𝑪𝒉𝒂𝒑𝒊𝒕𝒓𝒆 𝒕𝒓𝒆𝒊𝒛𝒆

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Sa respiration est calme, son regard dure comme la pierre et son expression faciale froide comme neige.

Je ne sais plus ce dont j'ai envie. Je veux mourir, rester en vie, le tuer et le supplier de m'expliquer.

Je n'ai plus la force de lutter, ni celle d'espérer. Mais je n'ai rien d'autre à faire. Je suis prête à tout. L'embrasser, lui offrir mon corps, partir faire le tour du monde avec lui. Je veux simplement qu'il me garantisse qu'elle vivra. Mais lui non plus ne le peut pas.

Le plafond semble si haut. Mes rêves si lointains.

Je vois ce jour, je visualise cette après-midi. Celle où ma vie a changé. Je me rappelle du livre que je lisais, de ce qu'il m'a dit et de la crainte que j'ai ressenti. Je me souviens de la confiance que je lui ai donnée, de cet espoir qui s'est construit en moi.

Je me souviens et je me hais. Pourquoi je l'ai laissé s'asseoir à mes côtés ? Pourquoi je n'ai jamais rappelé Spencer ?

Ils m'ont mise sous assistance respiratoire depuis mon réveil. Je ne sais pas à quoi ressemble ma fille. Est-ce qu'elle a pris les cheveux de son papa ou les miens ? Ses yeux ou les miens ? Est-ce qu'un jour ses yeux cligneront devant moi ? Pourrais-je un jour la prendre dans mes bras ?

Je fixe le plafond, j'aimerais qu'il s'écroule. J'aimerais pouvoir hurler la vérité à toutes ses infirmières, leur dire ce qu'il m'arrive, leur expliquer que cet homme ... cet homme n'est pas celui qu'il prétend être.

Il est assis à côté de moi, et dès que quelqu'un nous rejoint, il prend un air paniqué.

Mais là, ça fait une dizaine de minutes qu'il me regarde, et que j'observe le plafond. Ce si haut plafond, qui est comme le reflet de ce que je ne peux pas croire.

— Je n'étais pas un inconnu, lâche-t-il.

Je ne veux pas répondre et de toute façon, je ne peux pas. J'écoute, ne comprends pas, mais je m'en fiche. Je veux juste imaginer ma vie et ce qu'elle aurait pu être.

— Tu me connaissais déjà, Kayla.

Il expire.

— ... Au lycée.

Je tourne la tête vers lui. J'attends la suite de sa phrase. Je ne me fais aucun faux espoir. Il me ment certainement. Il veut seulement de l'attention.

— Tu étais harcelée, et ce jour-là, deux filles ... deux filles t'avaient déchiré le travail que tu devais rendre.

Il ne me regarde plus. J'entends mon rythme cardiaque s'accélérer, ma respiration se faire plus forte, et je continue d'attendre.

— Je t'ai sourie, tu as fait pareil, et pourtant tu avais envie de pleurer. J'avais des cheveux bouclés et blond, des yeux verts.

... Nous étions un mardi. Il portait un jeans noir avec un sweat.

Petite fille de 13 ans, je rêvais d'un ami. Sourire aux lèvres, larmes aux yeux. Un papa et une maman, et je suis le fruit d'un amour formel.

Petite fille de 13 ans, je suis en seconde. Je reste seule dans les couloirs, peur infinie des WC. Harcèlement et humiliation, rythment mes journées, mais je me vois combattre le mal un jour.

Petite fille de 13 ans, je suis timide. Aucun repère, aucun soutien. Je veux de l'aide et un ami, et j'en ai eu.

Les jours se ressemblent : coups, cahier détruit, cheveux tirés, crachat et insultes. Je me laisse mourir et j'assure à papa que tout va bien.

Je me dégoute. Je ne suis qu'un objet, qu'une pute qui mérite de crever. Le regard de Cameroun me fige et ceux de ces gens, qui m'ont vu nu en photographie, aussi. Et je n'ai personne de mon côté, jusqu'à ce mardi.

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⏰ Last updated: Jul 11, 2021 ⏰

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Un S pour Spencer [TOME 3] [EN PAUSE]Where stories live. Discover now