22. Charivari

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— Dis-moi au moins quelque chose qui pourrait me rassurer... un peu. (Pause) Dis-moi que cette mission te mettra pas à bout et que j'aurais pas à y penser jour et nuit.

Braham fixa son regard sous ses pieds, puis prit une profonde inspiration. Il secoua la tête, puis déglutit avant de poser son regard vide sur son aîné.

— Entre nous, Jojo, je suis déjà à bout, alors rien de pire ne peut m'arriver, j'imagine.

Johan n'osa pas lui dire que : si, le vide éternel volontaire. Braham tenta de le rassurer par un sourire misérable que Johan ne put regarder sans sentir ses parois cardiaques se rétracter.

— Comme le dit si bien Azad, reprit-il plus gaiement, la vérité ne me filera que déception, alors à quoi bon la craindre, pas vrai ? Si ma vérité est de perdre comme toujours, alors... au moins, j'aurais tout donné. Je serai quand même fier de mon chemin et de mes efforts.

Johan fit la moue.

— Tu mens. Je peux le voir. Le sentir. Le deviner. Y'a pas que moi qui m'inquiète pour toi. Tu réalises que tu vas affronter en personne ceux qui t'ont tout pris, même ton espoir ? Si c'est pour infiltrer le Dôme et te perdre, dis-moi, ça en vaut vraiment la peine ?

Braham posa ses mains sur les épaules de Johan.

Relax max. Sérieux, Jojo, tout ira bien. Tout. Ira. Bien. Fais-moi confiance. Tu me fais confiance, hein ? Dis-moi que tu me fais confiance.

— Ça se demande même pas. On te fait tous confiance les yeux fermés, c'est pas la question. Le souci, c'est qu'on parle d'Odet que tu vas affronter en personne. L'homme qui a engagé un tueur à gages pour tuer tes parents, tes sœurs et ton beau-frère, dit-il sans ambages. On parle d'un homme qui tue pour le pouvoir, je sais pas si t'arrives à te rendre compte qu'on risque de mourir sans que personne pleure notre mort. Tu sais bien que je suis prêt à y aller la tête la première si c'est pour une bonne cause, mais tu dois me laisser avoir peur. J'ai peur pour toi, que tu perdes gros. Et qui sait ce qui est gros pour toi. On est pas très chanceux comme types, admets-le. Je suis conscient que c'est une envie mûrement réfléchie, comme ton plan et tout ça, mais...

— Il n'y a pas de mais, le coupa-t-il en trombe. Jojo, on va rester en vie, promis.

Johan prit une profonde inspiration, avant d'incliner la tête, les sourcils arqués.

— À quoi bon vivre si on ne vit que pour le désir de mourir ? À quoi bon vivre si plus rien ne nous fait nous sentir vivants ? À quoi bon vivre si la personne qui fait bon vivre cette maudite vie quitte le monde des mortels ? Tu souhaiterais peut-être que je continue ?

Le jeune Cunningham ferma les yeux, reconnaissant les questions qui sortaient de sa bouche.

— Braham, tu te posais ces questions chaque jour après leur mort. Ces questions ont mis six mois à s'éteindre vocalement et persistent secrètement dans ta tête, de peur de nous inquiéter. (Soupir) Promets-moi de vouloir vivre pour vivre même après la défaite, et après ça, je te laisse.

Braham pouffa de détresse.

— Tu me poses une colle, c'est de la triche.

Johan vint poser sa main calleuse sur sa nuque et rapprocha sa tête de la sienne.

— C'est pas de la triche, c'est de la précaution, p'tit.

Après un moment de silence à sceller ses lèvres :

— Je promets de vouloir vivre pour vivre même après la défaite, mentit-il.

Johan lâcha sa nuque, tourmenté intérieurement. Il fit bonne figure.

Rouge sur Noir (terminée)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant