— Souhaitez-vous vous rendre à la zone commerciale avant de monter dans votre appartement, monsieur ? demanda le chauffeur.

— Faisons ça.

L'homme transféra les données à un autre chauffeur avant de prendre la route. La voiturette passa par le parking souterrain, puis par la pente se trouvant à côté de l'ascenseur mécanique, passant par le Portail en ayant pour musique de fond Faust Ouverture, de Richard Wagner, résonnant dans la complétude du Dôme à travers des enceintes suspendues aux lampadaires.

— Bonne soirée, Monsieur, lui dit le chauffeur.

Braham ne souffla pas mot, descendit du véhicule, puis se dirigea vers une autre golfette dans la zone d'attente, devant le Passage. L'autre golfette fit demi-tour.

— Bonjour, Monsieur, lui dit le nouveau chauffeur.

Il répondit par un sourire pincé. Ils prirent la route, passant devant un parc de repos, un café, un bar, puis entre le QG administratif et le District 4. Devant eux, un portail télescopique les séparant de la zone commerciale. Braham remarqua que l'endroit était à l'écart des habitations. La zone commerciale était cloîtrée par un mur arrondi.

Sa façade était flanquée d'une centaine d'images d'œuvres d'art numérisées, présentées en très haute résolution grâce à des projecteurs. Soudain, le chauffeur s'arrêta devant une pointeuse-badgeuse tactile. Il scanna son badge, pendant que Braham observa la carte-clé dans sa main.

Un QR code. Cette carte pouvait-elle lui donner accès à d'autres endroits que l'appartement ? Il n'eut pas le temps d'y réfléchir, que le passage fut libéré. La voiturette se gara au centre des boutiques de luxe pour hommes, et...

Contemplation. Réalisation. Choc.

L'autre côté du mur était donc là où se trouvaient les fameuses vitrines. Seuls les célibataires avaient dû être informés de cette activité. Si Braham demandait au chauffeur comment s'y prendre, peut-être qu'il se ferait démasquer. Il sortit du véhicule, indifférent, et observa rapidement le fonctionnement de la cinquantaine de vitrines.

Une fois la femme choisie, l'invité devait passer sa carte devant le scanner à droite de la porte automatique. Un haut-le-cœur ne le quittant pas, il s'avança, les mains dans les poches pour se pincer la peau, et observa leurs physionomies. Leurs noms n'étaient pas indiqués. Les femmes habillées, maquillées et coiffées se tenaient immobiles, comme des Barbies dans une boîte. Ses battements de cœurs furent plus douloureux quand il pensa aux mots de Zoé.

Les femmes seraient plus heureuses d'être sauvées que d'être soumises aux ondes radioactives par les Colibris, avait dit Cadiana. Braham fit un premier tour en partant de la droite. Au moins, Jill n'était pas là, pensa-t-il, son cœur battant moins douloureusement. Arrivé à l'extrême gauche, — enfin — il croisa le regard d'une femme dans la vingtaine.

Ses cheveux blonds aux racines brunes étaient bouclés pour l'occasion. Un grain de beauté se trouvait sur sa joue gauche et sa clavicule. Elle avait un nez droit, une lèvre inférieure plus pleine que la lèvre supérieure, maquillées d'un rouge cerise, et des yeux verts en amande.

Sa robe était en satin, vert chrome, marquée à la taille. Ses seins étaient recouverts de deux morceaux de tissu en forme de coquillages, suspendus par des bretelles épaisses, dont le dos comportait deux larges traînes.

Vous voici, enfin.

Contrairement aux autres, Braham pouvait sentir son expression rébarbative. Quand ses yeux se posèrent sur elle, elle le mitrailla d'un regard, secouant discrètement la tête pour ne pas être choisie. Sans hésiter une seconde de plus, il passa sa carte devant le scanner.

Rouge sur Noir (terminée)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant