

Elle continua de les ignorer le temps qu'elle finît d'arroser un parterre. Un arc-en-ciel brillait dans les filets d'eau, même si le ciel était nuageux et que la clairière était dans l'ombre. Les oiseaux piaillaient gaiement au-dessus de sa tête. Elgud sourit de son sourire qui ressemblait à une fenêtre pleine de carreaux cassés, et il fila droit vers elle.

Le Pouvoir des ArtistesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant