𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟑

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On arrivait dans le 14e arrondissement autrement appeler le quartier du Montparnasse, célèbre pour son effervescence artistique et le Lion de Belfort. Dans la voiture, personne n'avait prononcé un seul mot ni commis un seul bruit. Puisque mon patron était concentré sur la route, cela l'empêchait de s'exclamer sur sa beauté ou toutes sortes d'aventures rocambolesques de son vécu. Il était donc facile de rêvasser dans son coin. C'était ainsi, dans un merveilleux silence, que je me contentais d'observer chaque rue inondée par la grisaille. Comme la Renault possédait de larges vitres, les gouttes de pluie s'écrasaient agressivement et d'un air attentif, je scrutais le chemin qu'elle prenait pour s'écouler avant de disparaître.

La pluie encrait la terre depuis ce matin déjà et chaque passant que nos prunelles croisaient possédait un parapluie. On aurait dit qu'ils décoraient la ville tout entière avec. Plus rien ne les atteignait. Ils n'osaient même plus tendre la main pour effleurer le chagrin du ciel, maintenant seul et délaissé à l'écart de toute humanité. Le printemps était connu pour être morose, alors avec lui, je partageais cette mélancolie qui résonnait jusqu'aux plus profonds de mes pensées. Peut-être que j'étais l'unique personne à penser ainsi mais ça m'allait très bien. De toute manière, je me suis toujours senti différent, à l'écart.

Mon enfance tournait autour des douces senteurs de compagnes, de la rosée du matin glissant sur les chevilles, de l'orage qui nous invitait à danser sous ses coups de tonnerre, les genoux écorchés avec les mains dans la boue, les grillons qui chantaient des chansons pour nous apaiser les tympans après les bêlent des moutons de la veille, les nuits remplies d'étoiles jusqu'aux plus profonds de la voie lactée et enfin les bras chaleureux de ma mère, que j'avais finis par délaisser quand elle m'avait quitter.

Toutes ces choses que personne ici n'avait vécues et que moi-même, ne pourraient plus revivre et quand le vieil âge m'attendra, si je vis encore jusque-là, que je finirais sûrement par douloureusement oublier. Finirais-je comme eux, sous un parapluie ? Coupé des liens du chagrin de la vie ? C'est une bonne question, mon cher moi.

Pendant le trajet, j'avais longtemps réfléchi sur les meurtres de ces femmes et de ce dealer vagabond. J'avais d'abord supposé que selon la classe sociale des hommes qui ont déposé les plaintes, elles étaient toutes femme au foyer. Par conséquent, je m'étais dis qu'ils se servaient d'elles pour leur demander de chercher de quoi se détendre entre travail et vie familiale. Mais comme mon Patron avait retrouvé un cahier de dépense qui appartenait à l'une d'entre elles, cela pourrait tout aussi bien des femmes un peu plus indépendantes. Bien évidemment, cela ne nous prouve rien, ce sont seulement quelques suppositions hâtives. Ce qui n'est pas correct, c'est la cohérence des événements. Jamais une femme prendrait un tel risque de faire marcher avec un homme aussi dangereux, peut-être que quelqu'un se cache derrière toute cette manigance ? De plus, ce dealer à lui aussi des manies qu'on ne supposerait pas. Pourquoi seulement vendre à des clients lambda ? Comment obtient-il autant de richesse ? Pourquoi sachons-nous toujours où il finit par s'installer ? Puis au fond, quelles sont ces raisons ?

Tout cela reste un mystère à résoudre et quand l'horloge tintera 9 coups, tout sera plus claire. Du moins, c'est ce que j'espère.

Au loin, j'entendais quelqu'un appeler mon nom. C'était de plus en plus bruyant, tellement que j'entendais au fonds, tous les bruits du monde. Que ce soit la radio qui fredonnait du saxophone, le vent qui s'immisçait entre la carrosserie ou une voix claire, que je pourrais reconnaître entre mille. Ensuite, c'était la vue qui me revenait. J'apercevais le ciel bataillé parmi l'ombre et la lumière au-dessus de la ville, la forme de chaque siège en cuir réapparut. Puis d'un coup, quand Seok-Jin avait tiré le levier pour faire actionner les essuies glaces. J'avais bêtement sursauté, tout en me cognant la tête contre la portière. Le regard noir vers le rétroviseur, lui m'offrait un air paniqué.

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⏰ Dernière mise à jour : Aug 29, 2021 ⏰

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EVERCLEAR ᵏᵒᵒᵏᵛOù les histoires vivent. Découvrez maintenant