Chapitre I

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Ava


- Qu'est ce que j'aime l'été ! Les nuits sont toujours plus agréables à passer et si vous allez à la campagne un de ces quatre vous pourrez voir les étoiles dans le ciel, elles sont d'une beauté imprenable ! Moi, ma femme et mes enfants y sommes allés la semaine dernière et c'était vraiment super, et vous mademoiselle ? Qu'est ce que vous faites dans la vie ?

Bonté divine, il s'arrête enfin de causer.

Je réajuste ma coiffure tout en éclaircissant ma gorge, le chauffeur me jette un regard dans le rétroviseur, attendant ma réponse tout en souriant. Il doit bien avoir la cinquantaine, ventre à bière assez gros pour être visible de ma place de passagère et plus aucun cheveux sur le cailloux.

- Je vais en faculté d'art, déclarais-je.

Il siffle un petit air enjoué puis tourne sur la grande avenue, on est presque arrivés.

- Alors ça ! C'est super impressionnant ! Et vous allez où ce soir ? Si ce n'est pas indiscret.

Sa question est indiscrète mais après quinze minutes de bla-bla sur sa famille, ses enfants et sur l'intégralité de sa vie je crois pouvoir déduire qu'il n'est d'aucun danger. 

- Je vais travailler, dis-je dans un souffle qui trahit un peu mon exaspération.

En général, les chauffeurs ne sont pas aussi bavards. Ils me demandent où je vais et si je veux de la musique puis se taisent pour le reste du trajet. J'aime et bénis ces moments de calme avant la tempête de bruit qu'il y a au travail, surtout les vendredis soirs. Mais je ne peux pas en vouloir à ce pauvre monsieur qui a juste voulu me faire passer un bon moment.

Il hoche la tête tout en se pinçant légèrement les lèvres puis jette un coup d'oeil à son GPS, son expression change du tout au tout.

- Excusez moi mademoiselle, commence-t-il visiblement gêné, vous êtes sûre d'avoir indiqué la bonne adresse ?

Je me redresse de ma place à l'arrière pour regarder le tableau de bord de la voiture et acquiesce en hochant la tête. Il déglutit et semble se liquéfier sur place. Chose est sûre, maintenant qu'il a comprit : il va se taire.

En descendant de la voiture quelques minutes plus tard, je met quand même cinq étoiles à Steven pour sa participation et son enthousiasme et ne prend pas la peine de dire plus qu'un simple "merci" : le trajet à trainé et je suis déjà presque en retard. Et si il y a bien une chose que je déteste, c'est être en retard. 

La queue est déjà longue alors qu'il n'est même pas minuit et les néons multicolores de l'entrée clignotent. La musique de l'intérieur s'entend aussi déjà de l'extérieur. Je m'avance et longe la queue puis passe sous les chaines pour me retrouver devant les videurs que je gratifie d'un signe de tête. Cela fait maintenant une bonne année que je travaille au Sinners, une boite de nuit privée et hyper populaire en ce moment sur Paris. 

La réaction de Steven-le-chauffeur tout à l'heure s'explique du fait que la boîte se trouve dans un quartier assez chaud rempli de bordels et de boîtes où techniquement, on ne traîne pas la nuit et encore plus quand on est une femme. Je déteste dire ça car je rêve d'un monde où les femmes pourraient aller n'importe où et à n'importe quelle heure mais il faut avouer que le quartier du Sinners est quand même assez... spécial. 

Au début, travailler dans une boîte de nuit était carrément hors de question vu les fréquentations. Mais chose étant que j'ai besoin d'argent pour payer mon cursus. Et pas juste quelques centaines d'euros : on parle de chiffre à trois zéros. J'ai pourtant essayé d'autres choses mais rien ne me rapporte assez bien, rien ne me convient où alors je suis juste inadaptée au poste et me fait virer. Alors quand j'ai eu l'occasion de travailler au Sinners, j'ai juste sauté sur l'occasion. Le bon salaire et les horaires flexibles m'ont convaincue, sans compter les pourboires de dingues. En soit, j'ai juste été chanceuse d'être tombée sur un des DJ lors d'une soirée parisienne à qui j'ai expliqué la situation et qui m'a recommandé. Malheureusement pour lui, même si je le suis très reconnaissante ce n'est pas parce qu'il m'a trouvé un boulot qu'il aura plus qu'un merci. En plus de ça je suis déjà casée et heureuse avec mon copain et le mot "tromperie" ne fait absolument pas parti de mon lexique. 

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